Pierre Avril (avatar)

Pierre Avril

Abonné·e de Mediapart

240 Billets

0 Édition

Billet de blog 24 novembre 2012

Pierre Avril (avatar)

Pierre Avril

Abonné·e de Mediapart

Alternatifs : une praxis du présent, une horreur pour la gauche bien pensante.

Pierre Avril (avatar)

Pierre Avril

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les médias officiels, autour de Notre Dame des Landes viennent marteler plusieurs oppositions basiques : la modernité contre l’archaïsme, l’ordre contre le désordre. La proposition visuelle la plus suggestive donne à voir une jacquerie des temps modernes (et  c’est très étrange) : dans un paysage pluvieux, sous la brume, les nouveaux  Robocops donnent des assauts à des barricades (la barricade rurale est une nouveauté pour moi), mettent en pièces des cabanes (jusqu’où  va se nicher l’ordre républicain). La formalisation des images donne à voir des habitats peu normés, des tenues vestimentaires qui s’inspirent peu de la mode. La référence implicite va du côté des films de science fiction après une ordinaire catastrophe nucléaire. Je veux dire par là que tout ceci vise à faire peur et que ce décor mis en image,  est particulièrement évocateur.

Et je trouve qu’une des questions majeures est: qu’est ce qui fait donc si peur au système social et à son pouvoir politique pour théâtraliser à ce point Notre Dame des Landes, la poser comme symptôme absolu des enjeux du moment, comme l’incarnation du mal ? Il faut commencer à constater que la peur en question devient panique.

Je crois qu’en effet, à de nombreux endroits se dessine un virage crédible en face du système libéral : nous ne découvrons pas l’alternative : son histoire solidaire d’opposition, sa volonté de construire d’autres modes d’existence, appuyés sur d’autres valeurs ne datent pas d’aujourd’hui.

 Ses formes peu verticales d’association, ses démocraties souvent bavardes (c’est une qualité quand on voit le mutisme de la technocratie) ont tracé des parcours de vie, des outils de promotion, d’éducation. Elles ont porté aussi quelques désespoirs absolus, fins difficiles, difficultés à lever le camp. Mais l’alternative est têtue.

Sa vivacité actuelle se déploie en mille rhizomes : elle s’enrichit aujourd’hui de la rencontre de deux vitamines particulièrement actives : la nécessité (il faut trouver des chemins pour vivre dans un système qui n’aime pas la vie) et un quelque chose qui s’appellerait un peu désir ou envie (comment construire nos vies, en respect et en attention à l’autre)

C’est donc ça  un des visages du subversif aujourd’hui : ne pas accepter la traçabilité flicante du système, se débrancher, conquérir un temps non exclusivement consacré à la consommation, regarder en  face l’environnement et l’être humain, se donner du choix.

Mais, ce qu’il y a de profondément attristant aujourd’hui, c’est l’agressivité sans nom du pouvoir social démocrate, haineux, mauvais à l’endroit de ces contestataires qualifiés de kyste. Kystes, des jeunes (beaucoup surtout) qui s’essayent à autre chose. Quelle honte de parler comme ça.

On le savait Monsieur Valls ne portera pas des dread locks, Jean Marc Ayrault n’habitera jamais dans une yourte. Mais nous aurions pu penser un court instant que, face au poids du présent, ils n’aillent pas rejouer Mai 1968, du côté matraqueur, version avionneur.

Le vieux machin vers quoi je tends aujourd’hui regarde avec curiosité et admiration cette quête d’un mieux vivre.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.