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Billet de blog 11 novembre 2010

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Demain, promis, je nettoie votre salle de bains

Un p'tit coup pour la route?Je m'étais juré de ne jamais billeter politique, mais deux articles de tête de gondole ce jour m'invitent à céder à la tentation. Juste un détour. Comme quoi les promesses...

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Un p'tit coup pour la route?

Je m'étais juré de ne jamais billeter politique, mais deux articles de tête de gondole ce jour m'invitent à céder à la tentation. Juste un détour. Comme quoi les promesses...

J'entends beaucoup de reproches faits aux gouvernants, de ne pas tenir parole une fois aux affaires. Bien peu souvent d'avoir parlé trop vite, et de manière irréfléchie ou trafiquée.

En politique comme en d'autres champs sociaux, être candidat n'a rien à voir avec être élu. Se porter candidat à une responsabilité, c'est de l'ordre de l'idéal (ou de l'illusion), du projet (ou de la projection). En gros, ça procède du domaine de l'imaginaire; "on se représente que..." avant de se présenter...

Par contre, se retrouver à poste, ça relève de la réalité; d'une réalité qu'on avait cru tenir pour acquise sans la connaître vraiment.

Connaître, c'est expérimenter, me semble t-il. Je m'interroge: Monsieur Obama a t-il assez lu les innombrables rapports sur le fonctionnement de l'Etat Etats-unien? A t-il assez lu de romans de politique-fiction? Pour revenir au titre, connaissait-il l'état des toilettes de la blanche maison?

Lorsque j'entends les promesses de campagne des postulants à ce que vous voudrez, il me vient un léger sourire embarrassé. Quoi, passer de l'imaginaire à la réalité serait-il si simple? En fait, il est quasi certain que, quand on entend ces gens parler de programme ("bien ficelé", selon l'expression convenue; ficelée, hum; garotté?), on les voit s'acharner à surenchérir de chiffres, de preuves, d'arguments incontestables.

Les chiffres et les arguments ne sont-ils pas la démonstration sui generis de leur fonction défensive, attestant qu'en sous-jacence, les candidats et leurs fans pensent tous en réalité "on verra bien le moment venu"? Car ils ne peuvent ignorer la fluence du temps, la labilité des choses, la variabilité du monde, pas plus que les imprévus, les dessous des cartes ou les intempéries existentielles.

Or donc, ils affirment, et le caractère péremptoire de leurs affirmations atteste en bonne proportionnalité de leur ignorance.

D'où la question: sont-ils naïfs, menteurs, calculateurs? J'adore, in petto, l'expression "naïf calculateur". Mais foin de mes adorations, il est probable qu'il y a un peu de tout ça, en dosage variable, chez chacun d'eux.

Mais aussi et surtout, pensé-je, un extrême poids des convictions, doublé d'un irrésistible désir -qu'ils croient de pouvoir- du Pouvoir. Si ce n'est pas là un effet du fonctionnement subjectif des humains, donc de l'imaginaire, qu'est-ce?

Je te promets de nettoyer ta salle de bains; idée ô combien généreuse. Et puis voilà, quand j'arrive sur le Lieu de mes Promesses, ça n'est que bien partiellement ce que je croyais. Ou c'est plus crade que prévu, ou je n'ai pas les bons produits, ou les toilettes sont bouchées, ou le téléphone sonne quand j'ai les mains dans le savon, ou encore Il n'a pas de toilettes, ou ma colère contre tant de crasse me dégoûte et me pousse à fuir... Bref la promesse n'est pas en réalité l'objet d'un reniement, mais plutôt celui d'un écart inédit entre ce que je croyais et ce que je constate, au cours et au terme de l'expérience.

J'aurais pu évoquer Narcisse, je préfère Hercule, face aux écuries d'Augias. Même s'il fut condamné à les nettoyer, le mythe supporte l'idée que c'était par une motion intérieure, externalisée par un symbole divin.

Or quand il s'est trouvé devant la tâche à accomplir, il n'a dû son salut qu'à un expédient: la triche, en appelant à la rescousse le "maître divin des chasses d'eau"!

En tirera t-on une morale concernant la triche et le mensonge immanents et inévitables, ou une logique qui pourrait faire beaucoup d'usage en politique?

Je choisis cette dernière: le filou a été assez sage pour accepter, voire solliciter, une aide extérieure; pas une aide en miroir en séduisant les petits collègues d'en face, mais une aide transcendante, reconnaissant ainsi sa faiblesse et son manque à pouvoir seul.

Ya basta, et votez bien

JCD

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