Entre clémence et fermeté : le jeune preneur d’otage condamné
Publié le 21/01/2015
Par l'est éclair
Personne n’a oublié la prise d’otage à Radio Latitude en avril dernier. Son auteur, Angelo, loin du garçon incontrôlable qu’il était, a évolué et le tribunal a cru en lui.
Lundi soir, la sanction est tombée. Loin des projecteurs, le tribunal pour enfants a condamné Angelo pour les actes graves qu’il a commis et qu’il reconnaît. Mais le tribunal a aussi salué et soutenu les efforts de ce jeune homme perdu pour devenir meilleur.
Nous sommes le 17 avril 2014. Il est 10h45 à Pont-Sainte-Marie. « Je suis dans la radio avec Arthur. Je le prends en otage. Je suis armé. » Ivre de rage, Angelo ne réfléchit plus. Il vient d’apprendre que la plainte déposée contre le directeur de Radio Latitude a été classée sans suite par le parquet. Il ne croit plus en rien, alors il orchestre le pire. Une prise d’otage en ces lieux qui, quelques années auparavant, auraient été le théâtre du drame qu’il dit avoir subi. Un viol.
Mais ce jour-là, le directeur Sylvain Jourdain n’est pas là. Angelo fait face à Arthur, un jeune animateur âgé de 18 ans. Il aurait pu baisser les armes, mais il s’entête dans sa volonté d’aller au bout d’une quête impossible.
« Évolution spectaculaire »
Autour de cette maison du boulevard Jules-Guesde, les heures défilent au rythme de l’angoisse et de la crainte du passage à l’acte. Les fonctionnaires de police sont bientôt rejoints par les hommes qui composent l’unité d’élite de la police. Prêt à donner l’assaut : le RAID. Perché sur le toit de la maison, Angelo apparaît tel qu’il est. Désemparé. Près de lui, une victime traumatisée. Cinq longues heures passent avant la reddition.
Dans la foulée de sa garde à vue, Angelo est placé en détention provisoire alors qu’une information judiciaire est ouverte et confiée à un juge d’instruction troyen.
Entre les quatre murs de sa cellule, l’adolescent incontrôlable apprend et mûrit. « Avant d’être isolé, son seul salut venait de la vengeance. Il aura fallu ce temps d’incarcération, l’impasse de la prison pour amener la réflexion ». Me Christophe Lejeune n’a jamais lâché. Il entoure et conseille Angelo depuis des années. Aujourd’hui, il témoigne d’une « évolution spectaculaire » saluée par l’expert psychiatre. « Il a énormément changé. Il a pris conscience jusqu’à envisager que la justice puisse ne pas le suivre dans ses accusations. Aujourd’hui, il est miné par la culpabilité. Ce jeune homme qui s’est trouvé face à lui n’y pouvait rien. Il le sait et il le regrette profondément ».
À l’audience, lors de son procès à huis clos, Angelo n’a plus rien de l’individu aveuglé par la rage qu’il était hier. « Il est lucide. Il a tout accepté d’une prise en charge psychologique. Il y croit, ce qui lui permet d’avancer. Même si la culpabilité ne le quittera jamais, il évolue avec la seule volonté de s’en sortir. » Entre fermeté et compréhension, la sanction tombe.
« Une décision logique »
Après trois heures d’instruction et le temps du délibéré, le tribunal pour enfants a choisi de condamner. Mais pas uniquement. Angelo écope de vingt-quatre mois de prison dont douze assortis d’un sursis et d’une mise à l’épreuve. Il ne retournera pas derrière les barreaux, mais il devra faire ses preuves.
Dans quelques semaines, le juge de l’application des peines décidera des modalités de l’aménagement de sa peine. En fonction de celui qu’Angelo était et de l’homme qu’il est devenu. Un garçon qui vit chez ses parents et surtout qui travaille. « Cette décision est relativement logique. Elle ménage autant les intérêts des victimes que ceux de celui qui était poursuivi ». S’il ne sait pas saisir sa chance, il effectuera sa peine de prison ferme derrière les barreaux. « Je n’y crois pas. Il a résolument changé ».
Loin de la tempête médiatique qui a suivi la prise d’otage, Angelo a choisi de rester dans l’ombre. « Il ne souhaite pas qu’on lui reproche de parler alors il préfère se taire et continuer son chemin. » Angelo n’oublie rien, il vit avec. Sa victime et le reste.
Mais tout n’est pas terminé. Parallèlement à cette instruction, le parquet a jugé bon de revenir sur ses pas. Puisqu’Angelo crie avoir été abusé, violé, les investigations ont repris. L’instruction suit toujours son cours.
Céline Tillier