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Billet de blog 20 août 2012

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Logement : ne ratons pas le changement

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le club  ROOSEVELT 2012 nous rappelle que l’été sera animé par des rencontres « de gauche » qui pousseront les feux sur des solutions pour le changement.  Il note : MEDIAPART (25-26 Aout), E.E.L.V. (22-24 Aout), le P.S. à La Rochelle (24-26 Aout) puis à Toulouse (26-28 octobre), le Front de Gauche ( 25-26 Aout), ATTAC  ( 24-27 Aout).

Et nous rajoutons les Pote à Pote ( 4-6 octobre) ainsi que des réunions associatives ou professionnelles qui fourniront des argumentaires importants à nos élus pour faire face à la crise, du logement en particulier.

 Les premiers écrits reçus en préparation de ces différents lieux de réflexion semblent parfois mal connaître les spécificités du secteur du logement, ce « bien premier » des citoyens qui ne sont pas satisfaits de leur habitat, alors que cela pourrait être  un nouveau moteur pour notre économie, en remplaçant le secteur automobile dont tous s’accordent à demander la réduction, en usage et donc en production.

 Nous voulons transmettre par cette note quelques éléments nécessaires à ces universitaires de l’été et de l’automne, s’appuyant sur les diagnostics, des travaux ou les promesses de ce printemps, et sur les premiers actes du quinquennat de François Hollande pour qui le logement doit être un appui à la fois technique, économique, écologique, et social dans sa volonté de changement.

 Social d’abord : la Fondation Abbé Pierre produit chaque année un rapport reconnu par tous, et a mobilisé des Etats Généraux du Logement en 2010 et 2011avec de nombreux professionnels : il propose d’attaquer la crise en parlant désormais d’un logement pour tous, remplaçant le « tous propriétaires » qui a été un slogan populiste sans effet. L’objectif fixé est de produire 800 000 logements supplémentaires, mais des logements accessibles.

La masse de 500 000 logements par an retenu par beaucoup n’est pas un objectif social, mais une simple orientation pour assurer la croissance de notre économie.

Pour cela, il faudra attendre que les fondamentaux techniques pour atteindre ce dernier objectif soient mis en place : - foncier – financiers – techniques, dans un ordre qui permette de crever la bulle sans dégâts sociaux. C’est sur ces fondamentaux que les « universitaires » de l’été doivent se pencher.

 La concurrence pour l’usage des terrains à bâtir est à la base de l’augmentation des coûts du logement et toutes les études sont faites : la France a de la place (Conseil Economique et Social, 2003, rapport Repentin), il faut travailler sur les règlementations d’urbanisme jusqu’à ce qu’un foncier surabondant permette au logement d’avoir sa première matière première. Lorsque les spéculateurs, la rétention foncière, la priorité aux logements de haut de gamme laisseront la place aux logements à prix modérés, on pourra retrouver l’adéquation entre les revenus de nos concitoyens et les attributions pour chacun : le tunnel de Friggit a démontré que cet objectif doit être atteint pour que l’Economie du secteur logement redevienne fluide. Voir cette étude très démonstrative.

 Coté financier, il faut que les universitaires de l’été comprennent mieux qui finance le logement social : dans un montage d’opération HLM, ce sont les locataires qui vont payer, ce n’est pas l’Etat, et c’est tant mieux puisqu’il n’a pas d’argent. Pour preuve, voir la délibération 2010-1950 du Grand Lyon qui a délégation des aides à la pierre : il est clair que l’Etat et les collectivités territoriales réunis financent moins de 10 000 €uros par logement social bâti, alors que le prix moyen en est de 135 000. Soit de l’ordre des 7% de TVA liée à la  construction ( !).

Le reste du financement vient des locataires :

-        ce sont eux qui rembourseront les emprunts nécessaires, obtenus via le livret A : avec le doublement du plafond décidée par le gouvernement, la source est suffisant pour approvisionner la filière dans cette deuxième matière première.

