Je roulais partout dans la ville, dans ma petite auto jaune, quand m'est venue cette idée lumineuse, qui éclaira la sombrosité de ma journée morose, comme disait mon copain Morosini, au lycée de Versailles. Je voulais intituler cette piéce de monnaie ("billet" serait certes excessif) : "Le début du moi", en hommage à Dominique B. , qui brille dans ce genre d'exercice. Mais craignant de ne pas parvenir à seulement luire, et encore moins reluire gravement à la Santé, j'ai préféré ourler la houpette, en hommage au petit frére d'un joueur de violon de Montréal, Qué. Can. blues, qui jouait des cuilléres. Le petit frére, pas le joueur de violon. Le joueur de violon, lui, il jouait du violon, pas des cuilléres. Sinon je l'aurais dit joueur de cuilléres, pas de violon. Or il se trouve qu'il jouait du violon, je ne vois donc vraiment pas pourquoi je ne l'aurait pas nommé joueur de violon. J'aurais pu dire "violoniste", me direz-vous. Je préfére "joueur de violon", parce qu'on ne dit pas "cuillériste". Mais je m'égare en créneau, parce qu'il s'agit de quelque chose de bien plus important que les cuilléres, les créneaux, les violons. Et même les houpettes. Il s'agit de moi. En fait il s'agit du début du moi. C'est pour cette raison que je voulais intituler cette piéce de monnaie : "Le début du moi", et non pas "Ourle la houpette". Mais craignant de ne pas parvenir... ... non. Ca çédille je l'ai déjà dit.
Donc, dans vingt jours, c'est le début du moi. En fait, comme nous sommes déjà le trois octobre -c'est fou le temps que ça prend, d'essayer de vous expliquer de quoi il s'agit- le moi commence dans dix-sept (17) jours. Dans dix-sept jours, donc, c'est mon moi. Qu'est-ce à dire? (et pas seulement à Saint-Emilion ou à Mâcon.) C'est à dire que ce sont mes mois à moi qui commencent en beauté pour finir l'année qui a fui lamentablement, même si je n'ai pas toujours pleuré à table ni menti au dessert. Je dirais même, si José était là, que cette année a fui lâchement, abandonnant tout courage devant le temps qui passe, et pas seulement à table, mais au jardin aussi.
Mais c'est moi qui dit que c'est mon moi. Les autres mois, je vous les laisse. A moi, les chutes de feuilles d'impôt, et pas toujours au feu. A moi, les rillettes et les je d'enfant dans les chambres surchauffées. A moi, les chataignes et les pains, les marrons et les prunes. A moi, les zigs et les puces. A moi, compte deux mots, connais-tu bien don Diégue?
Mais "à moi" épuise "est". Je vais donc plutôt ourler la houpette.
C'est d'ailleurs bien pour ça que j'ai intitulé cette piéce "Ourle la houpette", parce que, d'une certaine façon, c'est aussi la fin du moi.
Et pas tellement le début, finalement.