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Billet de blog 23 janvier 2023

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Égalité des chances vs La réalité

[REDIFFUSION] Comment l’oppression systémique des LGBTQI+ de quartiers populaires démonte cette chimère républicaine.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Aujourd’hui en France, notre place dans le monde du travail détermine largement notre place dans la société.

Le travail est présenté comme un moyen juste de répartition des ressources. Les un·es seraient riches grâce à leur travail, tandis que les autres seraient responsables de leur pauvreté, et n’auraient qu’à bosser dur pour en sortir… « Quand on veut, on peut ! ». 

Les lourdes inégalités sont donc justifiées par le mythe de l’égalité des chances. Selon lui, chaque individu se verrait offrir les mêmes chances de réussir, à condition de le mériter. Néanmoins, les parcours des personnes LGBTQI+ de quartiers populaires, situés à l’intersection des oppressions hétérosexistes, raciste et classistes, nous prouvent le contraire. 

L’école : un premier obstacle à l’« égalité des chances »

En tant que LGBTQI+ de quartiers populaires, les inégalités qui nous touchent dans l’accès à l’emploi trouvent leurs origines dans un système scolaire qui reproduit les dynamiques d’oppressions de la société. Nous y subissons à la fois un manque structurel de moyens et des LGBTQI+phobies ambiantes.

En effet, les moyens accordés à l’éducation (locaux, matériel, nombre de postes, salaires) sont très insuffisants dans nos quartiers. 

Ces inégalités sont renforcées par le mode de sélection des professeur·es, basé sur un système de cumul de points. Les jeunes enseignant·es doivent gagner des points pour rejoindre les destinations de leur choix. Points plus facile à gagner dans des établissements de quartiers populaires qui sont eux-mêmes peu demandés. Le plus souvent on se retrouve donc avec de jeunes professeur·es peu expérimentées qui n’ont pour seule envie que de rejoindre un établissement dans leurs régions d’origine. 

Les conséquences sont simples. Si on prend l’exemple de la Seine-Saint-Denis en 2019, plus de 30% des personnes non-scolarisé·es se retrouvent sans diplômes contre environ 22% en moyenne à échelle nationale. 

En plus de ces obstacles, communs à tou·te·s les jeunes de quartiers populaires, s’ajoutent l’expérience des LGBTQI+phobies. Les adultes au contact des élèves, n’étant pas formé·es à l’accueil de jeunes LGBTQI+, ne mettent ainsi rien en œuvre pour leur assurer un cadre adapté, et tiennent parfois elleux-même  des discours LGBTQI+phobes. 

De leur côté, les élèves manquent également de sensibilisation à ces sujets, et reproduisent donc souvent les schémas LGBTQI+phobes de la société à travers des violences verbales et physiques. En conséquence, les jeunes LGBTQI+ ont pour nombre d’entre elleux subie·es du harcèlement, et iels présentent sept à treize fois plus de risques de se suicider.

Difficile donc de parler d’égalité des chances face à de telles violences, subies dès le plus jeune âge.


Discriminations à l’embauche

En effet, en plus des écarts creusés par le système scolaire, les biais LGBTQI+phobes, racistes et classistes des recruteur·ices remettent en cause nos possibilités d’accéder à l'emploi :

  • 20% des personnes LGBTQI+ ont déclaré avoir été discriminées dans la recherche d’emploi. 
  • ce chiffre s’élève à 44% pour les personnes trans et à 50% pour les lesbiennes. 
  • les nombreuses études portant sur l’embauche des personnes racisées montrent quant à elles des taux de discrimination allant de 40% à 60%. 
  • les chômeur·ses d'origine étrangère déclarent même à 74% subir des discriminations lors des entretiens d'embauche. 

De leur côté, les personnes blanches nées en France ont elles 83% de chances en plus d'être reçues à un entretien que les personnes non blanches (contre 24% en Allemagne). 

Les personnes précaires sont également discriminées à l’embauche, lorsqu’elles habitent en foyer d’hébergement par exemple. 

Et on aurait toustes les mêmes chances… 


L’expérience du travail

Du fait de ces violences systémiques, les personnes LGBTQI+ de quartiers populaires sont bien souvent obligé·es d’accepter des postes précaires, sous-payés ou dangereux. 

En effet, la Seine-Saint-Denis enregistre le plus fort taux de surmortalité en Ile-de-France (130% contre 74% à Paris, mars-avril 2020). Pour cause, des conditions de vie plus précaires et un moindre accès à la santé, mais aussi une surreprésentation des personnes immigrées dans les emplois de première ligne,  notamment lors de la crise sanitaire et sociale liée à la pandémie de Covid-19.

Nous souffrons donc d’inégalités structurelles dans l’accès à l'emploi, mais également sur le lieu de travail. Les  violences sexistes, racistes et LGBTQI+phobes, qu’elles soient verbales, physiques et/ou sexuelles peuvent être quotidiennes. 

Par exemple, en 2022, 30% des salarié·es LGBT ont été victimes d'agression(s) LGBTphobe(s) au travail, contre 26% en 2020. C'est notamment pour cela que seule la moitié d'entre nous est out au travail. 

Face à ces violences, deux options. La première est la fuite, pour celleux qui peuvent se le permettre.

Pour les autres, c’est l’acceptation. Accepter que nous n'ayons pas le choix de continuer de travailler malgré les violences, dans le seul but de survivre. 

On l’a bien compris, la notion d’égalité des chances ne correspond à aucune réalité. Il y a assez de ressources pour tout le monde. Leur accaparement par une minorité sur la base de l’égalité des chances est absurde. 

Tout le monde mérite de bénéficier d’un niveau de vie digne, sans conditions, avec ou sans travail. En somme, il faut sortir de l’illusion qu’est l’égalité des chances pour commencer à travailler sérieusement à une égalité concrète. 

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.