Samedi 21 Avril 2018 : Nîmes
Le soleil, le grand soleil est enfin revenu. On installe tout ce qui faut installer pour vivre dehors. Pourvu que çà doure, comme disait Letizia Ramolino...
Envie d'être en blanc, la vraie couleur de l'été, indien quand il dure au delà de la normale. Comment le nomme t-on dans sa précocité ?
J'observe les conflits sociaux en cours, notamment celui de la SNCF, avec circonspection. Je suis de moins en moins enclin à aller « manifester », à tout bout de champ, en dehors de tout objectif clairement affiché. S'agissant de la SNCF, deux positions s'affrontent. Les syndicats prédisent une privatisation à terme. L’état parle de sa prise de participation de 100% de la nouvelle société anonyme à capitaux publics, composée d'actions « incessibles », ce qui empêcherait toute privatisation. Les syndicats répliquent : çà ne figure pas implicitement dans le projet de loi votée par l'assemblée nationale... ??? Qui croire ? Est-ce, à travers ce conflit, la défense de tout le service public... ? Je n'y crois pas. Un nouveau chantier s'ouvrira bientôt : celui de la Fonction Publique Territoriale et du démantèlement du recrutement sur concours, qui ouvrira la voie -déjà partiellement ouverte- du recrutement clientélaire. C'est déjà en marche à la Mairie de Nîmes où, après le départ prochain du directeur de cabinet du maire, c'est le directeur général des services, déjà recruté hors fonction publique, qui cumulera ses fonctions avec celle de dir cab... Et puis la réforme des régimes de retraites. On n'est pas sorti de l'auberge...
Etant hors circuit, j'observe. Cependant, comme tout citoyen les yeux ouverts, je suis contraint de prendre en compte le raz de marée de Macron lors de la présidentielle, qui a mis hors circuit les partis traditionnels. Aucune alternative politique à l'horizon... Alors, en l'état, politiquement et syndicalement, les progressistes, dont je fais partie, sont hors jeu.
Je viens de reprendre la trilogie de Jean-Claude Izzo, Total Khéops, Chourmo et Soléa, dont je ne me lasse jamais. Du Panier aux quartiers nord, du Vieux Port à l'Estaque, nous suivons les pérégrinations de Fabio Montale, flic déclassé de la Brigade de surveillance des secteurs. Fils d'immigrés italiens qui aime les poètes des Cahiers du Sud, la pêche, la soupe au pistou d'Honorine, son Mazet des Goudes, les bouteilles tourbées de Lagavulin, les femmes et Marseille, bien sûr. Jamais, dans mes nombreuses lectures, je ne me suis senti aussi proche qu'avec Fabio Montale, et de ses poètes marseillais aujourd'hui oubliés : Emile Sicard, Toursky, Gérald Neveu, Gabriel Audisio et Louis Brauquier, l'auteur de « Je connais des îles lointaines « :
« C’est un homme vivant qui part et se déchire
Comme un ciel sur les mâts ;
L’homme le plus tenté par l’amour des navires
Et la forme du monde. »
Marseille, Ville natale de Jean-Claude Izzo, qu'il décrit avec le recul de celui qui la connaît et l'aime intensément : « Marseille n'est pas une ville pour touristes. Il n'y a rien à voir. Sa beauté ne se photographie pas . Elle se partage. Ici, il faut prendre partie. Se passionner. Etre pour, être contre. Etre, violemment. Alors seulement ce qui est à voir se donne à voir. Et là, trop tard, on est en plein drame. Un drame antique où le héros c'est la mort. A Marseille, même pour perdre, il faut savoir se battre. »
Alors, pour échapper à toute la saloperie du monde, dont parle Izzo, un verre de Lagavulin. Il est 11h30., et la recette de poivrons farcis d'Honorine : « Honorine avait une manière incomparable de faire des poivrons farcis. A la roumaine, disait-elle. Elle remplissait les poivrons d'une farce de riz, de chair à saucisse et d'un peu de viande de bœuf, bien salée et poivrée, puis elle les déposait dans une cocotte en terre cuite et elle recouvrait d'eau. Elle rajoutait coulis de tomate, thym, laurier et sarriette. Elle laissait cuire à tout petit feu, sans couvrir. Le goût était merveilleux, surtout si au dernier moment, on versait dessus une cuillérée de crème fraîche... »
On est bien loin de la grève de la SNCF. Désolé. Je le sais...