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Billet de blog 20 septembre 2025

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Acte I : La promesse du Louvre

Mai 2017. Nuit étoilée sur la pyramide du Louvre. Emmanuel Macron, sourire d’écolier sage, promet au peuple français qu’il sera le président de tous. Mieux encore : il jure de tendre la main aux électeurs de Marine Le Pen, ces oubliés de la République. “Je ferai tout, tout, pour qu’ils n’aient plus aucune raison de voter pour les extrêmes.” Les violons de l’Europe, les applaudissements, l’image historique du plus jeune président de la Ve République.

Sept ans plus tard, l’image a tourné au cauchemar. Ceux qu’il a entendus, cajolés, servis, ce ne sont pas les déclassés de Creil, ni les caissières de Cavaillon, ni les intérimaires de Saint-Étienne. Non. Ce sont les héritiers de Neuilly, les actionnaires du CAC 40, les milliardaires qui possèdent journaux, châteaux et yachts.

Acte II : Le grand partage du gâteau

Avant Macron, il restait au moins une arme fiscale pour équilibrer un peu les choses : l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF). Certes imparfait, certes limité, mais il existait. Il frappait à 1,5 % maximum le patrimoine des plus riches. Et pas seulement leurs villas ou leurs châteaux : aussi leurs actions, leurs placements financiers, bref l’essentiel de leur trésor.

Avec Macron, rideau. En 2018, l’ISF est vidé de sa substance. Rebadgé “IFI”, il ne taxe plus que l’immobilier. Or, détail qui tue : pour les 0,1 % les plus riches, 80 % du patrimoine est justement constitué… de placements financiers. Autrement dit : là où est le magot, l’impôt disparaît.

Résultat : un cadeau de 4 milliards d’euros par an aux ultrariches. Pour l’État, une perte sèche. Pour le peuple, une gifle.

Acte III : La flat tax, jackpot pour les milliardaires

Mais le meilleur reste à venir. Macron ne se contente pas d’alléger l’impôt sur le patrimoine. Il sabre aussi la fiscalité sur les revenus du capital. Avant, dividendes et plus-values pouvaient grimper jusqu’à 45 %. Désormais, un taux magique : 12,8 %. Un coup de baguette libérale appelé “flat tax”.

Dans les médias, on communique sur “30 %” pour endormir l’opinion. Un chiffre trompe-l’œil, où l’on additionne des prélèvements sociaux pour brouiller les cartes. Mais la vérité nue, c’est ce 12,8 %, soit trois à quatre fois moins que ce que paye un salarié imposé à la tranche haute.

Conséquence : chaque année, un cadeau de 3,6 milliards supplémentaires aux grandes fortunes. Ajoutés aux 4 milliards perdus de l’ISF, cela fait près de 8 milliards par an qui passent directement de la poche publique à la poche privée.

Acte IV : Les milliardaires aux anges

Pas étonnant que les propriétaires de médias — Xavier Niel (Le Monde), Patrick Drahi (BFMTV, Libération), Bernard Arnault (Les Échos, Le Parisien) — se frottent les mains. Sophie des Déserts raconte dans Vanity Fair ce SMS hallucinant : au lendemain de la flat tax, Xavier Niel envoie à Macron un simple smiley rayonnant. Message clair : “Tu as fait le job, merci pour le cadeau.”

Ces milliardaires qui tiennent micros et unes applaudissent des deux mains. Le peuple croit encore que Macron réforme pour “l’investissement” ou “l’innovation”. En réalité, il bétonne les privilèges de ses amis.

Acte V : Le peuple matraqué

Pendant ce temps, les classes populaires se font lessiver.

2018 : nouvelle taxe sur le diesel. Prétexte officiel : l’écologie. Raison cachée, révélée par des mails internes de l’Élysée : financer les baisses de cotisations patronales. Traduction : faire payer aux automobilistes modestes les cadeaux faits aux entreprises.

Résultat ? Une facture de 75 milliards d’euros par an pour le contribuable.

Acte VI : L’explosion des Gilets jaunes

Novembre 2018. Le peuple explose. Les ronds-points s’embrasent, les gilets jaunes envahissent les Champs-Élysées, l’Arc de Triomphe est pris d’assaut. La République tremble. Le 1er décembre, des conseillers de l’Élysée parlent d’exfiltrer le président en hélicoptère. Oui, un hélicoptère prêt à décoller depuis le jardin présidentiel, comme si Macron n’était plus le maître de la situation mais un monarque assiégé.

Réponse du pouvoir : 40 000 policiers et gendarmes, blindés dans les rues, grenades mutilantes, LBD. Macron n’écoute pas la colère, il la réprime.

Acte VII : Les milliardaires au secours du prince

Mais le plus cynique survient après. Pour calmer la tempête, Macron ne revient pas sur ses réformes pro-riches. Non : il demande à ses amis milliardaires de mettre la main à la poche. Arnault, Drahi, Niel annoncent en urgence une “prime exceptionnelle de 1000 €” pour leurs salariés. Pas par bonté d’âme. Mais pour protéger le président qui les protège.

Cercle vicieux : les riches soutiennent Macron car Macron soutient les riches. Le peuple, lui, reste coincé dehors, frappé, méprisé, humilié.

Acte VIII : 40 ans de néolibéralisme concentrés en une figure

Ne nous trompons pas. Macron n’a rien inventé. Depuis les années 1980, avec la conversion de la gauche mitterrandienne au tournant de la “rigueur”, le néolibéralisme a avancé en France comme ailleurs :

privatisations à la chaîne,

cadeaux fiscaux aux entreprises,

austérité pour les services publics,

chômage comme variable d’ajustement,

financiarisation de l’économie.

Mais Macron est l’aboutissement parfait de ce processus. Il n’a pas seulement géré la machine : il l’a turbo-boostée.

Acte IX : Le résultat du grand festin

Aujourd’hui, le constat est implacable :

Les 500 plus grandes fortunes de France pèsent désormais 45 % du PIB.

Le patrimoine des ultrariches a été multiplié par 6 en 15 ans.

Les classes populaires, elles, stagnent ou reculent.

L’État se prive de dizaines de milliards qui manquent cruellement à l’hôpital, à l’école, aux retraites.

Et malgré ce saccage, on continue de nous vendre la fable du “ruissellement”. Mais ce qui ruisselle, ce sont nos larmes.

Conclusion : l’heure du contre-feu

Le néolibéralisme n’est pas une fatalité, c’est une idéologie. Et une idéologie peut être combattue. Depuis 40 ans, les riches ont accaparé le gâteau et nous ont laissé les miettes. À force, même ces miettes disparaissent.

La France n’a jamais été aussi riche collectivement. Mais cette richesse est confisquée, concentrée, verrouillée. Les Gilets jaunes l’ont rappelé dans la rue : le peuple n’accepte plus de mourir en silence pendant que quelques-uns trinquent au champagne.

La question est simple : allons-nous continuer à nous contenter des miettes ? Ou allons-nous renverser la table ?

Illustration 2

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