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Billet de blog 20 avril 2020

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Synthèse inspirée de l’article de DSK « l’être, l’avoir, le pouvoir dans la crise »

«Au lendemain de la crise, les questions politiques sont donc nombreuses. Quels régimes seront perçus comme ayant bien géré la crise ? Quelle transition pour revenir des mesures d’exception à la vie normale ? S’ils n’ont pas réussi à agir ensemble pendant la crise sanitaire, quelle crédibilité auront les régimes démocratiques pour gérer d’autres crises comme le climat ou la question migratoire?

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« L’économie libérale, une phase de désorganisation entre deux périodes plus régulées »

Durant des récessions classiques, tels que nous les avons connues auparavant, la gestion la plus sage des actifs financiers consistait à attendre le retour à la normale. Cependant, avec la crise que nous allons connaitre, beaucoup de structures de production sur lesquelles s’appuyaient ces actifs financiers pour vivre/fructifier vont s’effondrer, bien plus que lors des précédentes récessions.

La première conséquence est la chute de l’emploi, 10 millions de chômeurs aux USA et 900 000 en Espagne en quelques jours, dû à une prévision justifiée du choc sur la demande (impact principale du confinement). Cette dernière, si elle n’est pas protégée dans le cadre de mesure budgétaire, risque de s’insérer dans un cercle vicieux : confinement => baisse de la demande => chômage => baisse du pouvoir d’achat => baisse de la demande aggravée =>chômage aggravé.

Dans nos pays développés, si certaines actions sont rapidement mises en place, nous pourrons encore limiter les dommages. Mais pour certains pays en développement qui dépendent complétement du tourisme, ou de l’importation de matières premières, l’aide internationale va être primordiale pour éviter le pire.

Les solutions

Les solutions mises en place actuellement sont majoritairement des solutions monétaires proposées par les banques centrales. L’objectif est d’inonder de liquidités les marchés afin de créer une parenthèse économique au vide d’activité qu’a provoqué la crise sanitaire.

Rechercher des solutions monétaires qui, couplés à une action budgétaire (soutien de la demande principalement), pourrait limiter la perte massive d’emploi et donc bloquer le cercle vicieux que la crise sanitaire fait planer sur nous. L’enjeu véritable est de créer une parenthèse assez solide et bien conçue pour qu’elle résiste au mieux,  le temps de se préparer à son éclatement et à la crise économique qu’elle engendrera.

Pour le moment, ce sont des solutions assez classiques qui sont proposées (très unilatérales) mais qui révèlent le manque de confiance qu’ont les états à se rapprocher, et de trouver ensemble une solution multilatérale pour contrer une crise globale. Sur une échelle plus petite, au sein même de l’UE, cette crise a été un choc soulignant le manque de cohésion et de confiance qui règne finalement au sein de l’Union.

Le simple fait que, les préparations face à la crise qui semblait poindre et les actions prises pour la contrer, soient aussi disparates, souligne que l’objectif de l’Union d’avoir une organisation forte est encore loin d’être une réalité 

Elle doit, désormais, se décider sur le choix monétaire à faire et ses conséquences :

Deux voies sont envisageables :

« La première serait une demande explicite des États de monétiser le surplus de dettes […]. La seconde est d’avancer avec ceux qui le veulent pour émettre conjointement de la dette nouvelle, afin de financer à la fois les coûts de la réponse sanitaire immédiate, de la solidarité internationale qui sera nécessaire notamment envers l’Afrique et enfin, un plan de relance massif une fois l’urgence sanitaire passée. Le choix s’énonce donc simplement, il faut rompre l’un ou l’autre de ces deux tabous : l’indépendance de la banque centrale ou l’unanimité des États membres. »

Bien que ce dilemme s’énonce simplement, il n’aura pas de réponse avant un temps.

Et c’est bien le problème majeur qui est sous-jacent à cette crise et de manière générale, à toutes les crises : l’Union et certains de ses membres ne sont pas capables d’être réactif pour le bien de ses citoyens. Pire, cette crise a révélé plus largement que les modèles démocratiques basés sur la démocratie représentative souffraient d’un mal lancinant :

« On élit des représentants dont on pense qu’ils sauront mettre en œuvre la politique à laquelle on aspire et on leur fait confiance. Mais ce consentement, comme cette confiance, sont de plus en plus battus en brèche, l’air du temps étant moins à l’intérêt général qu’à l’accumulation des intérêts particuliers »

En cause, le décalage de communication qui s’agrandit entre ces représentants et leurs électeurs. Qui est d’ailleurs  d’autant plus flagrant dans cette crise, qu’elle s’oppose à celle des régimes « moins représentatifs » pour ne pas dire autocratique.

Des pays non démocratiques dont la légitimité du pouvoir a été auto-conférée par la capacité des dirigeants à protéger la population,  et à maintenir l’ordre social plus qu’à garantir des libertés. Leurs réponses fortes et rapides à la crise, sur la base d’outil de contrôle inclus depuis longtemps dans leurs politiques, a renvoyé un certain sentiment de soutient et d’unité nationale au sein de la population.

« En d’autres termes, non seulement la sortie de crise pourrait marquer un affaiblissement de la légitimité des autorités publiques dans les démocraties, mais en même temps, un raffermissement du pouvoir dans les autocraties. »

Pour conclure, nous voyons qu’au sein d’une économie libérale organisée autour de structures mondialisées, face à une crise, tous se replient sur eux. Les pays qui ont le mieux réagis sont ceux, qui privilégient une économie moins libérale et une démocratie moins représentative. Ces pays relayés géopolitiquement face à l’omniprésence américaine placent d’ores et déjà leurs pions sur l’échiquier géopolitique.

DSK souligne dans son article principalement, à quel point cette crise est unique en son genre, par son action mondiale qui touchent tous les secteurs économiques. Ce qui va entrainer des chocs en répercussion sur la demande et sur l’offre si des actions budgétaires et monétaires ne sont pas prises rapidement.

De plus, elle va être très difficile pour les pays en développement très dépendants  du tourisme, de l’export de matières premières ou même du maintien de la sécurité que leur prodiguaient les pays développés.

Enfin,  elle nous a montré que,  dans une économie qui se disait globale, organisée par des conseils mondiaux, cette crise a fait éclater  l’illusion multilatérale, et de façon encore plus dure pour les européens.

« À l’inverse, […] dans la plupart des régimes non-démocratiques, les autorités ont imposé une réponse forte et rapide à la crise et on voit en retour un certain sentiment de soutien et d’unité nationale au sein de la population (Chine, Vietnam, Jordanie, etc). En d’autres termes, non seulement la sortie de crise pourrait marquer un affaiblissement de la légitimité des autorités publiques dans les démocraties, mais en même temps un raffermissement du pouvoir dans les autocraties. »

D’ailleurs en Europe, certains du vieux continent pourraient être tentés de suivre leurs voies en s’appuyant sur la crise migratoire qui découlera si les pays les plus pauvres d’Afrique et du Moyen-Orient ne sont pas soutenus après la crise ; le risque pour la démocratie est réel.

L’Europe peut aussi y voir le moyen de s’unifier véritablement, s’appuyer sur les effets de cette crise pour se libérer de l’omniprésence de l’économie de marché et d’enfin trouver une alternative.

Mais cela ne se fera pas sans une renonciation à une certaine souveraineté nationale dont les pays fondateurs de l’Europe sont paradoxalement les plus attachés.

Ecrit par Arthur Aubin

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