Le débat sur la Retraite est relancé.
Il est vrai que jusqu’à présent, c’est souvent le n’importe quoi qui a prévalu.
-E Macron s’était mis hors jeu de lui même, dans un premier temps, en prévoyant de supprimer à l’Agirc la Tranche C et les 3/4 de la Tranche B, ce qui provoquait immédiatement un déficit de plus de 40 Md……Puis il a placé la Caisse de Retraite des Médecins en déficit, puis il a prévu plusieurs primes sans cotisation retraite….
- Par exemple, plusieurs interviewés, « des importants », égrenaient années après années les déficits du « système » en fonction du PIB jusqu’à ce que l’on s’aperçoive que le PIB dont ils parlaient était celui de l’année du discours et que ce PIB ne bougeait pas….à la différence des déficits….
-Aujourd’hui, c‘est F. Bayrou qui assimile, semble-t-il, sans le dire, dans le « système » Retraite, tout ce qui n’est pas « cotisations » à des déficits……Etc…Etc …Comme les conclusions des rapports ne lui convenaient pas, alors il balance des déficits....
Sans rentrer dans le débat politique on s’efforcera d’apporter quelques aspects techniques importants.
>>La notion de « système Retraite » tout d’abord.
Un système est normalement quelque chose d’organisé. Or, ce n’est pas le cas de l’ensemble des Retraites en France, il y a des « Régimes » qui sont eux des systèmes -organisés-, avec une gestion technique à long terme, avec de possibles réserves, dans lesquelles sont versés les excédents et puisés les déficits, tels les Régimes de Retraite des salariés du Privé. Et il y a des « ensembles de réglementations » tel celui de la Fonction Publique d’Etat pour lesquels le Code des Pensions Civiles et militaires précise que l’État paye les pensions de Retraite, comme il paye les salaires, et celui des collectivités locales –et hôpitaux- opéré dans le cadre d’une Caisse ( CNRACL), la seule fonction de cette caisse étant d’appliquer le code des pensions civiles et militaires, comme la FPE.
>>Le nombre d’ « ensembles » de retraite en France.
E Macron et d’autres avaient mis l’accent sur les très (trop) nombreux « ensembles » de retraite français (il y en aurait 42).
Les régimes de retraite des salariés du privé, ( le Régime de base CNAV, dont les « dépenses » (on dirait plutôt prestations...) représentent 5,7 % du PIB), et les Régimes complémentaires AGIRC/ARCO (3,3%), les « Retraites » des fonctionnaires : FPE (2,1%), et celui des collectivités locales (et hôpitaux) CNRACL) (1%) représentent ensemble, en 2023,
80 % des« dépenses» totales retraites.
Cela E. Macron et d’autres ne le disaient pas.
En y rajoutant les « dépenses » du FSV (0,7 % du PIB) -un fonds destiné à couvrir des situations spéciales- : ces « Retraites » des salariés du Privé et Fonctionnaires représentent plus de 90 % des dépenses totales !
Les « dépenses » pour tout les ensembles de retraite atteignent prés de 14 % du PIB.
Point n’est donc besoin pour avoir une bonne idée du « déficit » de tous les ensembles français de Retraite de passer en revue les 42 ensembles -ce qui n’est bien sûr pas une raison pour ne pas le faire…
>>Que disent les rapports du COR (2023 Pdt P.Bras et 2024 Pdt G.Cette) ?
Dans leurs conclusions ( 2023 page 97, 2024 page 89) :
-que les dépenses dans le temps ne dépassent pas le niveau actuel (14% du PIB) après quelques soubresauts ces toutes prochaines années
-que les dépenses décroissent dans le temps
-que les ressources décroissent dans le temps mais un peu plus vite
-que l’ensemble est légèrement déficitaire, déficit en croissance, ces prochaines années.
Ceci, tant dans le rapport 2023 que celui de 2024, graphiques à l’appui.
En particulier :le rapport 2024 page 89 : « Si la part des dépenses diminue, la part des ressources baisse plus encore »
Les deux rapports aboutissent quasiment aux mêmes conclusions.
(Il est d’ailleurs très étonnant que journalistes et politiques n’aient pratiquement pas communiqué sur ces points. Cela mériterait une enquête approfondie.)
Mais, on ne peut prendre des décisions importantes avec ces conclusions !
>>Les difficultés dues aux « Retraites » fonctionnaires.
Les rapports du COR jusqu’à 2023 prennent, pour simplifier la présentation, deux « conventions » pour les ressources mais cela trouble largement la vision du système. Le rapport de 2024 ne présente plus qu’une seule convention mais ne dissipe pas pour autant le malaise.
En fait, on ne peut pas ajouter -des « ensembles » pouvant avoir des réserves ou des déficits selon les exercices (qui sont donc des « Régimes de Retraite) et des « ensembles » qui par construction n’en ont pas, comme ceux régis par le code des pensions civiles et militaires.
