Le logement d’abord ! Vraiment ? PL 1° Novembre 2019
La date d’ouverture de la trêve hivernale permet aux fidèles de l’Abbé Pierre de se réjouir que cette mesure courageuse qu’il avait fait voter ne soit pas remise en cause. Jusqu’au 15 mars, on pourra éviter de voir des familles mises à la rue, et l‘on attendra l’été prochain pour décompter les expulsions qui, dit le journal La Croix de ce jour, ont augmenté de 152 % depuis 2001 : en 2018 nouveau record, 15 993 interventions ont eu lieu, avec le concours de la force publique.
L’annonce officielle que 15 000 places d’hébergement seront financées cet hiver est-elle une bonne nouvelle, et va-telle permettre le Zéro Sans-Abri promis, face à cette vision désastreuse d’hommes, de femmes et de familles à la rue qui fait honte à notre pays, brèche dans la solidarité nationale ?
Chose curieuse, la politique annoncée en la matière était tout autre : il était question de diminuer les personnes hébergées, et pour cela de réanimer une mesure que le ministre Borloo avait déjà introduit en France par un communiqué de presse le 9 décembre 2011 : « Le Logement d’abord » (Housing First dit-on outre atlantique) est depuis cette date un financement très en vue. Cette mesure sociale couvre en fait une recherche d’économies : cela coute moins cher de procurer un logement et son accompagnement que de payer des nuits d’hôtel ou des subventions aux associations caritatives.
Devant un 115 saturé, les quelques centaines de places actuellement relevant de ce dispositif font un bon travail, mais nullement à la hauteur quantitative des besoins. Et il faut bien soustraire à d’autres bénéficiaires du Droit au Logement des lieux possibles d’attribution quand la quantité globale d’un parc social disponible est trop faible !
D’abord, un slogan mensonger donc car le logement ne passe toujours pas avant bien d’autres domaines de l’Economie dans l’esprit de nos dirigeants.
Et c’est bien dommage. Une politique du logement est en attente.
La mesure fait croire à une priorité, mais le manque de logements abordables est en panne. Par leur vote massif pour une loi ELAN et des lois de finances qui réduisent les capacités d’investissement des bailleurs sociaux, affaire dite des APL qui n’est qu’une simple ponction financière conjoncturelle, les députés sont responsables d’une grave dérive Economique : le nombre de logements sociaux mis en route depuis deux ans est retombé de près de 100 000 à environ 70 000. Et ce déficit va s’ajouter à la crise humanitaire, ainsi, et c’est tout aussi grave, qu’aux difficultés de l’économie générale du pays.
Dans un livre [dont j’ai rendu compte en son temps sur mon blog toujours en ligne sur MEDIAPART] : Se loger en France, présenté par une personnalité particulièrement compétente par son expérience et sa formation, et lisible par tous les députés qui n’auraient jamais dû voter ces lois, il est clairement calculé et démontré qu’ 1 logement construit par an, c’est 2,83 emplois de plus. Nous venons de perdre par une politique mal menée plus de 30 000 x 2.83 = 100 000 emplois.
Le logement privé n’apporte rien à l’offre nécessaire. Source pour bien des français de revenus pour leur retraite, il n’est pas prêt de prendre le relais du logement pas cher. Bien des propriétaires ayant eu l’opportunité d’acquérir outre leur propre logement un deuxième qui rapporte toujours plus qu’un livret A ont besoin de louer pour faire face à des retraites trop faibles,
Le logement privé n’est pas une solution à la crise.
La politique votée va donc réduire aussi l’emploi, en même temps qu’elle réduit la capacité à loger. Il se trouve que les milieux économiques sont les maitres du secteur du logement social, et du patrimoine important constitué depuis un siècle, à travers l’accumulation du fameux 1% : on peut attendre d’Action Logement qu’il joue toujours son rôle pour le logement des travailleurs. On attend surtout qu’il sorte de ses difficultés internes et qu’il prenne aussi en charge les chômeurs, les jeunes aux revenus insuffisants pour se payer leur loyer, les mal-logés… par une nouvelle politique d’ensemble intelligemment mise en œuvre.
Nos économistes au pouvoir devraient comprendre que le problème du logement n’est pas contraire à la vision humaniste qui est un peu trop seule pour réclamer une France solidaire. La possibilité d’une production de logement comme moteur de l’économie est une innovation Révolutionnaire puisqu’on en cherche, qui remplacerait les vieux moteurs polluants comme l’automobile par exemple.
Mais quel maire va pouvoir faire une politique de logement social sans être évidemment battu aux prochaines élections. Il n’y a plus comme en 1954 une majorité de mal logés, voire attentive aux mal logés, et un maire bâtisseur est un maire battu.
Question finale : qui pourra faire connaitre qui seront les vrais bénéficiaires de la vente de 40 000 HLM par an, promue comme solution pour résoudre la crise, second subterfuge !