patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

533 Billets

6 Éditions

Billet de blog 25 mars 2008

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

l'arme du silence

patrick rodel

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

étrange de commencer un blog par le thème du silence. Depuis quelques semaines, à Toulouse, à l'initiative des Franciscains, un groupe de personnes se tiennent, sur la place du Capitole, en cercle, le visage recouvert d'un masque, et demeurent ainsi, debout et silencieux pendant une heure. Ils sont là pour protester contre les centres de rétension où sont placés des hommes, des femmes, des enfants dont le seul crime est d'avoir cru que la France était une terre d'asile. Ils peuvent y rester, dans des conditions souvent précaires, plusieurs jours, avant d'être renvoyés dans leur pays d'origine. On sait que la législation est devenue draconienne à l'égard des sans-papiers.Tous les recours contre l'injustice de ces lois ayant échoué, il ne reste plus qu'à témoigner, par le silence, du refus de l'injustice.

Et ce silence doit interpeler les passants et, plus loin, les responsables de l'administration. Dans le brouhaha ambiant, dans un monde où l'argumentation a cédé le pas à la violence verbale, dans un environnement assourdissant où nous risquons bien de devenir sourds, totalement, aux cris de ceux qui souffrent, le silence devient une arme, la dernière pour signifier notre refus de cautionner cette politique deshumanisée.

Participent à ces cercles, au départ, des religieux,puis des membres de diverses assos, lorsqu'ils veulent bien laisser de côté les querelles de boutique, puis de simples citoyens.

Action non-violente, bien sûr, mais pas au plan symbolique. Est-ce encore une manifestation? sans doute pas. Simplement être là et ne rien dire, en espérant que ce silence sera à ce point étonnant, dérangeant, qu'il obligera les passants à se demander ce qui se passe là, où il ne se passe rien, à poser (se poser) des questions - il y a un ou plusieurs panneaux pour exposer les faits -. Quand la raison n'a plus droit de cité, quand la force seule prime ; quand le dialogue, la négociation, l'échange d'arguements menés selon le respect de certaines normes logiques et de certaines valeurs éthiques sont ridiculisés, il reste cette possibilité ultime de dire quelque chose par le truchement du silence, celui qui est réduit au silence peut encore donner du sens à son silence.

Le 25 mars

Patrick RÖDEL

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.