Pôle InPact (avatar)

Pôle InPact

Association. Agriculture paysanne et durable.

Abonné·e de Mediapart

8 Billets

0 Édition

Billet de blog 28 octobre 2025

Pôle InPact (avatar)

Pôle InPact

Association. Agriculture paysanne et durable.

Abonné·e de Mediapart

Le fonds Vivéa sacrifie les transitions agricoles

C’est une décision bureaucratique comme il en existe trop en agriculture. Le 21 octobre, le fonds de formation professionnelle Vivéa, auquel cotisent tous les agriculteurs et agricultrices pour avoir la possibilité de parfaire ou de transformer leurs pratiques, faisait savoir qu’il allait restreindre brutalement le financement des formations pour les deux derniers mois de l’année.

Pôle InPact (avatar)

Pôle InPact

Association. Agriculture paysanne et durable.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Arguant d'une « contrainte budgétaire ponctuelle sur la fin de l’exercice 2025 », la mise en œuvre de cette décision se traduit, à l’échelle des fermes, par des refus de formations habituellement financées. Les services Vivéa font savoir aux organismes formateurs de plusieurs régions que peu ou prou, seuls les cursus liés à des obligations réglementaires pour les chefs d’exploitation seront finançables.

En clair, il reste surtout possible – car obligatoire – de se former au réglage de son pulvérisateur de pesticides ou à la « biosécurité » dans les élevages de porcs ou de volailles. Pour le reste, il est pudiquement conseillé de reporter les formations sur 2026… avec d’ailleurs une probabilité de voir de telles mesures être reconduites.

Vivéa s’assoit ainsi sur le droit à la formation et sacrifie les transitions agricoles. Concrètement, cela revient en effet à priver subitement les paysans et paysannes de leurs droits à se former sur des pratiques alternatives, des méthodes de cultures agroécologiques ou à des approches différentes de l’élevage.

À l’heure où tout le monde vante la nécessaire évolution des pratiques agricoles et le besoin d’adaptation au changement climatique, Vivéa explique tranquillement aux chefs d’exploitation, qui ont tous et toutes cotisé cette année comme les précédentes, que les droits que ces prélèvements étaient censés leur garantir se sont tout à coup évaporés.

Hormis en élevage hors-sol, l’hiver est propice à la formation dans toutes les filières : en prétextant que les formations peuvent être reprogrammées sur le premier trimestre 2026, comme si ces créneaux de formation étaient « vides » et que rien n’était déjà prévu, Vivéa impose de fait une « année blanche » à des pans entiers de la profession agricole – en réalité tous ceux encore en lien avec le rythme des saisons.

Pour les maraîchers, les arboriculteurs, les éleveurs et les viticulteurs notamment qui attendaient le calme relatif du milieu de l’automne pour consulter les programmes de formation, c’est la douche froide, qui peut se résumer ainsi : « Nous avons bien noté votre souhait de vous former et ne pouvons y donner suite ; mais merci d’avoir cotisé. »

Illustration 1
Formation agricole dans la Drôme.

Comme tout fonds de formation, Vivéa a une gouvernance appuyée sur la représentation professionnelle, qui semble étonnamment muette sur le sujet.

Bien que la direction du fonds s’abrite derrière des justifications techniques pour garantir une bonne gestion comptable et officiellement limiter les risques de mise sous tutelle publique, la dimension politique de cette décision ne doit échapper à personne : à la moindre contraction budgétaire, c’est toute une vision de l’agriculture qui s’exprime, et tous les professionnels agricoles cherchant à sortir de l’ornière dont on bafoue les droits.

Ferjeux Courgey, paysan, co-président du Pôle InPact (association qui réunit dix structures nationales de développement agricole et rural : Accueil paysan, l’Atelier paysan, Réseau Civam, Fadear, InterAfocg, MRJC, Miramap, Sol, Solidarité Paysans, Terre de liens)

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.