Les pluies d'orage et la chaleur étouffante de ces derniers jours n'ont pas eu que des conséquences dramatiques. Les cueilleurs de cèpes sont revenus de leur recherche avec des paniers remplis de champignons tout frais sortis de terre - ronds, dodus, d'un marron foncé qui avait parfois des éclats de rouge profond - et sur les pentes argileuses, les plus petits, auxquels on donne le nom de bouchons de champagne, poussaient avec une belle obstination qui faisait fi de tous les obstacles - racines ou fragments de roche, rien ne résistait à leur poussée. Avez-vous jamais croqué un de ces bouchons tout cru, après l'avoir soigneusement nettoyé ? c'est une des gâteries que réserve la nature - ça vous a une de ces saveurs de noisette tout à fait inattendue qui vous restera longtemps en bouche. Je sens que l'on va me demander où j'ai pu faire de telles cueillettes et, pour une fois, je ne vais pas me contenter d'une réponse vague - là-bas, plus haut, en parcourant du geste la moitié du paysage -, je vais vous dire les choses très franchement - c'était dans les Pyrénées, les cèpes de juillet y poussent dans les hêtraies, alors que ceux du mois d'août poussent plus volontiers sous les sapins, il faut les consommer rapidement car les vers s'y mettent vite et en vingt-quatre heures risquent de faire perdre à vos cèpes leur fermeté idéale, du moins dans la Haute Vallée de l'Adour où j'ai séjourné, la semaine dernière.
Le billet de Vingtras me rappelle à bon escient que ce 28 juillet est la date anniversaire de la naissance de Henri Guillemin - 28 juillet 1903 - cent-dixième anniversaire, donc. C'est à sa mémoire que je dédie cette petite évocation des joies du mycophile - Guillemin adorait chercher des champignons - innocent passe-temps qui permet de découvrir que tout n'est pas mauvais dans ce bas monde ! Nous aurons l'occasion de célébrer plus sérieusement cet anniversaire, au mois d'octobre prochain.