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Billet de blog 20 janvier 2020

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A propos de Cédric Chouviat

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La mort de Cédric Chouviat, suite à son interpellation par la police, me semble « quotidienniser » les situations dans lesquelles nous pouvons avoir peur de la police : elles se rapprochent du plus grand nombre.

Cela fera sans doute controverse (et j'espère que cela n'empêchera pas de me lire jusqu'au bout) mais, en premier lieu, le fait est que Cédric Chouviat a l'aspect d'un blanc, ce qui est le cas du plus grand nombre au sein de notre société.

Cette dimension de la « quotidiennisation » des violences policières est déjà devenue une réalité avec la répression du mouvement des gilets jaunes. Mais, dans ce cas, le cadre est celui de manifestations.

Ici, il s'agit d'une interpellation sur une voie publique passante pour une situation, semble-til, de contrôle routier que beaucoup ont déjà vécue.

Autant d'éléments permettant à un plus grand nombre de se sentir concerné par la mort de Cédric Chouviat.

Cette diffusion de la peur de la police pose alors une question : cela va-t-il renforcer notre soumission à la police dans des situations nous apparaissant comme injustes ? Par exemple, si nous sommes témoins d'une interpellation avec utilisation des mêmes techniques ayant entraîné la mort de Cédric, trouverons-nous le courage de dire (de dire, pas d'être violents, quand bien même avec véhémence) aux policiers de maîtriser leurs techniques pour éviter qu'elles entraînent la mort ?

Il me semble que la question mérite que nous nous la posions car il n'est pas rare d'assister à des actions quotidiennes de la police qui peuvent nous sembler inadaptées.

Personnellement, j'en ai dernièrement vécue trois.

La première était lors d'une interpellation de jeunes filles considérées comme Roms faisant signer de fausses pétitions. En courant derrière certaines d'entre elles, le policier en croise une qui s'est arrêtée et lui assène à la volée une forte claque. Mon intervention du haut de ma fenêtre a amené le policier à me dire de descendre si je suis homme. Cela a fait l'objet d'une saisie du défenseur des droits puis d'une convocation par l'IGPN.

La deuxième concerne l'interpellation du même type de personne. Le policier tirait les cheveux d'une d'elles pour lui gigoter la tête tout en lui criant dessus. Mon intervention a amené le policier à revêtir des gants et à venir coller son nez au mien en me menaçant de me taper.

La troisième concerne des policiers à moto sans gyrophares qui pris dans un embouteillage montent sur le trottoir et se mettent à rouler très vite au milieu des piétons. Etant sur le trottoir je les ai interpellés sur le danger qu'ils représentaient, ce qui les a amené à s'arrêter et l'un d'eux est venu vers moi et m'a poussé violemment au thorax pour me projeter sur la chaussée alors que la circulation avait reprise.

J'ose croire que le sentiment de légitimité dans une situation d'injustice est quelque chose de suffisamment fort pour que notre réactivité ne soit pas inhibée par la peur. Mais il me semble aussi évident que plus la peur nous traumatise plus elle nous inhibe.

C'est pourquoi les conséquences sur nous de la mort de Cédric Chauviat me semblent être importantes à penser. Car je crois, mais j'espère me tromper, que nous risquons de rencontrer de plus en plus souvent des situations d'actions injustes de la police.

Sivan

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