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Billet de blog 10 mai 2011

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«François Mitterrand, pourquoi a t-on envie de devenir Président de la République?»

Cette question fut posée à Mitterrand candidat, au début d'un entretien en sept questions publié dans la Revue socialiste n°52 de février-mars 1981.

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Cette question fut posée à Mitterrand candidat, au début d'un entretien en sept questions publié dans la Revue socialiste n°52 de février-mars 1981.

"Que chaque citoyen se sente prince en son royaume".

FM - Ai-je bien saisi la portée de votre question? Selon vous, la gravité croissante des responsabilités du Président de la République découragerait les postulants à la candidature. Ou dissiperait leur désir d'en assumer la charge. Les faits ne paraissent guère vous donner raison : les candidatures se multiplient, nullement rebutées par l'ampleur éventuelle de la tâche! A ces candidats de décider, en leur "âme et conscience", si leur "envie", comme vous dites, est à la mesure de la mission à accomplir. Pour un socialiste, l'interrogation est tout autre. En premier lieu, sa vie, son combat, son oeuvre ne se décident pas au seul gré des échéances électorales. Certes, les succès antérieurs, et demain peut-être la victoire, ne le laissent pas indifférent. Qui nierait notamment l'importance de l'élection à la Présidence de la République? Elle n'est pourtant ni le commencement ni la fn de tout. Aussi bien un candidat socialiste à la présidence doit-il conduire sa campagne avec sérénité et tranquillité, mû par l'ambition de faire gagner ses idées plus encore que sa personne. Ce qui ne doit rien lui enlever de la pugnacité nécessaire. A la différence des partis de l'argent, le candidat socialiste n'est pas solitaire en son combat. Son "envie", c'est d'abord l'envie de centaines de milliers de militants et de milliers de citoyens : l'envie de faire enfin respirer à pleins poumons un pays qui étouffe sous le poids des privilèges de la caste eu pouvoir. La force et la volonté du candidat socialiste sont nourries par l'élan des forces les plus créatives et les plus ardentes et par la vaillance de son parti : le seul grand parti démocratique français. Au demeurant, si demain il est porté à la Présidence par l'allégresse et l'enthousiasme des Français, il ne se retrouvera pas seul maître à bord accaparant jalousement toutes les fonctions de l'Etat. Vous le savez, mon projet est de rééquilibrer le partage des tâches entre les organes du pouvoir. A chacun son rôle : au Président de définir les orientations principales ; au gouvernement de gouverner avec efficacité ; au Parlement de légiférer librement ; aux collectivités territoriales de s'autoadministrer. Le désordre s'est installé dans l'Etat par l'intervention permanente du Président dans le fonctionnement quotidien de l'administration ; se mêlant de tout, il oublie l'essentiel. Votre question se réfère à ce que vous appelez "la lourdeur" de la charge de Président de la République : oui, ainsi conçue par le président sortant, la charge est aujourd'hui si lourde qu'elle tombe des mains fragiles de son dépositaire. A vouloir tout régenter, on ne gouverne rien! Au pied du trône roule la couronne : les privilégiés s'en emparent pour légitimer leur toute-puissance. Faute d'un gouvernement solide, ce sont eux qui gouvernent, ce sont eux les vrais maîtres. Ils organisent la crise, le chômage, l'inflation. Avec la bénédiction d'un président qui n'en peut mais.

Source : La Revue Socialiste n°42 - 2ème trimestre 2011

10 Mai 1981 - 10 Mai 2011 - Héritages et espérances

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