-        Au préalable, les locataires passés qui ont payé plus de loyers que ne l’exigeaient les équilibres de gestion ( fin des emprunts, inflation…) ont permis aux organismes d’engranger des marges, devenues fonds propres, et complétant le bilan des opérations nouvelles..

 A ce niveau, c’est donc une réflexion sur la gouvernance des organismes HLM qui doit être mise au débat : qui dirige, qui décide, quel est la place de la démocratie dans les décisions locales ? Est-il utile de vendre des HLM pour trouver des fonds nouveaux ? Le caractère d’Economie Sociale et Solidaire des ESH ou des offices dont les statuts le prévoient, permettrait une nouvelle manière de concevoir le logement social, et la présence du « 1%logement » dans cette affaire est d’importance : nos amis syndicalistes « de gauche » ont une responsabilité dans la gouvernance d’Action Logement, qui lui-même maitrise les HLM. La réflexion doit être « à gauche », en lien avec le monde associatif , et le monde peu reconnu des habitants et de leurs représentants en particulier.

Il faut  donc mettre au débat le 1% logement et l’emploi des fonds collectés depuis 50 ans : faut-il laisser l’Etat décider de se retirer de ses maigres aides à la pierre au motif qu’il y en a dans les caisses d’Action Logement ? Faut-il laisser tous les maires, de droite ou de gauche appuyer une Rénovation Urbaine qui absorbe tant d’argent par ses démolitions-reconstructions alors que ce serons les futurs locataires qui payeront la ville ? Bien des sujets sur lesquels on doit avoir, de tous les organismes cités en préambule, des réponses claires.

Coté technique enfin, et là il y a urgence à une réflexion de planning et d’échéance. Dans un communiqué du 6 juillet, notre ministre a donné des chiffres qui montrent le danger de la situation qui lui est léguée : «  En 2011, 420 000 logements ont été construits, un chiffre qui devrait se situer entre 300 et 330 000 d’ici à la fin de cette année ». Et elle rappelle l’ambition d’aboutir à 500 000 par an avec 150 000 logements accessibles. Ce en rappelant le désengagement des aides inouïes données aux investisseurs privés, ce qui va cesser, et heureusement ( Borlo,Scellier..), car sans contre partie sociale

 Il faut donc le temps d’absorber la réduction de 420 à 330 000 sans pénaliser les emplois dans le bâtiment, et en prévoyant, quand les fondamentaux auront été maitrisés, de reprendre l’allure. Un logement par an, c’est un emploi dit-on.

Il y a donc 90 000 emplois en jeu, 30 fois Aulnay et ses voitures, mais dans un monde de PME du bâtiment qui est syndicalement moins mobilisable, mais tout aussi vulnérable.

 Il faut donc d’urgence prendre les mesures nécessaires pour sauvegarder des milliers d’emplois: reprendre en logements publics les programmes arrêtés par la promotion privée, faute de débouchés si des investisseurs privés font défaut.

Une telle mesure a été très mal appliquée en 2007, pour sauver des promoteurs de la faillite, et à des prix inadmissibles, mais le principe est bon et les modalités sont à établir d’urgence. Il faut 5 à 10 ans pour monter un programme de construction, il doit bien y en avoir dans les cartons des promoteurs qui ne sortiront pas de terre cette année ni l’année prochaine, et que les entreprises ne pourront pas réaliser, licenciant leur personnel dont on aura pourtant besoin plus tard pour la relance.

Il urge de récupérer en logements sociaux 100 000 logements prévus en privé, puisque là les besoins et les financements existent.

Cela nécessite des négociations rapides et difficiles, mais indispensables : l’opinion publique doit être prise à témoin, et rien ne vaut les dix lieux « de gauche » que nous convoquions dans notre préambule pour avancer de telles propositions à nos gouvernants.

 Paul Latreille             paullatreille@wanadoo.fr

Pour un groupe « Transport Environnement Logement » d’une section PS du péri-urbain au Nord Ouest de Lyon.

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