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Billet de blog 26 mai 2015

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"Se loger en France",actualité

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Transcrire pour le grand public les études les plus pointues sur les sujets d'intérêt généal. relève d'un grand art que les médias ont parfois du mal à maitriser. Il en fut ainsi ce lundi 4 mai lorsque France 2 a bien voulu rendre compte d'un rapport sur le thème récurrent de la "crise du logement" : L'IGAS,  la MIILOS, et le CGEDD ont publié en 2014 un rapport dont "les Echos" du lundi 29 janvier dernier montrait déjà le caractère "explosif et sans concessions" [le lecteur m'excusera de ne pas détailler les sigles pour ne pas charger le propos, je cite ici les plus hautes autorités de contrôle de la vie économique et sociale du pays]. Ce lundi 4 mai le rapport fut donc présenté au 20 heures, en insistant sur le gisement d'économies possibles sur les budgets publics : un rabotage sur 17 milliards d'€ valait d'attirer l'œil d'un grand public qui n'est pas forcé de connaitre la loi de Raymond Barre de 1975 créant les APL pour réduire les dépenses d' aides à la pierre au profit d'une aide à la personne. Le téléspectateur ne pouvait qu'applaudir à la découverte de ce gisement. Sauf s'il touchait  lui-même la dite APL. Mais le présentateur n'avertissait guère des enjeux d'une telle mesure sur l'Economie en général, et celle du secteur de la  construction et du logement en particulier.

Sous le titre "Se Loger en France", l'ACMIL vient de  publier un ouvrage qui tranche sur cette idée largement répandue que le logement est avant tout une "dépense" de l'Etat, qu'il serait souhaitable de réduire si c'est par les dépenses qu'on veut agir pour réduire les déséquilibres. Les auteurs de ce document ont la particularité d'avoir été ou d'être des acteurs de terrain. Bernard Gérardin, qui a pris l'initiative de l'ouvrage, a œuvré dans le secteur immobilier de la Caisse des Dépôts, ainsi que dans le conseil en gestion aux organismes du logement social, et a codirigé en Ile de France un des plus gros offices HLM de France. Sylvain Leplâtre a dirigé deux offices HLM et été le directeur clientèle d'une importante S.A. HLM à compétence nationale. L'éditeur ACMIL- Association de Coordination des Moyens d'Intervention pour le Logement- a souhaité compléter l'étude nationale par 3 monographies régionales qui ont été réalisées par Pascale Da Costa, étudiante en master 2 après un début de carrière dans la gestion de copropriétés.

Les auteurs passent en revue passent en revue les nombreux effets de la  construction sociale, où la demande reste énorme et l'offre possible, car, et c'est l'essentiel de la démonstration : quel est l'impact sur l'Economie et notamment sur les finances publiques d'un accroissement de la production de logements cohérent avec les besoins ?

La réponse, en simplifiant pour le 20 heures pourrait tenir en peu de mots : 100 000 logements supplémentaires par an généreraient 283 000 emplois à temps plein, avec un impact sur le PIB de 10.4 milliards d'€, les auteurssoulignant en particulier que l'activité du secteur du logement  ( financé par l'épargne populaire du livret A et remboursé par les loyers)  n'aggrave pas la dette des collectivités publiques, contribue même à la diminuer pour des montants très significatifs, puisque les sommes en trésorerie, toujours supérieures aux aides effectives elles-mêmes, dépassent en moyenne 30 milliards par an sur la période 2008 – 2010".

Ces quelques données montrent l'intérêt de cet ouvrage qui, il faut l'espérer, sera diffusé auprès des décideurs de la vie économique et financière car il y va de l'équilibre de notre France : le logement, moteur de l'Economie ce n'est pas de l'utopie, les 110 pages de cet ouvrage et les 150 pages d'annexes très techniques sont des tableaux et graphiques particulièrement démonstratifs, relevant les avis d'experts aussi connus que Michel Mouillart ou Jacques Frigitt, en apportant des réflexions qui vont de l'éthique pure à de la technique assumée. Le logement, besoin sociétal majeur, peut devenir la base d'un développement attendu, si les politiques le décident. La formule populaire : "Quand le bâtiment va tout" illustre ces idées que nous relevons ici.

 Mais que peut faire un homme politique au pouvoir qui reçoit simultanément ces deux premiers rapports, l'un parlant rabotage, l'autre dynamique de production ? Sans parler des très nombreux autres, * rapport de la Fondation Abbé Pierre qui a su imposer le chiffre d'une offre manquante de 800 000 logements accessibles [ l'INSEE n'a pas dit non, l'ACMIL va pousser au million], *rapport ce mardi 12 maid'un "Observatoire des territoires" publié par le ministère du Logement et qui expose que les entreprises du bâtiment devront construire entre 300 000 et 400 000 logements chaque année d’ici 2030 pour répondre à la demande à venir, * rapport plus politique du Think Tank Terra Nova qui critique ses propres amis au pouvoir et ses "mesurettes" pour proposer 3 mesures ...

 La parution quasi permanente de tant de documents permets d'expliquer la difficulté des médias qui ne sont ni des professionnels du bâtiment et de la construction, ni des financiers, ni des humanistes et qui devront, avant de diffuser des avis sur ces sujets, retenir de la complexité des données quelques points forts : cela fera l'objet d'une deuxième papier de ma part, n'engageant que moi.

Avec ces différents rapports et en particulier l'ouvrage de l'ACMIL, la démonstration est désormais largement faite qu'une sortie de crise est possible, souhaitable pour nos concitoyens, nécessaire pour notre économie qui n'a pas besoin d'aller chercher à l'export le marché utile pour faire tourner nos entreprises et sauver ses emplois, et qu'il est également inutile de parler d'investissements nouveaux dans les entreprises qui sont prêtes : elles ont fait 400 000 logements par an récemment, conservons leur leur activité par des actions rapides sur les blocages actuels, l'outil de production n'est pas tant à moderniser qu'à utiliser tout de suite et à  sauvegarder.

Un artisan du bâtiment en passe de fermer faute de travail écrivait la semaine dernière au président de la République pour le dire dans une lettre ouverte qu'a publié le Moniteur du 12 Mai : "Si faire de la politique, c’est agir, alors je veux bien participer au redressement de notre économie, mais avec des gens de terrain et sur les vrais sujets qui concernent le monde de l’entreprise". France Inter en a parlé dans sa matinale de ce lundi 18 mai, si cela intéresse le grand public j'en suis ravi.

Les conseillers de notre président, ou les prétendants à sa succession sauront-ils comprendre les messages et donner suite par des décisions d'actions concrètes ?

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