On parlera ici de la cruauté attribuée à l’autre lointain, les indécentes autres couleurs de peau : la terreur du cannibalisme, la peur de finir dans la casserole, l’illusion de devoir l’apprivoiser.
On parlera ici du déprimant même : les mêmes presqu’iles de la consommation au bord des sorties d’autoroutes avec leurs enseignes communes et tapageuses
On parlera ici du dédouanement généralisé : celle d’une société, qui se regarde le nombril avec ostentation en pensant que le miroir est son nombril.
On parlera ici de la sentence de barbarie infligée de l’humanité, la sentence étant la privation d’humanité au bénéfice de la consommation.
Mais ne soyons pas trop injuste : notre société n’est plus un bien commun : notre société reconnait seulement ses élites et ses médias : Le privilège de se gaver du pouvoir et d’en célébrer les louanges.
Une bonne partie d’entre nous ne sont plus la société, ils en sont des éléments de la décoration intérieure.
Mais nous tenons notre revanche : Avant, toute expédition pour anéantir l’étranger suscitait un enthousiasme délirant ; on les aura, on se regroupe, on chante ensemble, nous sommes nous, ils ne seront pas eux bien longtemps
Aujourd’hui, le sang nous intéresse mais plus les divers imaginaires qui y sont attachés et son avenir glorieux : Cet avenir nous emmerde. L’exaltation des élites nous fait ricaner et ses imprécations angéliques nous agressent : quoi, nos trois millions de chômeurs, nos cinq millions d’exclus, nos jivaros comportements ne rêveront plus de la libération de GAO.
L’abstention progresse, l’exécutif baisse, il n’y a plus de saisons.