Il faut toujours justifier de l’inégalité des hommes pour la rendre possible.
Le pillage des ressources naturelles, l’exploitation éhontée des mains d’œuvre, la chair à canon se raisonnent dans une hiérarchie du droit à la richesse, justifiée par une utilisation naturellement plus civilisée du butin. Quand on sait les coupeurs de tête, la polygamie, la paresse, les mœurs douteuses, la fourberie, on ne peut attribuer l’intelligence et son exercice qu’à des contrées occidentales autoproclamées de l’excellence et de la science. Le retour de manivelle a commencé et il n’est pas dit qu’on ne le paye pas au prix fort. Terreur de devenir ce qu’on a fait vivre aux autres, terreur moderne. Miroir du colonialisme.
La crise niche une autre dimension de l’horreur de l’autre, le racisme. Considérer le monde en pénurie, considérer l’autre comme un prédateur de notre nécessaire. Racisme vitupérant, décomplexé, les pauvres se bouffent entre eux, quelle aubaine ! Ainsi, ce différent est notre ennemi mortel, moi, qui bosse, ai toujours respecté les règles, me suis toujours incliné devant la loi. Suspicion du profiteur, de celui qui se soustrait au difficile, au pénible, de celui qui se moque de nous. Cet autre porte un nom, l’étranger. Il tombe bien, il n’existe pas, on l’habite, il tombe mal.
Son destin est donc de ne pas nous appartenir, de ne pas être en complicité. Forcément de l’autre côté du mur, Il est la cible de nos souffrances et de nos malheurs, le déversoir ultime de nos frustrations.
C’est au prix de ce raccourci saisissant, que 20 % des électeurs s’apprêtent à voter Front National. Que les instigateurs de l’opulence et de la pénurie trouvent ici l’expression de mon indéfectible mépris.