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Billet de blog 22 avril 2013

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« Pour tous », le collet du mariage

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce billet demande un préalable : je soutiens la loi du mariage pour tous ; l’irruption des intégrismes autochtones m’inquiète ; la cristallisation des divers sentiments de dilution, de perte d’identité, symbolisée par ce débat, dans le spectacle du chaos mondial me désespère.

Coder le mariage dans le civil est, en tout cas, est une première indication tant son décodage appartient à l’autel.

Dans son beau roman prémonitoire, l’Amérique, Kafka promettait à son héros du travail pour tous par le biais d’une affiche, l’invitant à rejoindre un cirque : quelle belle promesse, la reconnaissance par la représentation ! La reconnaissance sociale dans l’espace du spectacle prend son essor entre le vrai et le joué, un jeu de piste en quelque sorte.

KAFKA introduit un élément décisif : le travail pour tous donne une marge, un jeu possible entre soi-même et le monde : on se joue du travail dans lequel on joue. Quand on est déchargé de la condition d’obtention, quand la condition de travailleur s’impose comme une évidence (même fainéant)

Le "tous" invite à une rencontre, il appelle à inventer l’autre : tous pour un, un pour tous. Nous voici donc tous un peu mousquetaires, ardents, joyeux moqueurs. Tous ne se prennent pas au sérieux ou sont sérieux avec humour.

Tous ne sont pas mariés non plus ; le mariage pour tous, c’est le mariage pour tous ceux qui le désirent. Cette précision est importante à marteler parce que la cote d’un engagement pour la vie entre deux protagonistes a légèrement baissé en bourse. L’évolution est liée aux indépendances (c'est-à-dire aux dépendances dont il faut se démerder seul) en face des précarités nouvelles qui jalonnent nos existences et personne n’est obligé de rejoindre le cirque.

Le combat pour ou contre le mariage prend place dans ce magma originel. Selon qu’on se repère dans la possibilité ou dans la nécessité, l’incertain ou l’évidence.

Pour tous, c’est comme moi ou c’est avec moi, selon sa nature ou selon sa culture. Le mariage pour tous comme le travail pour tous est donc un pléonasme, un droit universel qui n’appelle pas d’impétrant. Du coup, le mariage pour tous amène les enfants pour tous, le divorce pour tous, la recomposition pour tous. Parlons donc mariage et travail sans chichis avec un point.

Le TOUS touche en effet à la souffrance de l’époque quand il est utilisé sans précaution, avec excès; il est synonyme de PAREIL (et tous pareils,et tous les mêmes)  : grand tueur de différences au profit du consommateur mondialisé et épanoui, le tous qui résiste est un contrat social.

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