Vendredi 17 Novembre 2017 : Nîmes
Temps splendide : soleil sans vent. J'écoute « Apatride », le nouvel album d'André Manoukian qui, en bon jazman qui se respecte, est parti à la découverte de nouvelles contrées, proches de ses origines arméniennes : une symbiose parfaite entre jazz et musique traditionnelle orientale. Cette musique me touche car elle fait suite à un déjeuner récent, de partages, avec Henri Aram Hairabédian, ci-devant fidèle à sa lutte obstinée pour faire reconnaître le génocide Arménien, à la Guinguette de Dions. Sculpteur infatigable de marbres et de pierres de garrigue, écrivain qui m'a offert son dernier ouvrage « Château de Fables » et qui, à 81 ans, continue de nous faire partager ses émotions, sa quête de merveilleux et d’harmonie. Il y a comme çà des moments de grâce, si rares qui nous élèvent.
Autre déjeuner chez moi avec Patrick Bellito, qui est assurément la pierre angulaire du Festival de Flamenco, pour le compte du Théâtre de Nîmes, troisième Festival au monde. Un mec comme je les aime : modeste, autodidacte, mais tellement riche avec lequel, quand on se quitte, on se sent subitement un peu moins con, faisant mienne cette superbe saillie de Georges Wolinski : « Je suis un con, mais quand je vois ce que les gens intelligents ont fait du monde... » Tout cela après un superbe Osso Bucco que j'ai fait longuement mitonné à la Milanaise, avec quelques segments d'orange...arrosé d'un Costière de Nîmes, comme on les aime. Patrick qui m'a offert le dernier ouvrage de Pauline Dreyfus : « Le Déjeuner des Barricades », sachant mon rapport charnel à Mai 1968 : Tous les cocktails ne sont pas Molotov. À quelques centaines de mètres de la Sorbonne où les étudiants font la révolution, l’hôtel Meurice est occupé par son personnel. Le plus fameux prix littéraire du printemps, le prix Roger-Nimier, pourra-t-il être remis à son lauréat, un romancier inconnu de vingt-deux ans ? Sous la houlette altière et légèrement alcoolisée de la milliardaire Florence Gould, qui finance le prix, nous nous faufilons parmi les membres du jury, Paul Morand, Jacques Chardonne, Bernard Frank et tant d’autres célébrités de l’époque, comme Salvador Dalí et J. Paul Getty. Dans cette satire des vanités bien parisiennes passe le personnage émouvant d’un vieux notaire de province qui promène son ombre mélancolique entre le tintement des verres de champagne et les réclamations de « rendre le pouvoir à la base ». Une folle journée où le tragique se mêle à la frivolité.
Je deviens, au fil des jours, de plus en plus indifférent à la politique. Bien sûr que mon appartenance à la Gauche de la gauche est intellectuellement intacte. Cependant, je supporte de plus en plus mal la hargne de certaines polémiques qui agitent la Gauche : Maître Dupont Moretti à Bernard Henri Lévy, ou Edwy Plenel à Charlie Hebdo...
« Les jours laissent leur peau, comme des couleuvres. Sauf les jours de fête » (Fédérico Garcia Lorca).
Malheureusement, il y a de moins en moins de jours de Fête...
Ma tante Huguette est décédée. Elle avait 91 ans. Après le départ de ma maman qui a aujourd'hui 89 ans, je serai en première ligne. Quelle nouvelle angoisse...