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Billet de blog 12 avril 2010

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Polska

« Nous Européens, sommes tous citoyens polonais », l'apostrophe est de Julien Frisch et résume l'état d'esprit général du monde et de la blogosphère après le crash à Smolensk (Russie) samedi 10 avril à 8h56 CET de l'avion transportant le Président polonais Lech Kaczyński et une partie de l'élite nationale vers la ville de Katyn.

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« Nous Européens, sommes tous citoyens polonais », l'apostrophe est de Julien Frisch et résume l'état d'esprit général du monde et de la blogosphère après le crash à Smolensk (Russie) samedi 10 avril à 8h56 CET de l'avion transportant le Président polonais Lech Kaczyński et une partie de l'élite nationale vers la ville de Katyn.

Fistful of Euros évoque ainsi « la cruauté de l'histoire » : le Tupolev-154, l'appareil officiel de la République polonaise se rendait ainsi à Katyn, pour commémorer le massacre perpétré en 1940 par les Soviétiques, où près de 20 000 officiers, personnalités ou officiels polonais avaient été tués. Les célébrations de 2010 devaient marquer un réchauffement notable des relations, voire une réconciliation entre la Pologne et la Russie : car le massacre de Katyn a été nié par Moscou jusque dans les années 90. « Le mot ‘ironie' même est incapable de restituer le lien entre la commémoration du massacre de Katyn et le décès des hauts responsables polonais actuels. Dieu bénisse la Pologne ! », poursuit Fistful of Euros. « La Pologne en deuil, toutes mes condoléances », lance depuis Istanbul, Erkan Saka.

La liste des officiels, militaires, dignitaires du clergé polonais ou simples membres des familles des officiers polonais massacrés il y a 70 ans à Katyn, qui ont péri dans l'accident de l'avion présidentiel est consternante. « Président tué, Etat-major décapité », note, très en verve, Bruxelles 2. « Deuil national en Pologne », avance de son côté European Tribune, en recensant les noms des disparus. « President Lech Kaczynski and his wife, Aleksander Szczyglo - Head of the National Security Bureau, Ryszard Kaczorowski - the last president in exile, Jerzy Szmajdzinski - Deputy Marshal of the Sejm [Polish Parliament], Krzysztof Putra - Deputy Marshal of the Senate, Izabela Jaruga Nowacka, Jolanta Szymanek-Deresz - members of parliament, Paul Wypych and Wladyslaw Stasiak - ministers in the office of President, Mariusz Handzlik - Presidential Minister, Andrew Carrier - Secretary of the Protection of Memory of Struggle and Martyrdom, Gregory Dolniak - club vice president PO, - Przemyslaw Gosiewski and Zbigniew Wassermann - PiS MEPs , Slawomir Creak - head of National Bank of Poland and Janusz Kurtyka - head of the IPN (Institute of National History). » Anna Walentynowicz, 81 ans, l'ouvrière à l'origine du mouvement de grève dans les chantiers de Gdansk, ayant donné naissance à Solidarnosc, figure également parmi les victimes. Sur les 96 passagers, « personne n'a survécu à l'accident ».

Selon les premiers éléments de l'enquête, diligentée par un Vladimir Poutine très en forme, la catastrophe serait due à une erreur du pilote qui, sur ordre présidentiel, a essayé par quatre fois de se poser à l'aéroport militaire de Smolensk malgré un fort brouillard et une visibilité réduite. Quelques blogueurs rechignent à accepter cette version des faits et livrent des hypothèses plus risquées. « Cela sent le coup d'Etat ! », pense par exemple Jaanika Erne sur Ideas on Europe. « D'abord le fait que l'avion qui s'est crashé est un Tu-154, conçu par les Soviétiques dans les années 60 et réclamant un entretien russe, est un appareil incroyablement démodé. Comment les responsables officiels n'ont-ils pas vu qu'emprunter un tel avion est dangereux ? Sans oublier que l'aéroport de Smolensk, placé dans la zone d'influence soviétique, a refusé par quatre fois la permission d'atterrir à l'avion présidentiel. »

Coup fourré ou pas, l'évènement est une « tragédie » et le pays « est sous le choc », selon Power&Politics World. Pour bon nombre de Polonais qui ont commencé à se rassembler en masse dans les rues, les églises de Varsovie mais aussi d'ailleurs, le nom de Katyn est désormais synonyme de « lieu maudit ». « Jésus, Sainte-Marie, c'est une tragédie inimaginable. Un second Katyn a frappé la Pologne, c'est l'élite de notre pays qui a disparu », a déclaré un très pieu Lech Walesa, repris par EurActiv.

S'il est trop tôt pour évoquer l'avenir de l'échiquier politique polonais, le pays devrait pourtant organiser des élections présidentielles anticipées -le vote devait initialement avoir lieu à l'automne 2010-. Pour Guillaume Klossa, « sans pour autant apprécier le président Lech Kaczyński, il faut lui reconnaître un vrai courage concernant la reconnaissance de la contribution de la culture juive à l'histoire polonaise. Je me sens solidaire d'une grande nation européenne qui aspire à juste titre à être un des moteurs de l'Union et qui va bientôt en prendre la présidence tournante. »