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Billet de blog 2 avril 2025

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10 ans d'Expertise France : y aura-t-il du gâteau pour tout le monde ?

Le 10ème anniversaire d'Expertise France a donné lieu à certains échanges qui posent problème.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’anniversaire des dix ans d’Expertise France, le 12 février dernier (replay disponible sur le site d’Expertise France) a donné lieu à divers échanges qui m’ont interpellé (3h 47’ d’écoute attentive) :

- Sébastien Mosneron Dupin, premier DG d’Expertise France, a affirmé « qu’aujourd’hui, une majorité des experts d’Expertise France sont des experts du Sud et on parle plus de métissage de l’expertise que d’exporter notre savoir vers le Sud » (tandis que Jérémie Pellet, DG actuel d’Expertise France, opinait du chef). Je veux bien croire que l’on en « parle », quant à ce que cela se traduise dans la réalité… Il semble bien que l’on soit en présence d’une « ignorance institutionnellement organisée » (Mohammed Arkoun). En tout cas, la première proposition de la phrase me semble tout simplement inexacte (impression confirmée par un ancien expert international que j’ai pris soin d’interroger immédiatement après).

- Un peu plus loin, Nathalie Delapalme, (Fondation Mo Ibrahim), dans une ambiance de remise en cause de la notion d’aide au développement telle qu’elle existait jusqu’à présent, remarque : « La main qui donne est plus haute que celle qui reçoit, c’est terminé ». Amadou Hampathé Ba aurait-il soudain tort ? Le plus fort ne domine-t-il plus l’échange ? Je crains que dans le rapport entre un pays donateur à revenu élevé et un PMA la maxime « qui paye commande » soit toujours d’actualité.

- Dans le même mouvement, comme pour enfoncer le clou, Luc Bagur (Union européenne) estime que « le temps des relations traditionnelles pays donateurs-pays bénéficiaires de l’aide est révolu ». Mais dans ce cas, il faut supprimer le CAD de l’OCDE qui fixe la liste des pays bénéficiaires ! (pas sûr que cela satisfasse les grands pays donateurs qui cherchent régulièrement à figurer dans le peloton de tête de la générosité internationale).

- L’intervenante suivante, Hindou Oumarou Ibrahim (représentante des peuples autochtones, écologiste), note quant à elle fort à propos qu’« 1 % seulement des financements vont aux peuples autochtones », alors qu’ils représentent de véritables modèles à suivre en matière de développement durable. Rémi Rioux, qui semble bien la connaître, aura-t-il, au-delà des apparences, une oreille plus attentive à la cause qu’elle défend ?

- Il fallait bien un ministre pour clore les débats. Thani Mohamed Soilihi a enfin pris la parole, concluant, de manière magistrale : « Nous avons le devoir collectif de convaincre l’opinion publique de l’utilité de nos investissements solidaires et de leurs retours sur investissement ». Décidément, l’utilisation du nouveau nom de l’aide (« investissement solidaire ») rappelle l’histoire de l’aide : la solidarité s’efface devant l’intérêt (n’oublions pas que le Bureau de l’aide publique au développement se trouve dans les murs de la Direction générale du Trésor dont la logique est le retour sur investissement).

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