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Billet de blog 27 juin 2016

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DU TRAITÉ DE LISBONNE AU BREXIT.

Après l’euphorie de la libération, comme grisés de champagne bu la veille à la gloire nationale, la gueule de bois générale qui attendait les bretons leur fait découvrir au petit matin qui déchante le foutoir qu’ils ont provoqué une nuit d’ivresse collective. Renverser les tables, ça défoule sans doute des frustrations accumulées mais une fois fait, il faut nettoyer et reprendre le quotidien en co

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

DU TRAITÉ DE LISBONNE AU BREXIT.

Après l’euphorie de la libération, comme grisés de champagne bu la veille à la gloire nationale, la gueule de bois générale qui attendait les bretons d'outre-manche leur fait découvrir au petit matin qui déchante le foutoir qu’ils ont provoqué une nuit d’ivresse collective. Renverser les tables, ça défoule sans doute des frustrations accumulées mais une fois fait, il faut nettoyer et reprendre le quotidien en comptabilisant en moins ce que l’on a cassé avec un mal de crâne en plus. 

L’union européenne vient de subir son premier couac de taille. Un peuple charmé par les sirènes populistes des vizirs qui se verraient bien califes à la place du calife, a voté le retrait de l’union sur la base du rejet avec des accents proches de la xénophobie et de promesses bien vites démenties. Un peuple fier de son passé impérial découvre que Victoria n’est plus et que sa puissance risque de s’étendre au plus de Newcastle à Salisbury avec un soleil qui se lève tard pour se coucher tôt les longs soirs d’hiver qui ne manqueront pas d’arriver. Une leçon d’humilité cher payée pour une question à mon humble avis mal posée par des opportunistes calculateurs, reflets d’une médiocrité politique contemporaine, mais qui pourrait être profitable à d’autres ex-puissances coloniales dont la réalité n’est plus que dans les manuels d’histoire et les musées qui font d’eux des crapauds schizophrènes qui se prennent pour des boeufs d’opérette.

Le brexit pourrait n’être que le symptôme d’une maladie profonde qui aura provoqué un réaction phobique à un traitement administré par des charlatans au nom d’une définition de la santé partielle et déséquilibrée d’une société. Soigner un corps ne se limite pas à faire bonne figure, il faut aussi s’occuper des pieds sans lesquels aucune avancée ne peut se faire et l’Europe est bien devenue cette vieille figure botoxée qui néglige sa base surtout quand celle-ci fait souvent preuve de sagesse comme lors des référendums sur le traité de Lisbonne dont on mesure aujourd’hui combien il était nocif et à laquelle une caste d'aristocrates de la finance et de la politique autoproclamés sont restés unanimement sourds. 

Quelle ironie de constater que le pays chantre du libéralisme et de Margaret Tatcher, le premier à avoir détruit les équilibres sociaux pour donner toute puissance à une économie de rente, qui s’est empressé grâce au désarmement forcé des travailleurs de livrer ces derniers à une concurrence sans merci, se voit le premier à en subir le retour de bâton. Délocalisations et concurrence déloyales des citoyens membres des pays où les salaires qui y sont pratiqués détruisent ceux des autres, le tout organisé depuis les plus hautes instances décisionnaires souvent corrompues, ont inspiré un vote de défiance porteur d'un message très clair. On ne crée pas une union sans les peuples car sinon, le divorce des uns les conduira à tuer la poule dont les oeufs sont confisqués par d'autres pour la simple évidence qu’ils considèrent ne plus avoir grand chose à perdre. 

Les dirigeants anglais ont démontré leur impéritie si ce n'est leur incapacité à une vision digne d'un leader politique. Cameron en tête mais que dire d’un Nigel Farage ou d’un Boris Johnson qui maintenant placés au pied du mur reviennent déjà sur les promesses de cette incroyable campagne référendaire et qui tenteront de camoufler la vérité d’un vote qui représente en premier lieu le rejet des élites acquis au néo-libéralisme défendu par Bruxelles, Berlin, Paris et bien sur Londres mais aussi bien sur par eux-mêmes. Les citoyens anglais ont été trompé dans un jeu provoqué par des ambitieux sans scrupule comme il en fleurit un peu partout sur un continent qui, ayant tué la politique et de fait la démocratie, ne voit plus que des candidats à la promotion suprême se battre sur des slogans et des promesses conçues par des publicitaires déguisés en journalistes qui vendraient pères et mères pour le privilège d’un accès au gâteau garni des fruits juteux de l’exploitation débridée des peuples d’en bas dont ils ne voient plus en eux que les outils corvéables et jetables à merci nécessaires à leurs profits. Seulement, quand on joue avec le feu on prend le risque de se bruler et les politiques anglais risquent même d’en sortir carrément cramés car maintenant que l’émotion du psychodrame de la campagne est retombée, c’est peut être un incendie qui va se déclarer dans l’opinion désabusée des électeurs trompés qui ne manqueront pas de demander des comptes. Même avertissement pour des politiques d'ici même qui se font élire sur la base d’un contrat moral établi lors de campagnes électorales sur lesquels une fois élus ils s’assoient sans la moindre honte pour appliquer une politique au service de la cupidité des rentiers d’une économie confisquée.

