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Billet de blog 8 avril 2022

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L'essentiel, c'est de servir

Nous sommes nombreux à mener nos vies par des compromis entre une volonté de servir nos proches ou nos moins proches, et celle d'être servis correctement par la vie. Servir est une valeur commune et une part importante de nos vies.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cette valeur ancienne, qu'on trouve à droite comme à gauche depuis bien longtemps, est ce qui fait fonctionner nos sociétés. C'est la base de la refondation de notre pays après guerre. C'est l'essence de notre vivre ensemble aujourd'hui, et c'est l'atout principal que nous avons eu face au Covid.

Quand l’hôpital a été débordé par le nombre et la gravité des cas, par les réanimations massive et les morts, ce sont les opérationnels qui ont pris les choses en main, avec j'espère l'aide d'un partie de leur encadrement administratif dans le rôle de support qui doit être le leur.

Mais avant ça, les soignants de l’hôpital ou de la médecine de ville ont depuis longtemps pallié les insuffisances du système en prenant sur eux et en donnant plus que ce qu'on pourrait leur demander, par conscience professionnel et sens du service.

Mais les enseignants aussi débordent de leur case administrative pour faire au mieux,et donnent de leur personne et de leurs moyens pour faire ce qui leur semble nécessaire, malgré un soutien très insuffisant de l'éducation nationale, voire une certaine hostilité bureaucratique.

Et la justice ? Les greffiers ? Comptent-ils leurs heures ?

Et la police ? A part le sens du service, qu'est qui peut pousser des gens à choisir ce métier.

Ces ciments de la société dans laquelle nous vivons tiennent parce que ceux qui ont choisi ces voies veulent servir. Et servent, quoi qu'il leur en coûte.

Bien sûr il y a des contre-exemples, très voyants, mais la société tient malgré tout grâce à ceux qui servent envers et contre tout. Tant qu'ils tiennent.

Et au delà des services publiques, qui assurent notre vive ensemble, toutes les entreprises, toutes les communautés reposent au moins autant sur ceux qui se mettent au service des autres dans les taches qu'ils assument, que dans les héros des temps modernes qui "crée" l'emploi.

Il ne s'agit pas de dire que les entrepreneurs, les chefs charismatiques, les génies uniques sont sans valeur, sans mérites. Il y a de quoi avoir de l'admiration pour ceux qui remuent des montagnes pour changer les choses en grand. Mais clairement aucun empire industriel n'aurait été monté par le même "surhomme" né dans une tribu préhistorique il y a 30000 ans.

Cette valeur de service a longtemps été partagée par la droite et la gauche, même si à titre individuel la plupart des dirigeants n'oubliaient pas leur intérêt. D'ailleurs c'est vrai probablement de nous tous. Nous faisons des compromis entre notre désir de servir et notre désir de ne pas être oublié dans la distribution, chacun à notre manière.

Mais ce n'est plus très en vogue. Et notre mythologie commune accorde peut-être plus de prestige à ceux qui se servent qu'à ceux qui servent.

C'est regrettable à la fois parce que ça rend notre société moins juste en générale et moins heureuse à titre individuel, mais aussi bien moins efficace.

Aussi riche qu'on soit, on a besoin que des gens aient étudié la médecine, que des chercheurs trouvent de nouvelles solutions techniques à nos problèmes, de pouvoir compter sur une justice rapide et juste, une police fiable, bref de tous le reste de nos concitoyens.

Le service commun est à l'os dans beaucoup d'aspect de notre société, et les économies que nous faisons dessus nous appauvrissent depuis longtemps et continueront à le faire si nous ne changeons pas d'orientation.

Je ne voterai pas pour une héritière qui vivote sur l'épicerie rance laissée par son père, et qui traine derrière elle tout un tas de barbares persuadés que la force fait loi.

Je ne voterai pas pour un affairiste raté et bien mal entouré, qui a réussi un hold-up sur notre démocratie malade, mais n'a rien d'autre à proposer que du bullshit-management tandis que notre argent lui file entre les doigts sans beaucoup de discernement. Et qui est persuadé aussi que la force fait loi.

Je vais voter pour un vieux cheval de retour, douteux par bien des aspects, mais admirable par bien d'autres. Et qui a le sens du service, qui est entouré d'une équipe jeune, et appuyé sur un programme réfléchi.

Ça ne sera qu'une étape dans un long processus de reconquête de notre avenir, et cette équipe va probablement me décevoir en chemin. Un certain nombre d'égos vont se pousser du col et nous faire perdre du temps. Mais au moins on aura pris un embranchement favorable, et la société de ceux qui servent aura une chance de faire valoir ses idées, ses valeurs, et de changer le monde en mieux.

Dimanche je vote Mélenchon, parce qu'il est un pas dans une bien meilleure direction que les deux autres, même si la route sera sûrement encore longue et tortueuse avec et après lui.

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