Dans le dernier épisode d’On se pause et on cause, je voulais parler de la police nationale en tant qu'institution. La question qui traverse tout l’épisode est assez simple: qui protège la police & qui nous protège de la police?
Tout d'abord, pour poser le cadre, il m’a semblé indispensable de revenir sur la notion de violence. Comme l’explique le politologue Xavier Crettiez, la violence est multiple, subjective et accusatoire. Elle n’existe que parce qu’elle est nommée comme telle et résulte toujours d’une lutte de définition - et donc de pouvoir - entre des acteur·ices aux intérêts et aux ressources inégales. Cette approche permet de distinguer les violences physiques des violences symboliques. Ces dernières regroupent l’ensemble des mécanismes de surveillance, de contrôle des corps, progressivement légitimés par les discours politiques, scientifiques et médiatiques.
Ensuite, je reviens ensuite sur un concept omniprésent dans les discours publics, celui de "violence légitime". Théorisé par Max Weber, ce concept ne décrit pas ce qui devrait être mais ce qui est. Il ne s’agit pas d’une justification morale mais bien d’un constat socio-historique. Néanmoins, cette notion est aujourd’hui constamment déformée par le système politico-médiatique qui en fait un argument d’autorité permettant de justifier les violences policières.
L’épisode retrace aussi la genèse de la police nationale française. Créée en 1941 sous le régime de Vichy, elle vise alors à placer sous une autorité centralisée l’ensemble des forces de police des villes de plus de 10 000 habitant·es. Cette centralisation marque la construction d’un modèle de police pensé avant tout comme un outil de protection de l’État. Il ne s’agit donc pas de dire que la police serait vichyste par essence mais plutôt de comprendre que son fonctionnement reste largement imprégné d’un héritage autoritaire.
Je rappelle également qu'entre 2020 et 2022, la France a enregistré 107 décès liés aux interventions des forces de l’ordre - 50 en 2023 & 52 en 2024. La France est ainsi le pays européen où l’on meurt le plus à la suite d’interventions policières. Malgré les discours officiels qui présentent ces violences comme des exceptions, il est essentiel de les qualifier pour ce qu’elles sont, des violences systémiques. Le sociologue Mathieu Rigouste parle même de "permis de tuer", en pointant un système d’impunité structurelle qui permet aux policier·ères de mutiler ou de tuer sans être réellement inquiété·es. Pour le dire autrement, les violences policières relèvent d’illégalités d’État rendues possibles par un ensemble de dispositifs légaux, administratifs, policiers et judiciaires qui assurent leur reproduction. Se focaliser uniquement sur les violences physiques les plus visibles, c’est invisibiliser tout un continuum de pratiques.
Enfin, l’épisode montre pourquoi la police pourrait être analysée comme une institution structurellement liée à l’extrême droite, raciste, héritière de logiques coloniales, classiste, anti-jeunes et sexiste. Ces dimensions sont constitutives de son histoire, de ses pratiques et de ses imaginaires.
Finalement, il crucial de ne pas se laisser intimider par les discours politico-médiatiques dominants. Dénoncer les violences policières et le racisme structurel de l’institution est une nécessité politique. Construire des analyses rigoureuses, des critiques argumentées et des alternatives crédibles est indispensable face à un système qui nie, dissimule et justifie la violence.
Et si vous voulez aller plus loin, découvrir les ressources citées ou simplement écouter l’épisode, c’est par ici: https://linktr.ee/onsepauseetoncause
Bonne écoute et merci <3 Pauline