De même pour la monnaie unique, privatisée et utilisée comme une arme pointée sur la tempe des démocraties comme on l’a vu en Grèce où l’usure de ces mêmes rentiers assassine l'économie d'un pays. La rigueur budgétaire ou plutôt la rigidité maladive des comptables déshumanisés aussi froids que des pelotons d’exécution devant des condamnés à qui ils leur volent retraites et salaires qui leurs sont pourtant dus. Les privatisations systématiques et forcées ainsi que les reculs sociaux honteusement présentés comme des avancées modernes et qui n’ont pour seuls résultats que la création d’empires économiques qui imposent leur féodalités d’ancien régime repeintes aux bannières des multinationales aux aspirations totalitaires. Des règles favorisant toujours ces mêmes rentiers qui peuvent engranger des fortunes astronomiques dans des paradis fiscaux au nez et à la barbe des populations obligées de se serrer toujours un peu plus la ceinture au nom d’une compétitivité qui ne leur rapporte rien. Une insécurité des existences par la précarisation des emplois et du logement détruisant le lien social jusque dans les structures familiales. Des systèmes de santé dévoyés et déliquescents comme pour l’éducation. 

La liste est longue des méfaits inscrits dans le traité de Lisbonne et sa philosophie néo-libérale et c’est cela que le brexit signifie sans doute en premier lieu: son rejet ! Fermer les yeux sur cette vérité ne fera tout au mieux que retarder l’échéance d’un rejet massif qui finira tôt ou tard par tout emporter dans une colère qui ne laissera que le choix de la dictature ou la mort pour un projet oublieux de son but initial, celui d’établir la paix en mêlant les intérêts de tous. Aux antipodes de cette généreuse idée, nous sommes en vérité livrés à une compétition sans merci les uns contre les autres où tous les jours se réduisent nos conditions de vie et il est naturel même si c'est une erreur à ce constat, de voir refleurir les pensées sordides de la haine de l’étranger assimilé à un “jaune” responsable de concurrence déloyale. Ainsi, l’immigré, qu’il soit européen ou réfugié extra européen devient-il rejeté et vite condamné à tort. Cependant, à ce propos, l’argument du racisme est une commodité malhonnête trop facilement brandi par les communicateurs pourtant désavoués chaque fois que des électeurs s’expriment comme on l’a vu à quasi tous les référendums. Il serait temps qu’un peu d’honnêteté éclaire les rédactions des médias traditionnels pour revenir à la vraie nature de leur métier qui est celui d’informer et non pas de manipuler.

Des politiciens, dont certains hautement responsables du fiasco de l’union, réclament un nouveau traité face à la gifle assenée et à la prise de conscience qu’il y a peut être péril en la demeure, et si je leur donne raison, je ne les considère pas pour autant comme légitimes pour en rédiger les nouveaux termes. Les Sarkosy et son petit clan, les Hollande et son parti godillot ainsi que les populistes du FN n’ont plus leur mot à dire. Les uns parce qu’il a déjà été dit, les autres parce que l’Europe n’est pas leur affaire puisqu'ils n'en veulent pas.

Nous avons besoin de renouveau. Un renouveau qui ne soit pas une continuité remaquillée comme c’est l’usage depuis le fameux changement dans la continuité de Giscard ou parce Jacadi a dit que c’est maintenant comme Hollande mais d’un véritable changement qui fasse table rase du traité de Lisbonne et de sa compétition libre et non faussée, qui restaure les services publics, les retraites, harmonise fiscalités et salaires et base ainsi une véritable union des peuples qui n’auraient plus à craindre un climat de tensions inutiles et délétères entre les uns et les autres et qui serait susceptible de nous fédérer sur un vrai projet commun, enthousiasmant, sans exclusive et dans le respect de toutes les composantes sociales. Bref, une révolution continentale en quelque sorte

L’Europe est malade, et il nous faut d’urgence des médecins compétents pour que la gangrène qui ronge les pieds d’humeurs populistes ne contamine pas le corps tout entier pour l’entrainer dans une pourriture qui commence déjà à l’affaiblir. Il faut un remède qui puisse harmoniser la démocratie locale et la macro-politique en laissant les expressions se libérer à tous les niveaux en respect des libertés individuelles. Cesser de passer sous la toise étalonnée depuis les commission de Bruxelles pour imposer les règles et les normes de nos vies et absolument chasser le lobbying nocif et contraire à la démocratie et renouveler un personnel politique qui permet à des Juncker d'être scandaleusement là où il est.

Si nous ne trouvons pas ces médecins, l'union va mourir et les populistes vont nous manger comme j'ai le sentiment qu'ils viennent de le faire en Angleterre.

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