Madame la Proviseure, Messieurs les Adjoints,
Vous avez affirmé, par une tribune publiée dans Le Monde, et dans une belle unanimité, que nous étions divisés : entre « jusqu’au-boutistes » et « épuisés » ! Mais cette prétendue division découle d’une vision grossière de votre personnel ; nous prenons acte du fait qu’elle est ce que vous avez retenu et souhaité diffuser de notre participation aux réunions internes organisées à propos des blocages.
A vous lire, il faut de plus admettre qu’un discours vertical où des chefs jugent publiquement leurs administrés peut condamner les blocus au nom d’une « réelle expression démocratique ». Mais l’expression démocratique, comme son nom l’indique, comme les blocus l’indiquent également, s’adresse des gouvernés aux gouvernants. Elle remonte la hiérarchie institutionnelle au nom de la souveraineté citoyenne, elle n’est ni descendante ni condescendante.
Dès lors si vous êtes réellement attachés à « la nécessité absolue du maintien du service public d’éducation », le plus urgent n’est pas de justifier par voie de presse les méthodes contestables que vous avez adoptées : les sanctions à l’intérieur de votre établissement, les appels à la police lors des blocus au risque d’un engrenage de la violence.
Le plus urgent est que vous participiez à cette vitalité de la démocratie, en vous adressant publiquement, comme le font les acteurs des blocus, les grévistes, les manifestants, à votre ministère et au gouvernement.
Puisque vous prônez des modes d’expression sans risque de violence, nous vous en proposons un : une nouvelle tribune où vous vous demanderiez si vous pouvez encore garantir « le service public d’éducation », « la mission d’accueil de l’école de la République », en particulier « des plus vulnérables », alors qu’une réforme précipitée du baccalauréat rend impossible l’organisation correcte des épreuves de contrôle continu, que votre dotation d’établissement est en baisse, que des suppressions de poste d’enseignants sont déjà prévues pour l’année scolaire prochaine, que l’attractivité du métier d’enseignant est détruite par le gel continu des salaires, que sa qualité est fortement menacée par la réforme des concours.
Nous avons fait un rêve : que vous signaliez alors d’où vient le vrai risque d’épuisement de vos équipes ; à savoir la baisse de la dotation de l’établissement comme la marche forcée et désordonnée des réformes successives.
Soyez sûrs que quelques personnes qualifieraient bien vite cette nouvelle tribune de « jusqu’au boutiste » ; mais aussi qu’un public bien plus nombreux y verrait un acte de courage.
Les enseignants réunis en Assemblée générale (05 février 2020)