Le 17 juin, c’est le grand jour. Les visiteurs découvriront le parcours flambant neuf du Musée National de l’Histoire de l’Immigration (MNHI). Tout sera tout nouveau tout beau. Le nageur de Diadji Diop, installé dans le jardin du Palais de la Porte Dorée, brille déjà d’un rouge éclatant pour accueillir le public Dans le bonheur.
Cette apparence est pourtant trompeuse, car les conférenciers ne seront plus là pour assurer l’une des quatre missions principales des musées déterminées par le code du patrimoine art L 441-2 : celle de « mettre en œuvre des actions d’éducation et de diffusion visant à assurer l’égal accès de tous à la culture ». En effet, après avoir externalisé l’accueil, la billetterie, une partie des équipes de sécurité ainsi que les vestiaires, la réouverture du parcours permanent a été l’occasion d’externaliser – auprès d’une société privée – cette mission pourtant essentielle.
Les conférenciers vacataires, jusqu’à présent directement salariés par l’établissement public du Palais de la Porte Dorée dont dépend le Musée national de l'histoire de l'immigration, vont être remplacés par des intervenants de l’agence qui a remporté l’appel d’offres. Les anciens conférenciers, très attachés à leur mission au sein du musée de l’Immigration, ont dû passer un entretien pour être éventuellement recrutés par cette agence, pour des postes qu’ils occupaient déjà – depuis parfois plus de quinze ans.
À ceux qui souhaitaient continuer, l’agence a imposé le statut d’indépendant (micro-entrepreneur) et des tarifs très en-dessous des prix du marché correspondant à une division par deux des salaires que les conférenciers avaient précédemment, sans majoration pour les dimanches, les jours fériés ou les langues étrangères. Par ailleurs, cette relation de subordination (honoraires imposés, obligation de formation) s’apparente à du salariat déguisé et constitue une grave entorse à la loi. Enfin pour le recrutement des nouveaux intervenants la carte professionnelle de guide-conférencier, pourtant obligatoire, n’a pas été demandée, alors que la loi – article 109 de la loi CAP – l’exige pour une visite payante dans les musées de France et les monuments historiques.
Ce nouveau fonctionnement, contraire à l’esprit fondateur de la maison, a été initié par la direction
de l’établissement sous le mandat de Monsieur Pap Ndiaye, ancien directeur général et actuel ministre de l’Éducation.
La mission de diffusion de savoir est devenue un produit mercantile entre les mains des décisionnaires du musée et celle d’un organisme privé ubérisant ses intervenants.
Les conférenciers ont achevé leurs dernières visites sans aucun mot d’adieu ou de remerciement de la part de l’établissement. Ils seront remplacés par une nouvelle équipe de médiateurs qui ont accepté des tarifs très en-dessous des honoraires permettant de vivre décemment de leur métier ainsi que des conditions de précarité indignes d’un musée national. Le Musée National de l’Histoire de l’Immigration semble bien avoir abandonné ses conférenciers mais aussi ses propres valeurs sociales pourtant au cœur du propos du parcours permanent qui rouvre au public ce 17 juin.
Les ex-conférenciers du Palais de la Porte Dorée et du Musée National de l’Histoire de l’Immigration.

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