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Billet de blog 3 avril 2013

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L’Apathie vient en mangeant, épopée d’un chien de garde

Je regardais hier avec intérêt le visage de Jean Michel Apathie lors du Grand Journal et j’étais frappé par la persistance de ce petit sourire triomphant alors que l’aveu de Jérôme Cahuzac aurait dû l’inciter à sinon battre sa coulpe du moins à afficher quelques signes de modestie.

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Je regardais hier avec intérêt le visage de Jean Michel Apathie lors du Grand Journal et j’étais frappé par la persistance de ce petit sourire triomphant alors que l’aveu de Jérôme Cahuzac aurait dû l’inciter à sinon battre sa coulpe du moins à afficher quelques signes de modestie.

Loin de moi l’idée d’analyser ce grand professionnel du côté de ses travers psychologiques : certes, égo démesuré, toute puissance s’accommodent fort bien avec cette hémorragie quotidienne de colères feintes du donneur de leçons patenté   mais je me disais que son sourire était surtout la conviction que le système médiatique est bien plus fort que les événements eux-mêmes ; en un mot, que les événements  sont au service  de la bouillie médiatique que ces chroniqueurs servent et je crois précisément qu’à cet endroit , on trouve l’identité du chien de garde. Pourquoi s’encombrer de l’exactitude des faits, de leur recherche dans un système ou l’exactitude des faits n’est qu’un moyen parmi d’autres  d’augmenter le potentiel de cerveau disponible ?

Faire l’opinion, la modeler, lui resservir la même soupe avec la violence du marteau sur le clou en ressassant les mêmes évidences, telle est la noble fonction du chien de garde. Tout d’abord, s’il peut plastronner, outre ses incroyables qualités personnelles, c’est surtout grâce  au petit producteur d’audience qui a vu là un moyen de fidéliser  un public : homme, cinquante, soixante ans, issu de la France profonde (la vraie) avec accent, bons sens garanti, pas mal Jean Mimi…….. Figure d’autorité dont les éclats de voix impressionnent : mange ta soupe, va te coucher, sois gentil. Car ne croyez pas que ce système soit ouvertement cynique, pas du tout, il se targue d’une certaine moralité ou d’une moralité certaine. Le ressort est simple : le journaliste droit, intègre et intelligent vient faire la leçon au politique coupé des réalités, débauché et inconséquent : effet identificatoire garanti, on pourra aller se coucher rassuré.

Non,  ce que les éclats de voix dissimulent, c’est le fonctionnement « réel », la visée de morale personnelle étant un gigantesque écran de fumée qui ne touchent jamais aux questions de dominance, d’exploitation  d’intérêt, de collusion, de mélange des genres. Du coup, sur ce théâtre de « l’honnêteté » théorique et abstraite, comment faire autre chose que l’évidence immédiate du visible ? Quelle singulière manie d’aller enquêter sur des mécanismes dont la logique même est d’être dissimulée, difficile à débusquer ? Et bien, la réponse est un peu dans la question, la fonction de ce « journalisme » là étant précisément d’éviter ces fâcheuses émergences. Je comprends l’acharnement de Jean Michel Apathie à ne pas reconnaitre de dysfonctionnement ou de faute puisque sa fonction médiatique était précisément d’éviter l’irruption de ce type de « vérités ». Et c'est bien "normal" qu'il continue à perseverer dans cette noble mission.

Je ne crois pas Jean Michel Apathie suffisamment idiot pour ignorer ces mécanismes mais ce moment médiatique le ramène à sa juste place : entre 19h et 20h, dans une œuvre de divertissement de la population, autour d’autres saltimbanques, il vient contribuer à la sérénité de la digestion familiale.

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