Lors des dernières élections présidentielles, le système de retraite français a constitué un sujet majeur pour quelques uns des candidats.
François Fillon voulait absolument repousser l’âge légal ordinaire de prise de la retraite pour éradiquer enfin le « déficit ».
Emmanuel Macron voulait, et veut toujours, mettre sur pied un nouveau système pour tous, copié sur le système « notionnel » suédois.
Tout à fait étonnant puisque le système français de retraite, en tous cas pour les salariés du privé, (CNAV Arrco ) était ou allait être équilibré, et seuls les aspects dus au chômage, par exemple le Fond Spécial Vieillesse pour le régime général, posaient un gros problème, le taux de chômage étant à 9,5 % alors que les régimes des salariés du privé fonctionnent avec un taux de chômage fixé théoriquement à 4,5 %.
Si il y avait aujourd’hui un taux de chômage de 4,5 % seulement ces régimes seraient équilibrés . Il a fallu l’astuce du Conseil d'Orientation des Retraites, dans son dernier rapport de juin 2017, au prétexte que l’on ne passerait certainement pas en une seule année, d’un taux de chômage de 9,5 % à un taux de 4,5 %, de prendre un certain nombre d’années de décroissance du taux de chômage pour rendre ainsi le système déficitaire et la vérité invisible.
Le COR cachait ainsi aux Français un point de repère fort et simple :
sans le chômage, les retraites obligatoires des salariés français seraient bel et bien équilibrées !
Une modification des règles de ces régimes, par exemple un report de l’âge légal de retraite, ferait d'ailleurs apparaître un formidable excédent en cas de recul du chômage. Ce recul du chômage qui est bien pourtant la volonté du gouvernement, qui est bien la raison d’être des mesures libérales instaurées par ordonnances pour le code du travail.
Déjà il apparaît tout à fait étrange, pour des gens sensés, de prescrire des remèdes qui ne correspondent en rien à ce dont souffrent les régimes.
Nombre de spécialistes, non aveuglés par des idées préconçues, ou leurs idéologies, ou la volonté de faire passer leurs idées par tous les moyens, s’étonnaient de cette préoccupation « Retraite ». Ils la mettaient notamment sur le compte de la puissance des lobbies des assureurs ou des banquiers (Bernard Spitz, Président de la Fédération Française des Assurances, et le faisant savoir publiquement à de nombreuses reprises, ne s’est pas caché de militer pour l’élection de Macron). Ou encore d’une volonté de profiter de la désinformation systématique faite, volontairement ou non, par la quasi totalité des médias sur le sujet, pour profiter du « marché »ainsi ouvert par le recul de la retraite publique et placer leurs produits financiers si juteux en frais de gestion.
Il est vrai qu’il y a déjà quelques années, un fait aurait du attirer plus l’attention. Le Fonds de Réserves des Retraites (FRR) avait été très largement réduit et utilisé à une réduction de la dette sociale au lieu d’être utilisé comme Fonds pour le chômage. Une bêtise financière, (réduire une dette quand son taux est très bas !) bien curieuse, pour des gens se targuant en général d’être des « sachants » financiers. Mais ainsi, et c’était probablement le but recherché, le système retraite français, y compris les aspects chômage que l’on ne voulait donc pas traiter mieux, apparaissait déficitaire !
Mais un économiste bien connu, le très libéral Patrick Artus, travaillant pour la banque Natixis, a fini par vendre la mèche (1).
Compte tenu des promesses fiscales faites aux entreprises et aux « riches », le seul lieu où existe une possibilité de « récupérer » des milliards pour faire baisser la « dépense publique » est le système de retraite français, surtout qu’il est largement supérieur en prestations à la moyenne de l’Union Européenne.
Faire baisser les « dépenses » dites « publiques » de retraite, sous une forme ou une autre, ( réductions des prestation et/ou report de l’âge légal) tout en gardant, bien sûr, une partie des ressources va-t-il être alors le jeu du gouvernement actuel ?
C'est ce que propose en tous les cas Patrick Artus dans sa note.
Pauvres salariés pris pour des imbéciles, gentils assureurs privés nourris par la main du chef de l’État.
__________________________________
(1)Notes de Patrick Artus Flash économie Natixis N° 1029 11 septembre 2017 : France : il paraît difficile d’échapper à une réforme des retraites et à des privatisations importantes.