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Billet de blog 19 décembre 2014

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Laïcité à LYON: le préfet s’héberge urgemment chez le cardinal.

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L’information de F3 est stupéfiante. Voici l'édifiant article

Jean François CARENCO, préfet de la région Rhône Alpes,  boule au plafond du bal sarkozyste, dont on se souvient qu’il était un adepte posthume de la recherche de croissance avec les dents et du nettoyage des vilains au Karcher, a survécu à l’alternance politique. Il est donc l’inamovible représentant de l’Etat sur ce territoire si particulier de la Région Rhône Alpes et particulièrement de la métropole lyonnaise, laquelle est constituée d’une galaxie de notables dont l’humanisme dispute à la conservation maladive des pouvoirs.

Sans imaginer le préfet structurellement papillon, on peut dire que cette curieuse  stabilité est le fruit de grands esprits qui se rencontrent, une vision d’intérêts partagés puisque cette ville, misérable petite communauté urbaine de province est devenue par la magie de l’appareil d’ETAT, sans avoir besoin de la frustrante approbation démocratique, la première métropole de la France (remarquez pour tenir son rang, en face d’une région sans limite, il fallait ça). Explication titanesque : après un échange de bons procédés avec Michel Mercier, élu éternel, Gérard Collomb, maire, président multicartes, sénateur, chef de l’assainissement  qui tend à se rapprocher tendanciellement  de Christophe,  vient d’hériter d’une très grande partie du territoire du Rhône, dépassement abyssal  du budget  du musée des Confluences en prime. On nous l’avait dit, la modernité impose l’émergence de baronnies pour la plus grande fortune  du commerce mondial et le musée en est l’emblème

Ainsi,  dans ce dress code tablier de sapeur et satiété digestive, d’urbanisme de bon aloi, de propreté accueillante des capitaux, s’impose une désespérante tache. Si vous arrivez en voiture et que vous empruntiez le boulevard périphérique lyonnais, vous apercevrez quelques campements de fortune que des esprits chagrins appelleraient des bidonvilles, où s’entassent dans des conditions déplorables des populations rétives à la modernité. Cela laisse entendre que la stratégie est au pourrissement parce que franchement ça ne date pas de la veille. A cet endroit, on ne sent pas le viril bras le corps de résolution des problèmes mais plutôt, le chuchotement qu’ils vont bien finir par se barrer.

Lyon est en effet, la cible d’une odieuse agression de sa luminescence internationale et intergalactique. Lyon, par sa splendeur ostentatoire, attire le réfugié politique, l’immigré sans le sou et mal habillé, le fuyard  de guerres qui ne parle même pas notre langue, l’accordéoniste dans le métro.

Bien que le slogan officiel fut à la manière de Rina Ketty, j’attendrai toujours ton retour, la dureté des frimas de l’hiver réveille les hormones de la culpabilité, déclenchant de la part des autorités un réflexe conditionné qui s’appelle plan froid (ça ne s’invente pas). Evitons que ces êtres quelque peu humanoïde ne meurent pas dans la rue avant que la magie divinatoire leur fasse faire demi-tour vers leurs contrées sauvages

Malheureusement, l’inconséquence de mesures gouvernementales crée une difficulté juridique : le droit au logement impose en effet la continuité de la proposition d’hébergement. En théorie, on ne pourrait remettre personne à la rue.  Cela a refroidi les associations, peu financées à l’endroit de ce risque de gestion tandis que des enseignants et des parents d’élèves courageux tentent d’éviter l’irréparable comme quoi  les affreux parias gauchisants colmatent  l’incurie des décideurs.

Jean François CARENCO vient de surmonter admirablement cette difficulté. Dans cette ville, ou la religion fait au moins une colline (et pas une montagne), il s’adresse directement à Dieu et à son cardinal pour obtenir des places à la table divine. Le ringard républicain que je suis pensait que l'esprit républicain  imposait de s’adresser à des structures dont l’identité n’était pas immédiatement confessionnelle (elles pouvaient en être issues mais s’inscrivaient dans des dispositifs et des politiques).

Par son génie visionnaire, le préfet opère un retour vers le futur. Dans le cadre de la séparation des pouvoirs bien compris, il réquisitionne la charité chrétienne et réinvente le concordat. Que tant de créativité débridée  puisse être récompensée par la bénédiction d’une gargouille dédiée à l’impétrant sur le frontispice de la cathédrale Saint Jean, qu’un reliquaire d’un poil de ses moustaches fasse l’objet d’un culte contemplatif. Ces manifestations pourraient être utilement précédées d’une procession aux lumignons qui, de la préfecture rallierait l’archevêché, lors de la prochaine fête des lumières. Alléluia, aïllaicité.  

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