Acte 1. Le 28 janvier 2011, pour critiquer la proposition de Thomas Piketty de créer un taux marginal de 60% sur les revenus dépassant 100 000 euros par mois, François Hollande reprenait la réthorique libérale consistant à rendre la fiscalité responsable de la fraude : « Je préfère un impôt payé à un impôt fraudé ».
Piketty ne manquait pourtant pas d'arguments. Il insistait notamment sur une implication du grand renoncement social-libéral:
« Je recommande à François Hollande de produire son barème, parce que tout se paye. Si on réduit à 50% le taux supérieur, alors on sera obligé d'augmenter les taux d'imposition des revenus moyens ou inférieurs »
Acte 2. Le 27 février 2012, François Hollande, désormais candidat du Parti Socialiste à l'élection Présidentielle, propose un taux marginal d'imposition de 75% pour les revenus supérieurs à 1 millions d'euros par an (soit environ 83 000 euros par mois).
Conclusions provisoires. On ne peut que se réjouir de ce volte-face de Hollande. Reste qu'une telle réforme, si elle devait effectivement voir le jour, ne rapporterait que 200 à 250 millions d'euros de recettes. Car le barême de l'IRPP ne porte pas sur le revenu effectif des personnes mais sur leur revenu fiscal. Or les niches fiscales permettent de minorer ce dernier. Pour être efficace, l'augmentation du taux marginal de l'impôt sur le revenu doit donc s'accompagner d'une réduction drastique des niches fiscales.
Par ailleurs, on peut se demander si la proposition de Hollande ne vise pas à faire oublier ses propos rapportés par le Guardian: "La gauche a été au gouvernement pendant quinze ans, nous avons libéralisé l'économie et ouvert les marchés à la finance et aux privatisations. Il n'y a donc pas de craintes à avoir". Rassurer la City sans s'aliéner l'électorat de gauche... Drôle de numéro d'équilibriste!