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Billet de blog 27 novembre 2012

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FILLON/COPE : un mariage contre nature, ou le combat entre éthique et conformité

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L’éthique professionnelle est l’application contextuelle des vertus au monde des affaires, mais elle prend aussi tout son sens dans la vie politique.

En adoptant ce référentiel, c’est-à-dire en chaussant des lunettes éthiques, voilà comment nous pouvons décrypter l’opposition entre les ex-candidats à la présidence de l’UMP, François Fillon et Jean-François Copé.

A propos de la vertu de justice, nous observons que l’un se retranche derrière les statuts (dont beaucoup s’accordent à dire qu’ils nécessiteraient au mieux un dépoussiérage, n’étant plus adaptés à un parti qui veut se démocratiser). Qui parle de statuts, énonce la force du Droit, donc se range à la conformité. Pourquoi JF. Copé s’abrite t-il derrière les statuts ? Parce qu’ils servent à justifier sa légitimité. De fait, il privilégie l’excès de cette vertu. Or, toute vertu cesse d’en être une dès qu’elle devient mécanique. La justice excessive s’apparente à de la rigidité. Cette intolérance appelle des comportements de coup de force et engendre des qualificatifs appropriés (cf. « Bokassa »). F. Fillon en évoquant la « fracture morale », puis en faisant appel à un sage en vue d’une médiation, indique qu’il place la volonté des parties au-dessus des textes et semble mettre en avant les vertus d’intégrité et de sincérité. La sémantique est intéressante : tout comme l’on exprime dans les entreprises la sincérité des comptes, ici, il est question de vote sincère.

Ceci nous amène à nous pencher sur la vertu de l’honnêteté. Lorsque JF. Copé mentionne « à peine 1% » de triches, cela représente plus de 1600 voix ! Ce qui frappe alors est la contradiction : JF. Copé se targue d’être passé à … 98 voix près ! Cela pèse lourd mais surtout en termes de confiance. Car si l’excès de l’honnêteté est le scrupule, c’est la fourberie qui en singularise le défaut. F. Fillon a mis en doute cette vertu tout au long de ce débat fratricide. « Je livre une bataille pour les principes », dit-il, en insistant sur le « discrédit », lié à cette élection.

Autres vertus à prendre en compte : le respect et la solidarité. Le respect est une attitude de considération, souvent codifiée, envers une personne, une chose ou une idée. L’un insiste sur le respect des résultats du vote du 18 novembre et le second sur le respect des militants de l’UMP, auxquels le parti appartient. Cette différence de position a le mérite d’illustrer le dilemme auquel tout le monde est confronté à un moment ou un autre : dois-je me respecter, ou respecter les textes ?

Par nature, le combat politique est une aventure d’hommes et de femmes, donc normalement individualistes. Le clivage entre F. Fillon et JF. Copé est tel que la solidarité n’existe même plus de façade.

Autre vertu malmenée par les adversaires, la tempérance. Ici, match archi-nul : évoquer les pratiques maffieuses de l’un et le manque de moralité personnelle de l’autre, procèdent d’une absence évidente de tempérance. Le recours à la médiation d’Alain Juppé visait sans doute à rétablir le climat. Quant à se retourner vers le précédent président de l’UMP, ce n’est pas le sujet : c'est d'éthique et de sa contagion espérée dont nous tentons de parler!

Le feuilleton que jouent les candidats est révélateur de l’opposition entre éthique et conformité : autrement dit, faut-il adopter un comportement en accord avec les vertus que l’on possède et que l’on peut appliquer en fonction des circonstances, ou peut-on se contenter de rester conforme aux textes et règlements qui régissent le contexte donné ?

Ethique ou conformité : les positions respectives de F. Fillon et de JF. Copé sont donc respectables, chacune dans son référentiel.

Sans vouloir inférer une quelconque préférence dans la lutte entre les deux hommes, il serait salutaire que l’éthique triomphe…

Isabelle Deflandre et Pierre Boningre (ID&ethics)

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