Je m’appelle Philippe Jouary, je travaille depuis plus de trente-cinq ans, comme éducateur spécialisé d’abord, puis depuis une dizaine d’années, en tant que chef de service éducatif. J’occupe cette fonction depuis quatre ans à Montpellier comme chef de service d’un Foyer Logement où sont accueillies des personnes qui sortent de séjours en psychiatrie.
Hier, mercredi 18 juillet 2012, j’ai rendu public un communiqué dans lequel j’annonce que je me mets en grève de la parole et de la faim :
« Par cette grève, je proteste contre les pratiques indignes de la direction, à mon égard, comme à celui de nombreux autres salariés.
Ce sont ces pratiques dites « managériales » qui partout où elles sont à l’œuvre, génèrent ce qu’on appelle aujourd’hui la souffrance au travail. Harcelés, isolés, ostracisés, confrontés tant à la violence de la hiérarchie qu’au silence des collègues effrayés ou complices, certains ne trouvent d’autres choix que de mettre fin à leurs jours, d’autres finissent leur vie professionnelle dans la solitude, la honte, le repli.
C’est aussi contre cela que je proteste, pour dire à mes camarades, ici et ailleurs, ne nous laissons pas maltraiter, ne nous laissons pas isoler les uns des autres, ne laissons pas à des incompétents le soin de nous dire comment nous devons aujourd’hui faire nos métiers.
A d’autres que moi maintenant de parler et de revendiquer. Je retrouverai alors peut-être l’appétit et le goût de la parole. Celui de la soumission, jamais. »
J’ai écrit ce texte dans la nuit de mardi à mercredi, ce qui prouve bien que contrairement au dicton, la nuit ne porte pas toujours conseil. En revanche, une fois la lumière éteinte, elle porte les questions que le jour accumule et qui empêchent le sommeil de faire son oeuvre et le salarié de reconstituer sa force de travail.
Et c’est comme cela qu’au matin, je me suis retrouvé assis par terre devant le portail de mon entreprise et que cette nouvelle aventure a commencé.
J’ai annoncé que je fais aussi la grève de la parole, décision qui surprend ceux qui me connaissent, que je saoule parfois avec mes discours, et qui savent combien il m’est plus difficile de me taire que de dédaigner une ration de frites mayonnaise.
Pour donc éviter un sevrage trop brutal, je leur donne rendez-vous sur ce blog, ainsi qu’à tous ceux qu’intéresse la question de ce que devient le travail.