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Billet de blog 28 décembre 2014

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

FAITS DU LOGIS A Puidoux, les contrôles policiers se déroulent toujours au même endroit : sur les places de parc privées d’un restaurant acheté par un patron kosovar. Mais quel hasard…

A Puidoux (VD), dans la vie de Gani Kastrati, il y a eu un avant et un après «Logis du Pont». Avant de racheter ce restaurant, il était le plus honnête des hommes aux yeux de cette toute petite collectivité. Arrivé en Suisse depuis le Kosovo voici 33 ans, Gani Kastrati, s’est révélé un bosseur. Chauffeur, il est connu de tous les petits vieux du coin à qui il livrait quotidiennement des marchandises. Puis, il diversifie ses activités dans la construction, la vigne, ou la vente de voitures. Il devient ami et collabore avec l’ancien patron du «Logis du Pont». Lorsqu’il emprunte de l’argent, il met un point d’honneur à le faire auprès de La Raiffeisen locale. Et puis, voici trois ans et demi, Gani Kastrati rachète le «Logis du Pont».

Un joyau de la culture locale qui passe en mains kosovares ? Les rumeurs se mettent à circuler.

Un joyau de la culture locale qui passe en mains kosovares ? Les rumeurs se mettent à circuler. De gentil garçon intégré, Gani Kastrati devient un vil trafiquant de drogue. S’il engage une serveuse, elle fait aussitôt partie d’un réseau de prostituées ! Les «petites» tracasseries administratives suivent.

Contrôles à gogo

On vient lui chercher noise pour un rien. Il se prend un contrôle fiscal sur dénonciation. Mais surtout, Gani Kastrati voit les contrôles de policiers se multiplier devant le «Logis du Pont». En trente ans, il n’en avait jamais remarqué à cet endroit précis, à savoir les deux parkings privés, devant son établissement. «Normalement, lorsque nous nous mettons sur un parking privé et que son propriétaire nous dit de partir, on s’excuse et on ne revient plus », nous dit cet ancien membre de la police cantonale.

A Puidoux, il n’y a eu aucune excuse mais surtout les dignes représentants des forces de l’ordre sont revenus. Et pas qu’un peu. En 2013, il y a déjà eu pas moins de trois contrôles menés par la police intercommunale que la gendarmerie cantonale. Immanquablement devant le «Logis du Pont». Arrive ce qu’il doit logiquement arriver. La réputation des lieux se prend du plomb dans l’aile. A force de voir les gendarmes faire le pied de grue devant le restaurant, on se dit qu’ils doivent intervenir à l’intérieur. Qu’il y aurait des bagarres… Depuis que Gani Kastrati gère les lieux, c’est plutôt le calme qui règne dans le restaurant. Les dommages ne s’arrêtent pas là. Après avoir soufflé dans le ballon, deux clients ont perdu leurs permis. Un autre, à pied, a dû aussi subir un test d’alcoolémie et s’est pris une amende. Tout ça parce qu’il demandait aux policiers pourquoi ils étaient garés sur un parking privé, aux heures de grande affluence pour le «Logis du Pont».

Ce n’est pas qu’on ne t’aime plus, mais…

Question posée, les autres restaurants de Puidoux qui, eux, louent leurs places de parc à la commune, ne voient pas les policiers titiller leur clientèle devant chez eux. Les effets d’une telle présence réitérée sur la fréquentation du «Logis du Pont» se font sentir. Les habitués n’en sont plus. Ils passent devant chez Gani Kastrati sans s’arrêter. «Ce n’est pas qu’on ne t’aime plus, mais…», expliquent-ils.

« Pas pour soulever la poussière »

Lorsque le patron demande aux gendarmes de quitter son parking privé, ils obtempèrent sans réellement se presser. En recoupant les informations et en appelant la cellule d’intervention de la Blécherette, Gani Kastrati a découvert que ces contrôles se faisaient sur la demande de Jean-Paul Favre, municipal de Puidoux en charge de la police administrative. Une explication de vive voix s’est soldée par un bouclage de téléphone au nez par Jean-Paul Favre. Contacté par mail – les écrits restent toujours – ce dernier n’a pas répondu à nos questions. Quant à Gani Kastrati, les yeux dans les yeux, il vous assure fermement : «Si je me lance là-dedans, ce n’est pas pour soulever la poussière !». Ah oui, Gani Kastrati a pris depuis plusieurs autres années la nationalité suisse. Via son avocat, le dossier va être mené propre en ordre…

Joël Cerutti

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