Monsieur,
au bout du tunnel de la nuit de l'absence, au matin, avant le point du jour, alors qu'on est encore dans la nuit obscure, il y a une qualité de frémissement de l'air qui fait que l'on sent que le jour va se lever, et que nous allons reprendre la marche hors du grabat où nous gisions.
Ce texte se voudrait l'expression de ce moment-là. Plein des brumes de l'adolescence, il voudrait rejoindre les flots de l'océan immobile sous les saisons qui passent. Il le voudrait : sa volonté n'est pas grand chose. Il est si jeune encore, et si infatué de lui-même, et malhabile. Pourtant, je ne voudrais pas avorter de mon enfant premier né, même si je lui préfére déjà un autre dont la gestation m'alourdit.
Cependant je ne crois plus, je ne sais plus si, d'un point de vue moral, ce tissu a le droit d'être lu sur la place publique : orgueil et énergie dévoyée, apathie, amoralisme ; comment pourrais-je, de moi-même le faire connaitre?
Je vous l'adresse en espérant que vous voudrez bien me dire ce qu'il faut en penser.
Monsieur,
m'est-il permis de vous adresser ce texte? Je ne peux guére rester plus longtemps dans le silence sans courir le risque d'étouffer. Dans la solitude morale où je me trouve (en la seule présence d'une Présence lointaine que je ne peux évoquer que dans la crainte et le tremblement) je ne peux m'adresser à autrui que dans l'espoir (l'attente qu'il me réponde (que dans ce "il" Il me réponde, peut`-être), que je lui réponde, et que de ces réponses puisse se former le "repons" du choeur que nous devrions être (Que d'une certaine maniére nous sommes, peut-être, même si c'est malgré nous, malgré nos déchirements, malgré l'énergie qui nous secoue parce que nous avons tant de mal à renouer avec les rites qui sacrifieraient notre violence).
Ce texte ne voudrait, en apparence, être que cela (apparemment, si dans l'humiliation ne naissait l'orgueil ; proprement : la férocité, ce qui de nous n'est pas émondé) ; l'occasion de, peut-être, tisser des liens. Mais ceci, ce n'est pas à lui ni à moi d'en décider. Il a, en tout cas à se risquer à la lecture, ne serait-ce que d'une personne.
Monsieur, madame,
permettez-moi de vous adresser ce texte que j'ai cru pouvoir intituler "Duelle (l'ouest l'est)".`
Duel dans la lumiére du soleil couchant, à l'ouest, à l'occident. Duelle, la lumiére d'ouest, où l'un n'apparait qu'à peine, disparait, réapparait dans la nuit naissante, puis dans la lumiére renaissante, et continue à être dans ce qui l'a en lui et dans ce qu'il a en lui.
Duelle, la lumiére (l'est) dont le grain disparait de l'autre côté, ne disparait pas ; occise, occluse et incluse, elle est "cela-qui-est".
Le soleil se couche, et dans la nuit qui s'établit on peut voir en haut briller les étoiles et en bas luire les flammes des chandelles qui brûlent du feu qui ne se couche jamais.
La nuit est profonde, c'est la mi-nuit, et au coeur de la matrice un jour s'enchaîne au jour, une renaisasnce se prépare et s'accomplit (Il ressurgit: resurexit).