Longtemps, et même s’il se couchait de bonne heure, l’exhibitionniste a figuré dans le catalogue des clichés comme le type en imperméable qui l’entrouvrait vite fait pour montrer ses génitoires devant la sortie des écoles. Ou celui qui, dans les transports publics, escomptait conduire à l’extase quelques voyageuses presbytes en exposant son appendice ; la pratique avait également cours aux abords des presbytères.
Mais ça, c’était avant.
Aujourd’hui, depuis la domination qu’exerce le tyrannique Internet, tout a changé.
Pour commencer, on ne dit plus exhibitionniste mais « exhibo ». Et les voyeurs, l’autre partie du couple, sont devenus des «mateurs». Il en résulte que les exhibos ne sont plus à classer uniquement du côté du masculin. La gent féminine, parité oblige, peut également se revendiquer comme telle. D’aucuns y voient un grand pas pour l’humanité.
Sur les blogs, la liberté d’expression passe désormais par le droit de tout montrer et de tout dire. On ne remerciera jamais assez Facebook, grand pionnier en la matière.
C’est ainsi qu’il est de bon ton, en ces temps où l’émotionnel prime sur la réflexion, de révéler par le menu les détails de son quotidien. Vous ne savez plus où vous avez la tête ou, comme la Mère Michel, vous avez perdu votre chat ? Peu importe : faites-le savoir !
Et il est tout aussi recommandé d'aller faire les poubelles des politiques, des people et même de son voisin de palier. Les Français veulent savoir, comme dit l'autre. Savoir, ou voir ça, Poujade n'en finit plus de faire des petits.
C’est la participation version 2.O.
On ne rit pas souvent dans les régimes totalitaires, qui veulent tout savoir sur tous. Les projecteurs aveuglants tiennent lieu de lumières.
La transparence obligatoire assassine le privé, l’intime. Il faut tout mettre au clair, sabres compris.
Il n’y a plus d’ombre.
Ce qui est aussi, hélas, l’une des définitions du désert.