Il y a quelques jours sur France Inter Pascale Clark interrogeait le procureur Eric de Mongolfier sur la fraude fiscale et les paradis fiscaux à la lumière de son expérience des fichiers HSBC dont il a été le détenteur en 2009 et dont Michèle Alliot Marie, alors Garde des Sceaux, a réussi partiellement à le délester. Pour moi ce rappel d'un épisode judiciaire n'est pas l'essentiel du propos d'Eric de Mongolfier, ce qu'il indique avant tout c'est l'obligation de l'indépendance des services chargés d'enquêtes et de répression.
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Ainsi le procureur Mongolfier ne préjuge pas du bien fondé de l'instauration de la haute autorité chargée de contrôler les patrimoines des parlementaires, ministres, responsables de grands exécutifs locaux et responsables d'administration, ce qui est logique puisque le président de la République a indiqué qu'elle serait indépendante.
Par contre Eric de Montgolfier indique, par exemple, que cette indépendance n'est pas acquise pour le Service central de prévention de la corruption (SCPC) instauré en 1992 par Bérégovoy suite aux scandales politiques antérieurs. Il rappelle que le procureur général Challe a été débarqué par la droite de la tête de ce service.
Et puis en ce qui concerne la fraude fiscale il rappelle que celle-ci n'est pas directement soumise à l'autorité judiciaire. À la différence des autres délits, le délit de fraude fiscale n'est pas poursuivi d'office par le procureur de la République. Ce dernier ne peut mettre en mouvement l'action publique que dans la mesure où l 'administration a préalablement déposé une plainte. Cette prérogative serait justifiée par la nature particulière du délit de fraude fiscale ; l'administration fiscale reste ainsi juge de l'opportunité des poursuites, sous le contrôle de la commission des infractions fiscales ( CIF). La CIF est composée de douze membres titulaires et de douze membres suppléants, conseillers d'État ou conseillers maîtres à la Cour des compte. En bref les pousuites pénales pour fraude fiscal sont laissées à la discrétion du ministre titulaire de Bercy ! Ce dernier peut être freiné par la CIF, mais surtout il peut s'abstenir de poursuivre se contentant des sanctions purement fiscales soumises au contrôle des juridictions administratives.
On en arrive à la toute puissance de Bercy et à l'organisation des services fiscaux qui ne sont en rien indépendants. M. de Mongolfier rend hommage au travail des agents du fisc pour mieux souligner que leurs investigations peuvent être anéanties au bon vouloir de l'administration centrale. Bel exemple de ce dysfonctionnement l'alerte sonnée par Rémy Garnier dans l'affaire Cahuzac, étouffée et sanctionnée.
Les agents de Bercy vivent ainsi une schizophrénie permanente. D'une part l'administration a besoin d'agents compétents pour assurer ses missions et afficher des résultats et elle promeut parfois les meilleurs. Mais d'autre part, au nom d'une loyauté sans cesse exigée à son égard, les carriéristes, ceux qui n'ont d'autres soucis que de ne pas contrarier l'autorité se partagent les meilleures places. Et l'on sait que les fonctionnaires d'autorité des finances ne sont pas les moins biens rémunérés...La loyauté un fonctionnaire la doit à la République!
Ce système est sans doute vieux comme la république, bien sur il a survécu en 1940, revécu en 1945. Est-ce une raison de le laisser perdurer ? Indépendance semble être le mot fétiche du président et de son gouvernement, prenons les au mot !