Il n’est pas de jour maintenant sans qu’un partisan des « Fonds de pensions » intervienne dans le débat. Évidemment, c’est pour eux une fantastique aubaine de s’ouvrir un marché tout fait et probablement subventionné via des déductions fiscales (qui ne sont pas un coût comme chacun sait….). Si les défenseurs des régimes obligatoires par répartition le font, c’est uniquement parce qu’ une retraite obligatoire de haut niveau leur paraît être la meilleure protection contre le risque vieillesse, et ce pour toute la population, et pas une solution seulement pour les plus aisés.
Eux, ces défenseurs de la Répartition, ne gagneront rien.
Les frais des systèmes de Fonds de Pensions sont souvent extrêmement lourds, notamment les Fonds en Unité de compte, avec des frais à tous les étages, l’administration ad hoc essayant d’une part, que ces frais ne soient pas prohibitifs, d’autre part que soient connus, tous les frais, connus des souscripteurs et du public, ce qui n’est pas une mince affaire.
On a vu ce que valait l’argument démographique, répété sans arrêt, contre la « Répartition ». La productivité du travail peut pallier une part large du déclin démographique, et si la Répartition est touchée par le déclin démographique, la gestion financière des Fonds de pensions aussi !
La rente
Il apparaît que soit les promoteurs des Fonds de Pensions ne savent pas (ou font semblant) ce qu’est une « Rente », pourtant indissociable de la notion de retraite par capitalisation, soit confondent, volontairement ou non, Epargne et Retraite.
Pour déterminer une rente, servie jusqu’à la fin de la vie, il est nécessaire de partir d’un « capital » donné, d’une espérance de vie à l’âge d’obtention de la rente, du taux d’intérêt utilisé dans le calcul (dit taux d’actualisation). L’administration impose une table de mortalité, qui évolue avec les années, pour le calcul de l’espérance de vie, et un taux d’intérêt (d’actualisation) maximal réglementaire par rapport aux taux d’intérêts en cours. Ce taux ayant été proche de 0 quand les taux d’intérêts sont devenus nuls voir même négatifs.
Il est à cet égard intéressant de regarder le tableau suivant :
Coût d’une rente viagère immédiate sans réversion de 1€ à partir de l’âge de 65 ans
Table de mortalité utilisée : TV 73/77 TV88/90 TPRV93 TF05
Taux d’intérêt (d’actualisation) (utilisé dans le calcul de la rente)
5,0 % 10,9 11,9 13,5
4,5 % 11,4 12,4 14,1
2,5% 13,5 15,0 17,6
1,0% 15,6 17,5 21,1
0,5 % 16,4 18,6 22,5
0% 17,2 19,6 24,1 27,4
Même si aujourd’hui, pour plus de précisions, ce sont les tables par génération TGH et TGF 05 qui sont, entre autres, réglementairement utilisées, on voit très bien que de 73/77 à 2005, le coût d’une rente à vie a augmenté de 27,4/17,2 soit de : 59 % !!!!
Mais qui sont ces thuriféraires des Fonds de Pension qui oublient cet élément fondamental : le coût d’une rente suit l’évolution de l’espérance de vie, et bien sûr ils « oublient » de le dire dans leurs propos ….Alors ?
On voit aussi que si le taux utilisé pour le calcul de la rente est de 2,5 %, le montant de la rente sera de 15,0 ; si le taux utilisé est de 0 %, le montant de la rente passe à 19,6 . 30 % de plus ; le capital nécessaire faisant de même !
En outre, pour revaloriser de 2,5 % une rente établie avec un taux dit d’actualisation de 2,5 %,, il faudra obtenir un taux d’intérêt de 2,5 % + 2,5 % = 5,0 % !…. Et donc, pour revaloriser comme l’inflation au moins, comme les salaires au mieux, cela ne sera pas forcément évident….
Disent-ils cela en promouvant les Fonds de Pensions
Variabilité des Fonds de pensions et crises financières
La grande majorité des investissements des Fonds de Pensions est opérée en Actions.
La variabilité forte de ces investissements, variabilité au demeurant naturelle, est alors « oubliée » ou largement sous estimée. Notamment sur la durée...N’oublions pas que la retraite d’un humain d’une quarantaine d’années commence environ 20 ans plus tard et dure plus d’une vingtaine d’années….
Si le passé n’est pas une indication pour l’avenir (comme la réglementation impose d’écrire quand les vendeurs d’investissements font de la publicité sur leurs produits), une large partie du résultat dépend de la date des investissements. Heureusement s’agissant de retraite, les placements sont naturellement échelonnés dans le temps. Cela étant , les placements sont, le plus souvent, groupés dans des Fonds qui investissent des « masses » pour des raisons d’efficacité et de réduction des coûts. N’oublions donc pas qu’un placement effectué la veille du « jeudi noir »(1929) a mis 25 années pour retrouver sa valeur, juste sa valeur ! 25 ans !….
Les crises financières, qu’elles soient françaises, européennes , ou étrangères, d’un grand pays comme les Etats-Unis ont un impact souvent immédiat mais toujours durable sur la valeur des investissements en cours.
Par exemple, si en l’an 2000 la valeur du CAC 40 était de l’ordre de 7000 points (6944 points le 04/04/2000), il cotait 2401 points le 12/03/2003 soit 65 % de moins ! C’était la bulle internet !
Des crises financières connues, par exemple en 2008 la crise des « subprimes », qui pourtant ne concernait en principe que quasiment les EU, ont eu un effet spectaculaire : de 6000 points en 2008, (6168 le 1/06/2007) le Cac40 passait à 2519 en mars 2009…….Soit 55 % de moins...
En 2020, crise du Covid, il passait de plus de 6000 points (6111 le 19/02/2020) à moins de 3800 points un mois plus tard (3754 le 18/03/2020) … soit 39 % de moins….
Aujourd’hui le Cac 40 cote aux alentours de 8000 points, il valait 1000 le 1° janvier 2008.
(Pour mémoire, cela correspond à un taux d’intérêt composé de 5,8 %.)
S’agissant de Retraite (et non d’Epargne), on constate qu’il n’est pas facile de prélever d’un Fonds de Pensions des sommes fixées à l’avance, qu’il s’agisse d’ un capital ou de versements de pensions. Il est donc nécessaire de prévoir des réserves….
Pour la gestion financière des Fonds de Pensions :
-on peut utiliser des instruments de taux comme les obligations, mais celles ci baissent en valeur quand les taux montent ou au contraire montent quand les taux baissent sauf à l’échéance de ces titres où la valeur est celle fixée au départ,
-on peut utiliser des actions mais on connaît leur variabilité…
Et, pour fonctionner, et revaloriser les rentes comme l’inflation (au moins), ou comme les salaires (au plus), pour pallier l’évolution de l’espérance de vie, entre autre, pour pallier les variations des taux d’intérêt, il faut que les fonds du Fonds de pensions ou les fonds de l’Assureur soient solides et importants pour qu’il n’y ait pas faillite.
Concernant les Fonds de Pensions, nombre de faits importants, donnent lieu à peu d’informations (voire aucune). Il est vrai que les Français sont peu concernés puisque justement les Fonds de Pensions sont peu développés chez eux. Par exemple, les faillites de Fonds de Pensions dont l’instauration devaient changer la vie en Amérique du Sud ! Ou plus récemment, il y a quelques mois, la grande peur des Fonds de Pensions anglais sauvés par la Banque Nationale…..peu de commentaires dans les médias….ou même aucune information…. médias qui n’arrêtent pourtant pas aujourd’hui de parler de Fonds de Pensions ou de Capitalisation.
(A suivre)