Il me prend parfois l'envie de causer de ce site, à mes risques et périls.
Curieux de ce que disent les gens, je me livre de temps en temps à une spéléologie bien ardue, consistant à rechercher au loin, dans quasiment les "archives", des mots qui ont été dits il y a trois ou quatre jours, par des gens qui, ici, mettent quelque chose d'eux-mêmes.
Du coup, je réfléchis sur les rapports entre l'espace (virtuel) de ces supposées conversations et la temporalité qui s'y attache. Comme nous sommes dans une "civilisation" du titre, les messages appelés blogs se succèdent à un rythme effréné, sont poussés hors de l'écran visible des propositions matérielles de lecture, et du coup disparaissent de la conscience/appétence collective.
La temporalité du verbe est de nature bien différente de ce que Mediapart, dans son outillage forcément restreint, nous permet d'envisager dans sa structure. Nous en sommes d'ailleurs les complices objectifs, nous qui cherchons ardemment le dernier scoop, pour nous en régaler et nous en nourrir dans un jeu de questions/réponses où le temps de la réflexion, de la méditation nécessaire, sont absents.
Il y a dans l'usage et dans les schémas de fonctionnement du site quelque chose qui, de mon modeste point de vue, est inquiétant, dans la mesure où on voit s'y profiler le paradigme du mode actuel de la "communication": une idée chasse l'autre...
Or la parole échangée, même potentiellement, même virtuellement, vaut à mon sens mieux que ça. Là où il y a de l'affect, des "amitiés complices", la caténation des messages est proliifique, joyeuse ou compassionnelle, amicale ou contemptrice.
Par contre, là où des territoires potentiels d'échanges constructifs pourraient advenir, il y a peu d'échos, et en quelques jours, voire quelques heures, la flamme de la dialectique s'éteint au profit d'autres "jaseries" plus immédiates.
J'aimerais que ce site, pour moi une découverte inédite, apprenne, par le truchement de ses utilisateurs et de ses animateurs, à devenir un réel lieu d'échanges non pas du tac au tuc, mais sur la durée du temps qui vit, et qui explore les innombrables réalités de la vie qui est la nôtre.
A vôt'bon coeur, et merci Géraldine de ne pas m'engueuler!
JCD