patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

533 Billets

6 Éditions

Billet de blog 24 septembre 2008

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

de l'intérêt de la frustration

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le hasard de la lecture des billets ou commentaires de certains de mes contacts m'a fait réfléchir sur la sorte de frustration que peut engendrer la participation au club de mediapart. L'un se plaint, avec humour, de ce que ses propos, qui lui paraissent de bon sens, suscitent des réactions souvent acrimonieuses et des reproches injustifiés. L'autre déplore la lenteur des réactions à un billet où elle critique l'initiative prise par mediapart de vendre des photos ; elle regrette aussi d'avoir dû fermer une édition qui n'avait pas trouver d'écho. Tel autre renonce momentanément à écrire, le temps que se pansent des blessures que des réactions maladroites avaient provoquées ; tel autre s'efface ; tel autre accuse mediapart (mais c'est qui précisément ?) d'être décidément nul. Toutes ces réactions me touchent - et j'ai dû en oublier quelques unes - parce qu'elles sont le signe d'un malaise et je voudrais essayer d'y voir plus clair.

Ecrire un texte et l'expédier sur le net semble devoir entraîner automatiquement que ce texte soit lu et suscite des commentaires, surtout dans le cadre du club et des réseaux qui s'y sont constitués. Quand cela arrive, il y a un sentiment de reconnaissance, aux deux sens du terme : on a de la reconnaissance pour celui ou celle qui dit que c'était génial, sympa, etc. et on se sent reconnu, ce qui somme toute n'est pas une chose si courante que ça. Or, c'est souvent le silence ou, pire, des réponses qui sont tout à fait à côté du thème traité ou, et c'est le comble,des réponses qui marquent que le lecteur n'a strictement rien compris à ce qu'il a lu. D'où, selon le caractère de chacun, des crises de rage, des moments de découragement (à quoi bon ?), des remontées des expériences de l'enfant qui se sent incompris ou mal jugé, des accusations lancées un peu à tort et à travers.

Et pourtant, tout cela est inévitable. D'abord parce que le développement du club rend impossible qu'on suive toutes les discussions, qu'on réponde à toutes les sollicitations. Ensuite parce que la rapidité de réaction à tel ou tel article ou billet ne favorise pas toujours la précision ou la clarté de l'expression. Le prof que j'ai été s'est toujours dit que s'il n'était pas compris, c'est qu'il n'avait pas su se faire comprendre - je dis ça et en même temps je sais fort bien que j'ai souvent cédé à l'explication facile de ces incompréhensions par l'ineptie du public ou par la prégnance de l'idéologie dominante...-. Donc, faut accepter ces risques : ça fait flop, parfois, alors qu'on attendait des bravos ou du moins une preuve de sympathie. Que faire alors ? mettre sa déception dans sa poche et son mouchoir par dessus, passer à autre chose ou attendre un moment plus propice,se réjouir d'un petit signe et continuer d'écrire : ce sont des attitudes possibles, il en est certainement d'autres. La frustration me semble être productive dans la mesure où elle permet un retour sur soi, où elle favorise une distance, un écart que l'échange sur le net tend justement à abolir, puisqu'on attend une réponse immédiate.

Mais il est vrai que tout cela dépend de la quantité d'énergie, d'espérances et, parfois, d'illusions investie dans l'expérience de mediapart. Et surtout si on l' a accompagnée, depuis le début, et si l'on passe devant son écran beaucoup de temps.Comme toujours on attend un retour sur investissement et l'on se prépare quelques bonnes déceptions.

Je n'ai pas de remède miracle à ces frustrations, sauf à dire que ce n'est pas si grave que ça, que c'est même une des règles du jeu et que mediapart n'est pas une communauté idéale reposant sur des valeurs communes partagées par tous les participants et qui imposeraient à tous des comportements en adéquation avec ces valeurs. Q'il y ait des grincements de dents et des froissements d'ego - et je grince des dents aussi et mon ego aussi a ses susceptibilités - me semble inévitable. L'essentiel étant que des rencontres puissent avoir lieu, se faire et se défaire au gré des discussions amorcées. Et que chacun puisse y trouver son compte.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.