Il y a des gens, on leur donnerait le Bon Dieu sans confession. Prenez Plantu ; petite bouille innocente, sourire charmeur, voix posée, douce.
Que fait ce type dans la vie ? Il dessine, il croque l’événement : il a le talent de résumer d’un trait une actualité forcément complexe, il en donne une image.
Son outil : c’est la mise en parallèle et en miroir. Mélenchon, par exemple, c’est comme Marine Le Pen et tout ça, c’est comme le troisième Reich.
Je respecte sans peine la liberté d’analogie si l’on considère la chose sur un versant artistique : le créateur pose sa création à l’endroit qu’il a envie de la poser. On peut même lui accorder qu’il est humoristique de se faire anoblir par les démocraties du golfe Persique tout en se posant en parangon de vertu démocratique et en donneur des leçons, plus blanc que blanc. Plus surplombant le monde que Plantu, tu meurs.
Non, ce qui me gêne, chez Plantu, c’est l’utilisation du comique de répétition. Évidemment, comme tout le monde, Plantu vieillit : il n’est pas à l’abri du persiflage et de la suffisance du vieux con ordinaire. Il a fait le tour du Monde et il est encore là.
Et, avançons cette idée folle, que Plantu se serait transformé : il aurait troqué sa dimension artistique pour devenir un perroquet idéologue au service de ses patrons et de ses actionnaires. Il ne serait pas en ébullition, mais en service commandé (donc, aussi créatif qu’Alain Minc après un plagiat). Tiens, en parlant d’analogie avec des périodes révolues, son œuvre tendrait-elle à se rapprocher de Radio Paris ?
Sa dernière saillie sur le travail du dimanche, le rapprochement entre CGT et intégrisme est proprement honteux. Non content de hurler avec la meute libérale (mais Plantu souhaite, peut être, acheter ses raviolis exclusivement les dimanches à 11 h 45, condition nécessaire à son génie créatif), il exprime un mépris abyssal pour la condition salariale et ses diverses misères.
Nous sommes décidément bien intolérants à mettre des limites à l’exploitation, à penser que les temps humains doivent être différenciés, à considérer le monde autrement que comme un supermarché permanent.
Heureusement, Plantu nous montre la voie, débusquant nos erreurs et nos errements : nous sommes donc intégristes en tentant de rester droit. L’avenir est radieux et Plantu planté.