Ce 11 juin le quotidien Le Télégramme de Brest a publié une longue enquête sur la base militaire des sous marins du type SLNE, l’Ile Longue et son arsenal. Sous la plume de Hervé Chambonnière, le rédacteur de ce « réquisitoire » auquel le quotidien a offert un nombre considérable de pages, pas moins de 4 articles publiés le même jour ! (1 à 4 les Liens ci dessous). Du télégramme au rapport d’enquête d’investigation, du jamais vu pour ce quotidien régional, habituellement réservé sur de tel sujet stratégique et militaire, préférant sagement s’étaler en graphite papier et la plus part du temps, sur le concours de boules du patelin du coin, ou encore sur les olympiades des bouses à vaches.
Un scoop ! A tel point que le Ministre de la défense, Jean Yves Le Drian s’est senti obligé de réagir, et de publié un communiqué par la voie de l’AFP, le général n’en a pas moins [ demandé une « enquête approfondie sur la sécurité » du site de l'Ile Longue. ] Une enquête approfondie pour rectifier l’erratum atomique après la livraison du Livre Blanc, malgré l’assurance du [porte-parole du ministère de la Défense … : « La sécurité de notre dissuasion (nucléaire) n'est pas en défaut, a assuré Pierre Bayle. Je tiens à rassurer tous ceux qui craindraient pour la sécurité de notre dissuasion, celle-ci n'est pas en défaut » ] (5)
Pierre Bayle qui nous assure que la sécurité de notre dissuasion nucléaire n’est pas en défaut, mais se réserve bien de nous assurer que la sécurité des bretons du Finistère, et bien au-delà, est réellement effective ! On peut en douter sérieusement à la lecture de cette édifiante enquête. Comme le signale à juste titre Hervé Chambonnière, qui s’interroge sur l’éventualité du crash d’un avion gros porteur ou même d’un bateau suicidaire fonçant droit devant sur cette base nucléaire. […Ces scénarios auraient été pris en compte. Pourquoi alors aucune batterie de missiles sol-air n'a été mise en place ? Comment empêcher le crash d'un avion qui se jetterait sur le site (assez protégé pour résister à un impact d'avion de ligne ?) ? ]. Car si le risque est bien réel à l’Ile Longue, pour quelle raison ce scénario n’a-t-il jamais été exploré par le journaliste du Télégramme de Brest sur d’autres lieux tout aussi et sinon plus dangereux, des lieux probablement plus vulnérables encore que cette base militaire. Notamment à la Hague, la péninsule atomique de France, la Hague et sa piscine de refroidissement des barres combustibles usagées des centrales nucléaires, une piscine hangar couverte par un simple bardage de tôle ondulée, une autre histoire nucléaire française encore plus édifiante, tel que le Canard enchaîné nous l’avait si bien conté.
Un crash qui en cache un autre.
Pourtant, un scénario crash qui avait déjà été imaginé, non pas au sujet de la dissuasion nucléaire, mais pour la résistance du béton de l’EPR à Flamanville. L’ancien porte parole du Réseau Sortir du Nucléaire, Stéphane Lhomme en sait quelque chose, lui qui fut convoqué en garde à vue à deux reprises par les services secrets (DCRI), et suite à la large publication par SDN d’un rapport interne d’EDF qui avertissait du risque de la défaillance en résistance mécanique du béton du réacteur EPR, ce dans le cas du crash d’un avion gros porteur. Gardé à vue au prétexte d’avoir divulgué ce défaut majeur, le risque incalculable par l’attentat kamikaze ou l’accident « improbable » d’un avion de ligne, le lanceur d’alerte fut gardé à vue ! Un cas de figure théorique, relevé aujourd’hui par Le Télégramme de Brest pour la base de l’Ile Longue, cette théorie qui n’a pourtant pas été retenue par les instances européennes, lors de la réalisation du cahier des charges sécurité des centrales nucléaires européennes suite à la catastrophe de Fukushima ! Les responsables européens ont gommé tout bonnement ce scénario, les terroristes n’existent pas dans leur cinéma post Fukushima, la chute sur un centrale nucléaire, volontaire ou non d’un avion de milliers tonnes chargé de kérosène, dont ici à la Hague, le couloir de navigation venant de Paris vers les Etats-Unis est pourtant situé au dessus de cette zone la plus nucléarisée de France et du monde probablement. Hervé Chambonnière sera-t-il lui aussi questionné par les agents secrets de France ? Et de là a vouloir revendiquer des batteries de missiles sol-air aux abords de toutes les centrales nucléaires françaises, il n’y a qu’un pas qui cadre parfaitement le vieil adage antinucléaire : « société nucléaire société militaire ».
Une enquête si proche de la " LPM"
L’Ile Longue qui a sa place dans l’économie locale Brestoise depuis des lustres, Patricia Adam la députée brestoise et spécialiste en ce domaine veille à faire respecter les vœux des militaires et des syndicalistes associés, n’avait jusqu’à lors que peu inquiété le quotidien régional sur de tel sujet de sécurité en dissuasion nucléaire, de plus le Livre Blanc qui ouvrira les débats pour la LPM (Loi de Programmation Militaire) a été remit au Président de la République qui le transmettra à l’Assemblée Nationale pour en débattre prochainement. Une Assemblée de députés qui sera alors surprise à la lecture du Livre Blanc et de ce constat si édifiant, qu’aucun budget supplémentaire ne soit prévu et dédié à l’armement nucléaire, ce pour corriger ces défaillances si choquantes aux yeux du journaliste, le novice investigateur du Télégramme de Brest. Le grand publique n’y trouvera rien à redire, si d’aventure les quelques 3.5 milliards d’€ déjà alloués à la dissuasion nucléaire (à ce qu’on nous dit), soient augmentés d’une rallonge d’un milliard de plus, à satisfaire la crainte populaire et de sécuriser la dissuasion atomique française.
(1) Ile Longue. Les incroyables failles dans la sécurité
(2) Sécurité de l'Ile Longue. De nombreuses mesures en quelques mois
(3) Ile Longue. Une forteresse pas si secrète
(4) Le droit de savoir
http://www.letelegramme.fr/ig/generales/regions/bretagne/le-droit-de-savoir-12-06-2013-2130826.php
(5) Ile Longue. Le Drian demande une « enquête approfondie sur la sécurité du site »