Nous venons d'assister* à la remise du prix Sakharov à un chirurgien congolais, spécialiste de la reconstruction gynécologique , le docteur Denis Mukwege. Ce prix, qui récompense des initiatives favorisant la paix dans le monde, est tout particulièrement mérité cette année.
Le Congo, tout particulièrement la région du Kivu, a été le théâtre des pires violences que peuvent commettre des hommes ayant perdu toute notion d'humanité. Le viol, utilisé comme arme de guerre, est peut-être la pire bassesse que peuvent commettre d'autres hommes. Des milliers de femmes, des dizaines de milliers certainement, ont subi les pires violences, souvent en présence de leurs maris et de leurs enfants, d'autant plus volontiers en public qu'il s'agit d'humilier. Elles ont été mutilées avec une cruauté que l'on a du mal à imaginer (tessons de bouteilles, crosses de fusil ...), causant souvent la mort de ces malheureuses, et pour les survivantes des dommages dont elles ne se remettront sans doute jamais.
Ce sont ces femmes survivantes, ces femmes, ces fillettes aussi -quelquefois même des bébés- que le docteur Mukwege a accueillies dans son hôpital; c'est à essayer de remédier le mieux possible à leurs blessures profondes, qu'il a consacré l'essentiel de sa vie.
Le docteur Mukwege a fait une déclaration poignante, au moment de recevoir son prix des mains de Martin Schultz, et en présence de tous les députés du Parlement européen. Rendant hommage à la dignité de ces femmes, il n'a pas manqué de souligner l'origine des violences qui ont rendu fous les agresseurs: l'est du Congo est immensément riche, il possède des minerais d'une valeur inestimable (en particulier le coltan, indispensable pour les technologies du futur), des hommes se transforment en fauves pour la possession de ces terres : agresser les mères, les compagnes et les fillettes de leurs adversaires, c'était gagner aussi la possession de ces richesses. La communauté a-t-elle été assez vigilante, pour calmer ces ardeurs guerrières?
Le docteur Mukwege dérangeait les agresseurs, en portant secours à ces malheureuses, on a cherché à l'assassiner et il a dû quitter le pays pour sa sécurité et celle de sa famille (lui-même a cinq enfants). Les femmes congolaises -pauvres parmi les pauvres- avaient réussi à mettre un peu d'argent de côté malgré tout, pour lui offrir un billet de retour au pays ... Il n'y a pas eu besoin de cela : il a décidé très vite de braver tous les dangers, et de revenir offrir ses soins aux infortunées victimes. Il opère à nouveau dans son hôpital et tente de son mieux de reconstruire leurs intimités ravagées.
Dans un monde ayant perdu tous ses repères, savoir qu'il existe ça et là des petites lumières malgré tout, dans la grande obscurité, c'est un vrai message d'espoir. Tout n'est pas perdu, ces petites lueurs ne demandent qu'à devenir immense lumière.
Merci monsieur Mukwege, du fond du coeur, d'être si profondément "humain" (dans le meilleur sens du terme).
http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20130108170441/
http://www.lemonde.fr/afrique/article/2013/07/16/dans-l-est-du-congo-les-viols-comme-armes-de-guerre_3448206_3212.html
http://www.france24.com/static/infographies/webdocumentaire-congo-paix-viol-rdc-nord-kivu-goma-onu/
*Retransmis en direct du Parlement européen, mercredi matin, sur Euronews.
 
                 
             
            