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Billet de blog 22 mars 2025

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Loi d’Orientation Agricole 2025: une arnaque qui en préfigure d’autres

La nouvelle loi d’orientation agricole a été définitivement votée le 20 février dernier, macronistes, droites, LIOT et extrême droite unis contre l’ensemble des élus de gauche et écologistes. Si elle a été en partie censurée par le Conseil Constitutionnel, son architecture rétrograde reste en place.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cette LOA a beaucoup changé d'objet depuis 1 an et demi qu'elle était en disucssion. L'objectif initial était de répondre au défi démographique (1 agriculteur sur 2 partira en retraite dans les 5 ans). Après les manifestations de début 2024, il fallait "éteindre l'incendie revendicatif" avant le Salon de l’Agriculture qui s’ouvrait à Paris le 22 février dernier. Et, en effet, le Salon s’est passé sans (trop d’) encombre pour les politiques qui y ont fait leur tournée rituelle. Mission accomplie ?

On en reste très loin vu tous les enjeux non traités. Cette loi devait répondre à des défis considérables : outre la démographie, l'enjeu des revenus (très inégaux et souvent insuffisants), de la transition agro-écologique et de la réponse aux menaces géopolitiques suite à l'invasion de l'Ukraine par le pouvoir poutinien.

De l'objectif central initial, il reste juste un guichet unique pour l’installation dans chaque département et un objectif de 400 000 fermes en 2035 (autant qu’en 2020) sans moyens pour y parvenir, alors qu’on en a perdu 100 000 depuis 10 ans. Et surtout, cette LOA marque des reculs marqués sur l’environnement.

Même s’il n’est pas forcément inutile de simplifier l’application concrète de réglementations qui s’empilent, là on jette carrément le bébé avec l’eau du bain. Le terme même d’ « agro-écologie » est banni du texte. C’est pour Dominique Pottier, député PS et ancien agriculteur, un « moment trumpiste ». Pour Aurélie Trouvé, présidente LFI de la Commission des Affaires économiques de l’Assemblée (ex Professeure à l’Agro et porte-parole d’ATTAC), « c’est une loi qui coupe à la tronçonneuse les protections environnementales durement acquises ».

Quelques exemples : la dépénalisation des atteintes « non intentionnelles » à l’environnement (l’intentionnalité est toujours très compliquée à prouver) avec au choix un stage de sensibilisation ou une amende plafonnée à 450 €; une « présomption d’urgence en cas de contentieux pour les réserves d’eau à vocation d’irrigation » ; « la non interdiction de pesticides autorisés dans l’UE »…

En partie censurée par le Conseil Constitutionnel le 20 mars, l'architecture de cette loi n'a pas été chamboulée, elle reste rétrograde sur l'environnement avec juste des voeux pieux sur la démographie agricole.

Et tout cela n’est qu’un début. Les attaques contre l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et ses agents et contre l’ANSES (qui teste les effets des pesticides en particulier) se traduisent dans une PPL déjà votée au Sénat, portée par Laurent Duplomb (ex FDSEA de Haute-Loire, très proche de Wauquiez). Au prétexte de "Lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur", elle vise en particulier à revenir sur l’interdiction de la séparation du conseil et de la vente de pesticides, sur l’interdiction des néo-nicotinoïdes, à déclarer les « ouvrages de stockage de l’eau et les prélèvements d’intérêt général majeur »…

Et pendant ce temps-là, toujours pas de débat ni de mesure pour limiter la concentration foncière ; rien sur la flambée des coûts des intrants et les oligopoles dans les engrais, le machinisme et les phytos ; rien sur les exemptions fiscales au profit des agriculteurs les plus mécanisés ; rien sur la régulation de la production d’énergie (panneaux solaires et biogaz) dans les fermes, bien plus rentable que la production agricole…

A quand un vrai débat sur l’agriculture, l’alimentation, la santé et l’environnement ?

Il existe pourtant localement, par exemple lors du Festival ALIMENTERRE, mais ne trouve aujourd'hui aucun écho politique national.

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