L’ART D’ÊTRE GRAND PERE AUJOURD’HUI POUR PREPARER LE JOUR D’APRES
Personne ne sait de quoi demain sera fait. Maintenant, en pleine période d’enfermement général pour faire face à la pandémie du Covid 19, plus que jamais. On parle de récession générale, de l’économie mondiale qui s’effondre et aura du mal à redémarrer partout. Et avec de l’austérité, des chômeurs, des pauvres plus nombreux, des migrants chassés de chez eux par la misère, les guerres, le changement climatique… et des gens comme vous et moi qui désespèrent en se demandant si le voisin ou celle qu’on croise dans la rue, n’est pas porteur du virus mortel. Soupçon, méfiance et crainte des rassemblements, des fêtes, extinction de l’activité culturelle encore, fermeture des restaurants… pour des mois encore.
Pour moi qui suis grand père de deux petites filles (8 ans et 4 ans) j’en suis à me demander ce que je peux leur dire pour la suite du monde .Malgré les applaudissements et les « casserolades » aux fenêtres tous les soirs en solidarité avec les soignants, les beaux élans fraternels de toutes sortes dans la société depuis des semaines, je m’interroge.
Depuis que j’ai perdu les utopies socialistes de ma jeunesse de l’après- 68 ,que les luttes pour l’émancipation sociale et humaine se cherchent voire marquent le pas depuis les années 2000.Que les gauches , écologistes et autres, les traces du Front populaire de 1936, les partis politiques des gauches des « Jours heureux » de la Résistance ou des années Mitterrand , les luttes syndicales , les Gilets jaunes de 2018, la révolte sociale de l’automne passé, celle du refus de la contre-réforme des retraites, les équipes clairsemées de la France Insoumise qui y croient dur comme fer, bien des rages… qui ne savent comment inventer un nouvel avenir après l’effondrement du « socialisme » à l’Est en 1989 . Et un électorat populaire qui s’abstient massivement depuis 30 ans en France, l’atomisation sociale du salariat d’un pays l’autre, la dislocation des collectifs de travail, des services publics à bout de souffle , l’Europe en panne.. . Sans parler de la numérisation générale de l’activité productive qui se profile partout, isolera d’avantage les salariés entre eux avec des difficultés plus grandes pour se rassembler, s’unir pour agir... Et la privation des libertés d’aller et venir par le « contact tracking », cette surveillance généralisée des personnes ! Bien des ombres se profilent à l’horizon…
Donc se poser vraiment la question du jour d’après les refus, les colères et autres légitimes protestations. Comment ré- inventer et jeter les bases d’un autre monde qui soit plus humain ? En bref : retrouver de l’espoir … Comment lutter aujourd’hui pour que demain ne soit pas pire qu’hier ? Pire que cet aujourd’hui d’enfermement et de désocialisation générale ?
A mes petites filles je ne ferai évidemment pas de stratégie politique. C’est un autre débat. Je ne l’aborde pas ici.
Je leur dirai comment, selon moi, devenir des humains. Oui des humains. Vieille question philosophique : qu’est-ce qui est essentiel à l’homme ?
Aucun doute : la forme en chacun de l’humaine condition, en dignité, valeur, liberté. En un mot :l’humanisme. D’où le respect absolu de tout être humain et le refus de toute forme d’assujettissement. Liberté, égalité, fraternité : à lire et commenter chaque fois que possible, partout, dans tous les événements de l’actualité, commentée, décryptée, par les parents. Ce qui se passe ne nous est pas étranger.
Alors comment découvrir ? Cela commence tôt ! Par l’expérience sensible de la beauté, celle des formes artistiques : chanter, lire et dire de la poésie. Apprendre à admirer les couleurs les formes, les sons, les goûts, les odeurs …partout, comme début de l’aventure de la conscience, par la perception. Respecter son corps et sa santé : faire ce qui convient pour cela, pour l’élan de sa vie. S’entraider, se saluer, s’ouvrir pour apprécier les qualités des autres, soit savoir se respecter soi-même pour respecter les autres… Et qu’est-ce à dire cela ?
L’attention à la variété des formes des vies, celles des proches comme celles différentes par la connaissance du monde, les marches à pied et voyages lointains. Ne pas tourner en rond dans le cercle du connu qui est un enfermement. Affronter la peur de l’inconnu. Conscience de ce qui se passe à l’intérieur de soi-même : apprendre qui on est. Prendre le temps d’en parler avec ceux en qui on a confiance. Pour cela, ne pas toujours se presser. La vitesse si souvent magnifiée est un leurre qui distrait de soi. La lenteur est matrice de toute découverte. Inventer : la curiosité et l’imaginaire, sont les débuts de la longue histoire de soi avec soi et partant avec autrui, avec le réel. Enfin choisir ce qui compte dans sa vie. Pas son compte en banque comme mesure de toute chose. Les valeurs humaines c’est ce qui compte : chacun son code. Pourvu qu’il tende vers l’universalité et s’ouvre à la critique. Le mien fut celui de mon métier d’enseignant, passeur de culture et d’histoire, éveilleur de la personnalité de mes élèves et formation à l’esprit critique. Et comme militant de gauche : refus des injustices, des inégalités, du mépris et de toutes les formes de dominations, quelles qu’en soient les sources. Celles des « sauveurs suprêmes » et des dogmatismes, des transcendances religieuses et tant d’autres autorités soi-disant indiscutables, au-dessus des humains. Pour la construction collective de ce qui crée ensemble de l’auto- émancipation humaine, c’est-à-dire fait société sans frontières.
Ce que j’écris ici n’est pas un code moral. Juste ce que j’ai appris dans ma vie. Comme un chemin de découvertes. A chacun d’inventer sa propre route. Ici quelques repères pour ne pas se perdre.
Gérard Perrier, Marseilleveyre ( du provençal : « …de là où on voit Marseille » )
25 avril 2020.
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