Techniquement d’ailleurs ils ne relèvent en rien de la même catégorie, les Régimes des salariés du privé :(CNAV et AGIRC/ARRCO) fonctionnent en Répartition. Les retraites des fonctionnaires FPE et CNRACL sont des « Pay as you go »systèmes, comme disent les anglo-saxons, (qui croyaient généralement d’ailleurs que tous les ensembles en Répartition fonctionnaient en « Pay as you go ».
Un élément, en particulier, est préoccupant : les prévisions par l’État du nombre de fonctionnaires dans le temps et celle de la valeur du point d’indice apparaissent erratiques.
Par exemple, 4000 postes d’enseignants seront-ils créés ou supprimés ou maintenus ? On a aperçu la suppression de 1000 postes pour l’ONF…...
Un nombre important de postes fonctionnaires ont été supprimés ces dernières années. Des primes remplacent souvent un élément de traitement, (cet aspect étant très variable suivant les métiers effectifs exercés).
Les fonctionnaires de l’éducation nationale n’ont pratiquement pas de primes non incluses dans le traitement alors que dans certains ministères ces primes, non intégrées au traitement, sont très importantes.
Pour pallier aux critiques, l’État a créé un Régime de Retraite fondé sur ces primes (dans une certaine limite), le RAFP, (Régime Additionnel de la Fonction Publique)
Créé en Répartition provisionnée (ce Régime n’étant pas pérenne et ne reprenant aucun service passé doit, à l’intérieur des ses réserves, constituer les provisions mathématiques nécessaires, qui garantissent, en principe, les prestations retraites à verser, au-delà de la durée du Régime). Ce Régime aurait ensuite été catégorisé en « capitalisation » par Bruxelles……
Les rapports du COR n’ont pas jugé souhaitable alors de l’additionner avec les autres systèmes. (Ils avaient cependant additionner des systèmes en « répartition » et des systèmes en « pay as you go »…..).
L’État peut ainsi bloquer peu à peu les traitements et augmenter les primes soumises au RAFP...Or, diminuer la masse cotisable crée, en revanche, des déficits pour la FPE …
De même au lieu de recruter des fonctionnaires, l’État peut recruter (sous certaines conditions bien sûr) des « contractuels » dont le Régime de Retraite est l’Ircantec (semblable dans son fonctionnement à l’Agirc /Arrco). Il peut ainsi réduire la progression des effectifs cotisants dans les systèmes fonctionnaires...ce qui peut conduire à des déficits pour la FPE…..
Cela étant, on voit bien que si l’État réduit le nombre de ses fonctionnaires, il réduit son déficit immédiatement. En revanche,
il diminue les cotisants à la Retraite FPE par exemple et peut créer -à terme, plus tard,- un déficit qui impactera le budget…..D’où, sans doute, ces prévisions……
L’État et Bercy en particulier peuvent ou pourraient donc « subir » ou au contraire « jouer »sur ces différents aspects. Cela est pour le moins malsain.
Notons que le Patronat privé n’a jamais voulu cohabiter dans des structures Retraite avec des représentants de l’État, pour ces raisons entre autres.
>>Quelle « cotisation » pour la Retraite fonctionnaire FPE ?
Le code des pensions civiles et militaires est très clair, l’État paye les pensions. Il n’y a pas besoin de cotisations en tant que telles, et les cotisations salariales, à charge directement des fonctionnaires, déduites de leurs salaires bruts, ne sont simplement reversées nulle part puisque c’est l’État qui paye les pensions.
Nombreux sont ceux, dont les "experts" autoproclamés, représentants cachés ou non de gestionnaires financiers, qui racontent en fait, n’importe quoi sur les « retraites » des fonctionnaires.
« L’État surcotise d’ailleurs pour ses fonctionnaires », F. Bayrou l’a dit récemment, des journalistes ainsi qu’une note du Haut Commissariat au Plan aussi. Or ce sujet a été traité dans le rapport du COR 2023 page 112, la note du HCP traitée page 101 avec l’analyse partie 4-2.
En particulier, page 112 « Après ces différentes corrections, alors que les taux légaux affichés sont bien supérieurs pour les
fonctionnaires de l’État à ceux des salariés du Privé, les taux de prélèvement dans le Public et dans le Privé apparaissent équivalents. Un écart plus substantiel subsiste entre salariés et indépendants »….Sans commentaire…..
Pour certains, ces Retraites fonctionnaires sont ultra déficitaires, pour d’autres non !
Il serait quand même normal et respectueux des français que toute la transparence soit faite sur ces Retraites. Car il ne peut être question que l’État se serve des Retraites Fonctionnaires pour faire évoluer et ses propres ensembles et le Privé.
Les « Retraites » Fonctionnaires, les salaires, le point d’indice relèvent, ou devraient relever, de discussions entre l’État et les syndicats de Fonctionnaires.
Même si, politiquement, cela peut poser problème, il faut donc analyser, techniquement , les retraites des salariés du Privé d’une part et le Public de l’autre.
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