Tribune écrite en Novembre 2014
Je ne conteste pas que la majorité des pays occidentaux soient démocratiques bien sûr. Cependant si l’on se base sur la définition du mot démocratie comme étant : « le peuple est souverain et gouverne dans l’intérêt général » ou sur l’introduction de la Constitution de 1958 de notre Vème République où est reprise la célèbre expression d’Abraham Lincoln « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple », je pense qu’il y a un réel souci dans notre pays actuellement.
Car où voit-on aujourd’hui le peuple décider de quoi que ce soit ? A part voter pour transférer le pouvoir tous les cinq ans à ses représentants, qui en principe, doivent défendre les intérêts de leurs électeurs et l’intérêt général, les citoyens n’ont plus de prise sur leurs politiques, donc sur leur destin. Or, de l’intérêt général, les élus n’en font rien, si ce n’est défendre leurs propres intérêts justement, ou celui des lobbies qui les aiguillonnent. Que ce soit les Partis politiques, les groupes industriels, les banques etc… Voulez-vous me dire où se trouve ici l’intérêt du peuple ? Leur unique leitmotiv, une fois élue, est de se faire réélire, et leurs actes ne sont ensuite plus en adéquation avec les réalités quotidiennes du peuple.
La Constitution ne prévoit aucun moyen pour le peuple de contester l’action de ses représentants, même lorsque le mandat et les promesses éléctorales ne sont pas remplis. Je ne vois pas sincèrement, comment peut-on encore appeler cela une démocratie ! Mais est-ce pour autant une dictature ? Peut-être pas, certes, mais attention soyons sur nos gardes, car nous n’en sommes pas si éloignée.
Aujourd’hui, la citoyenne que je suis ne dispose plus de pouvoir ou de contre- pouvoir. Ma seule arme est mon bulletin de vote tous les cinq ans, ou alors il me reste la possibilité de me présenter devant les électeurs ou pire, être contrainte à l’abstention. Mais pour qu’un citoyen de base puisse se présenter aux élections, il y a deux possibilités : soit appartenir à un grand Parti, soit être fortuné, voire rentier, car une élection coûte cher, très cher, et sans moyens financiers, on ne peut envisager l’espoir d’être candidat.
Or, dans les Partis, faut-il encore être le proche d’un puissant baron local ou encore mieux, d’une personnalité politique d’envergure nationale, et après des années de cirage de pompes, on peut espérer, peut-être, se voir récompenser par un poste dans une collectivité territoriale ou un mandat quelconque. Une place au sénat étant le must pour finir une carrière et préparer sereinement sa retraite (chapeau). Quoi qu’il advienne, dans ce cas, Il faut toujours prendre soin de ses amis (servants ?).
Si tu es une bonne fille, et jolie de préférence (mais même moche tu as tes chances…), il faut passer par plusieurs canapés locaux et/ou nationaux pour pouvoir prétendre à un poste au Conseil Général. Tout ça est connu de tous, mais rares sont ceux qui osent contester la « promotion canapé ». Et quand bien même, ceux qui la contesteraient n’auraient strictement aucun moyen pour changer de telles pratiques vielles comme le monde. Aussi, je peux dire aujourd’hui que les Partis Politiques présents et puissants en France sont antidémocratiques pour la plupart d’entres eux, plus proches de l’autocratie, jamais très éloignée de la dictature.
Et je me retrouve avec ces salauds de politicards et me pose la question suivante : est-ce eux les responsables, ont-t-ils tué notre si belle démocratie ? Alors à qui la faute ?
Est-ce que les politiques des années 70-80, voire 90, étaient les mêmes qu’aujourd’hui, mais faute d’internet et autres réseaux sociaux, nous n’avions pas accès à ces informations, donc à la réalité ? Ou cela nous intéressait-il beaucoup moins à l’époque, car la situation économique était florissante et que nous étions bien moins pointilleux sur la corruption galopante, liées aux détournements de pouvoir et de fonds de notre classe politique?
Est-ce que l’individualisme forcené, inculqué depuis tant d’années a fait son œuvre, et que coupler à un sentiment d’impunité entre copains, a fini par augmenter les besoins et les possibilités de ce personnel politique, incapable d’étancher sa soif de pouvoir?
Est-ce le nouveau style décomplexé initié sous l’ère Sarkozy? Le bling-bling à l’honneur ? La nouvelle façon de communiquer 24h/24h des politiques, entourés de leur dir-com, conseillers et autres attachées de presse, se voulant proche du commun des mortels, qui induit qu’ils ne se sentent plus obligé d’être valeur d’exemple ?
Tant de questions sans réponses…
Et nous dans tout ça, quelle est notre part de responsabilité?
A force de se regarder le nombril, de réduire notre champ de vision, de se focaliser sur les proches, de ne vivre que dans l’urgence, de ne subir que les informations anxiogènes jusqu’à vouloir oublier l’Information la vraie, n’avons-nous pas, à notre tour, abandonné la chose politique ?
N’avons-nous pas baissé trop vite les bras, en se convainquant un peu facilement que nous ne pourrions rien y changer ? Notre temps d’intelligence et de réflexion s’est-il tellement restreint entre deux écrans publicitaires que notre cerveau ne parvient même plus à discerner le vrai du faux, le bon du mauvais ? Raisonner n’appartiendrait-il qu’aux nantis, qui ont le temps de la réflexion pour faire les bons choix? Ou est donc passé notre bon sens, nous, nation des lumières?
Et que dire encore de notre réflexe historique de toujours voter pour les mêmes têtes pendant des décennies, ceux la même que l’on sait incapables, mais qui nous rassurent à tors ?
A l’inverse, comment expliquer l’explosion du vote aux extrêmes (gauche et droite confondue) qui est finalement digne d’une cour d’école et de ses enfantillages rappelant le film d’Yves Robert La guerre des boutons « puis ce que tu ne fais pas ce que je dis, je vote pas pour toi, Na ! ». Sommes nous devenus des enfants ingouvernables?
Me voilà confronter à la grande question existentialiste de la poule et de l’œuf… qui sont les premiers coupables de cette situation, les électeurs ou les politiques ?
J’ai tendance à croire que nos élus devraient être au-dessus de tout cela, méritants, exemplaires, quel que soit la qualité de leurs électeurs. Ne pouvant pas (ou plus) compter visiblement sur eux, et ne voyant pas comment l’électorat pourrait changer ses mauvaises habitudes. Ne pensant, et ne souhaitant pas voire se profiler une révolution qui changera tout (quoique…) mais restant lucide, alors oui, J’ACCUSE : saloperie de démocratie !