En ces temps électoraux, les sensibilités sont à vif, il est donc inutile de préciser qui a écrit quoi en une, dans une rédaction qui par ailleurs se veut résolument de gauche, ce qui est son droit. La personne concernée se reconnaîtra si cela lui chante.
Un papier de tête (« Sortir de l'élection de la gauche... ») jouxtant des articles traitant des « grands candidats » (supposés de gauche) dans le numéro daté du 21 avril 2017, fort bien rythmé au demeurant, fait ainsi mine d'éclairer le panorama du 1er tour, en omettant le candidat du Frexit, à savoir François Asselineau.
Or, il se trouve que le programme de M. Asselineau (Président de l'UPR), qui a un passé de technocrate et non de politique professionnel comme beaucoup de ses concurrents, (M. Macron ayant mis un pied dans le « bizness politique » sans passer par la case élection sans doute du fait de son immense talent), s'inspire du programme du CNR, qui a contribué à reconstruire le pays après 1945, et dont il serait difficile de prétendre que c'était un programme ultra libéral, voire simplement un projet de droite, cette droite qui s'était (avec d'autres personnels politiques bien connus « de gauche ») tellement compromise avec le régime du Maréchal Pétain et la Collaboration.
Ne serait-ce pas là une bonne raison pour au moins évaluer le projet de l'UPR, fût-ce avec la plus grande sévérité ? Et bien non.
Si l'on reproche à François Asselineau son passé de technocrate dans des gouvernements (etc..) de droite, il est clair que cela appelle d'autres réminiscences, certains à MDP ou ailleurs étant susceptibles de se faire épingler pour leur participation à des aventures idéologiques et éditoriales peu suspectes d'être classées « à gauche », du moins selon le point de vue qui fait en principe de l'intérêt général la pierre angulaire de toute action se revendiquant du bien commun.
Il faut bien vivre, certes, mais cela vaut pour tous.
Nous sommes donc face un choix éditorial comme un autre, mais qu'il convient de mettre en lumière et d'expliciter.
A deux jours du scrutin, MDP fait silence sur le seul candidat qui veut réellement sortir de l'UE, de l'Euro, et dans la foulée de l'OTAN.
Est-ce à dire que MDP a fait le choix « européiste » et atlantiste ? Cela en a tout l'air. En tout cas, sur le plan de l'information, on peut peut-être mieux faire.
Mais pourquoi pas ?
Sauf que ce choix n'est pas affirmé. « On » se contente d'aiguiller les abonnés vers des solutions qui peuvent ne pas en être et qui, toutes, respectent le statu-quo désastreux actuel au moins en termes sociaux et économiques.
Les parti-pris pourtant peuvent paraître clairs : ou bien on reste dans le « binz » UE-Euro, et nos présidents n'ont plus de pouvoirs, ou bien on en sort, et la démocratie retrouve des couleurs.
Chacun sachant que toute renégociation des traités est vouée à l'échec avec la règle de l'unanimité qui, en principe, encadre les prises de décision des 27 états membres de l'UE (la Grande Bretagne ayant actionné l'article 50 pour sortir de l'UE), voilà qui condamne sans doute quelques ténors de l'heure englués dans des discours probablement démagogiques, en tout cas à priori dénués d'une réelle efficacité opérationnelle. En France, nous n'en sommes plus à cela près.
Mais soutenir objectivement, sans jamais l'affirmer, et au nom de l'idée de « gauche », un système européen ultra libéral qui se traduit par la paupérisation de la société, la désindustrialisation, le chômage sans fin, la perte de nos droits régaliens, (ce qui revient à confier notre sort aux technocrates non élus de Bruxelles), l'enrichissement continu des plus riches au détriment des autres, est-ce bien raisonnable ? Quand on s'affirme de gauche ?
On peut s'interroger.
Je sais bien que M. Asselineau n'est pas en odeur de sainteté dans les « grands médias », et MDP en l'occurrence ne fait pas, une fois de plus, exception à la règle du politiquement correct. C'est un choix rédactionnel légitime, fruit de la liberté économique (et idéologique?) de ce journal participatif.
Mais écrire, avec talent, un papier impertinent et drôle sans mettre en accord la musique et la chanson, cela interpelle de la part d'un journaliste qui n'a plus, hélas, à prouver son savoir-faire.
Pour les électeurs de gauche, dont je suis, il faudrait donc que la lumière soit faite sur TOUS les candidats susceptibles de représenter l'intérêt général, et non pas seulement sur ceux qui ont été sélectionnés par des journalistes dont il n'est évidemment pas question ici de contester la liberté des choix éditoriaux ou la déontologie.
On peut simplement trouver dommage que les principes bien compris d'une déontologie minimale en ces temps difficiles ne conduisent pas à informer complètement les lecteurs sur la totalité des futurs souhaitables qui nous sont proposés.
J'ai vérifié que quelques papiers sur MDP mentionnent ou traitent de haut ce « petit » candidat qu'est M. François Asselineau. L'un des articles est illustré par la photo d'un parking désert traversé par un individu en discussion téléphonique, ce qui tend à prouver que M. Asselineau, une fois encore, n'est pas le favori de cette rédaction, qui a bien raison d'afficher en l'occurrence ses convictions, fût-ce de cette manière retorse.
Donc, UE, Euro, et OTAN sans doute aussi si on pointe la russophobie ambiante à MDP, et de grandes envolées pour éviter les sujets qui fâchent. Voilà une des faces plausibles du positionnement de MDP, et ma foi, pourquoi pas ?
Mais au moins, que parallèlement, les journalistes fassent leur travail pour de bon, jusqu'au bout.
Si Asselineau dit des sottises, que diable, démontez-le ! Ne vous contentez pas de le nier. Car alors, vous sortez de votre rôle, qui reste pour certains d'entre nous défini par la Charte de Munich de 1971.
Ce qui induit une question subséquente : qu'est que le véritable rôle des journalistes aujourd'hui ? Grande question à laquelle la longue période électorale actuelle permettra sans doute de répondre, au moins en partie.
NB : L'article d'Edwy Plenel « Nous, Président(s): agir au-delà du vote » du même journe cite pas plus le président de l'UPR. De là à y voir une stratégie éditoriale, il n'y a qu'un pas que l'on se gardera bien de franchir.