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Billet de blog 5 juillet 2023

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Réaction au drame du 27 juin et au soulèvement populaire en cours

TW : Violences policières, meurtres, racisme, classisme

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour que nous cessions définitivement d’être des objets de discussions et de fantasmes.

Pour que nous cessions définitivement d’être traité·es comme des barbares.

Pour que notre parole politique et nos intérêts soient représentés par et pour nous. 

Pour que justice et vérité soient faites pour Nahel et tous ceux avant lui.

Illustration 1


Nous, militant·es de la Pride des Banlieues, avons vécu l’annonce du meurtre de Nahel comme un choc. Tristesse, dégoût, rage. Compliqué de qualifier les sentiments qui nous ont traversé·es ces derniers jours. Pour beaucoup, on aurait pu être à sa place. 

Nos premières pensées vont évidemment à toute sa famille et à ses proches qui, en plus du deuil à affronter, du sentiment d’injustice et d’incompréhension, doivent faire face à un harcèlement ultra-violent des militant·es d’extrême-droite.

Les soulèvements qui suivent sont totalement légitimes. Se révolter contre un système qui nous prive de valeur, de projection et même d’espoir, c’est normal. Se révolter contre un système qui nous réduit au silence, qui exploite nos corps et qui nous criminalise, c’est normal. Se révolter contre un système qui nous harcèle, qui nous pisse dessus, qui nous tue de sang-froid, c’est normal.


Après nos sentiments initiaux, la rage revient encore quand on observe les réactions face à la situation. 

Être noir·e, arabe ou racisé·e en quartiers populaires, c’est être considéré·e comme un·e sous-citoyen·e. 

Alors on est traité·e en tant que tel·le. On annule nos moyens de transports, on nous impose des couvre-feu, on nous envoie la police, on nous gaze, on nous tire dessus. La France est en guerre. En guerre contre ce qu’elle voit comme un ennemi intérieur. En guerre contre ce qui est censé être son “peuple”. 

On a allumé la télé et on a vu. On a vu les reportages de TF1 et de France 2 qui prennent la moitié de leur JT pour parler de vitres brisées sous tous les angles possibles et imaginables sans jamais évoquer les causes des révoltes. Les sujets de 8 minutes durant lesquels sur 7 intervenants, la parole n’était laissée qu’à des mecs blancs qui nous qualifient de barbares, de sauvages et déversent leurs discours de haine habituel, jamais à des personnes concernées.

On a vu les plateaux de Cnews et de BFMTV qui sur 5 personnes étaient composés uniquement de policiers, d'anciens policiers et de journalistes d’extrême-droite. On vous laisse deviner les analyses qui en découlent. 

On a aussi vu les très rares plateaux dans lesquels la démarche du soulèvement était défendue. L’extrême majorité du temps par des personnes issues de partis qui ont certes l’ambition de nous défendre mais dont on peine à voir les représentant·es des quartiers populaires parmi leurs élu·es. 

Du drame au soulèvement, nous faisons face à un mur du son. Tout le monde nous entend mais personne ne nous écoute. 

Et comment se faire écouter, si nous ne sommes que des objets de discussion ? Comment faire comprendre l’urgence de nos situations, si nous sommes privé·es de parole dans l’espace public et médiatique ?

Si nos vies et nos identités sont fantasmées. Si nous sommes vu·es uniquement comme « des barbares, des beurettes, des racailles, des terroristes, des lacostes TN, des religieuses soumises, des mama », et on en passe. Si nous ne sommes jamais perçu·es tel·les que nous sommes réellement dans nos individualités et nos pluralités. 


Et on sait comment tout ça va se finir. Quand la répression et la censure auront fait leur effet. Que va-t-il rester ? 

Hypothétiquement, deux ou trois mesures pseudo-sociales que personne n’a demandé, peut-être même pas. 

Avec certitude, des centaines voire des milliers de condamnations. Plus de moyens donnés à la police pour exercer une répression toujours plus forte, plus dangereuse, plus meurtrière. Une gestion des quartiers populaires toujours plus coloniale, toujours plus violente. Des préjugés toujours plus ancrés. Une recrudescence de celleux qui portent des discours fascistes, une recrudescence également de celleux qui les tolèrent. 


Alors qu’est-ce qu’on peut faire ? 

Oui, qu’est-ce qu’on peut faire pour faire entendre nos voix ? Qu’est-ce qu’on peut faire pour imposer nos narratifs et nos revendications ?

Une chose est sûre, on ne peut compter sur personne d’autre que nous. 

Ce ne sont pas nos écoles de seconde zone qui vont nous permettre d’acquérir les compétences pour imposer nos voix dans l’espace public et médiatique. On ne peut pas non plus compter sur les partis actuels qui nous ont historiquement exclu·es de leurs organes décisionnaires et des postes éligibles. 

Ni sur des médias qui ne nous interrogeront jamais si nous leur laissons le choix. Il ne faut pas qu’ils aient le choix de nous interroger, il faut les mettre dans des situations où il n’y a pas d’alternatives.

Par contre, la lutte et l’action militante peuvent nous permettre de nous éduquer. De partager nos connaissances, d’essayer de se faire entendre jusqu’à y parvenir. D’apprendre de nos échecs autant que de nos victoires. D’acquérir un capital militant pour savoir comment on fait pour être entendu·es dans l’espace public. 

De 2005 à 2023, nous n’avons pas réussi ce défi. Nous n’avons plus le choix, il faut y parvenir et on s’engagera corps et âme pour mettre fin à notre silenciation. Pour leur imposer nos voix, qu’iels le veuillent ou non. 

Nous appelons, pour celleux qui le peuvent, à soutenir les structures de lutte contre les violences policières qui existent actuellement. À soutenir les comités Justice et Vérité. Et donnons dans la mesure de nos moyens à la cagnotte pour soutenir la famille de Nahel.


En attendant on se retrouve le 8 juillet à Beaumont-sur-Oise pour la marche Justice et Vérité pour Adama.

Faites attention à vous, et n’oubliez pas le contact de la Legal Team Antiraciste :
01 84 80 27 83


Pas de justice, pas de paix. Jamais.

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