Chez les amateurs de sport français, les railleries entre supporters de football et de rugby fusent parfois : on cherche souvent à défendre l’intérêt de l’un et de l’autre sport. Cependant, on ne s’attendrait pas à un même débat pour ceux qui préfèrent visionner le curling ou le lancer de fléchettes, et pourtant, ceux-là sont aussi très captivants à regarder.
Plusieurs facteurs donnent une certaine « valeur » aux différents sports qui existent. Le plus important, dans notre société largement consumériste est peut-être celui du possible visionnage à la télévision. Effet pervers, il semblerait que plus l’accès au sport est privatisé (par de nombreuses chaines de sports, comme Canal + Sport, Bein Sport, Eurosport…), plus celui-ci est "populaire". Ou plutôt, l'accès au sport "populaire" et de plus en plus réservé à ceux qui ont les moyens de se payer un abonnement. De la sorte, les grandes firmes de la télévision, comme le groupe Canal +, s’accaparent de plus en plus les championnats les plus prestigieux, dans de nombreux sports et dans de nombreux pays. A ce titre, on peut prendre l’exemple de la NBA (au basket) aux Etats-Unis. Même la firme de distribution Amazon, par sa plateforme de streaming Amazon Prime, détient les droits de la Ligue 1 (football français) depuis l’année 2021-2022.
Ainsi l’accès public du sport est de plus en plus compliqué, et des chaines comme France 2 ou France 3 ont des droits pour des évènements bien particuliers : tournoi des 6 nations, Roland Garros, le tour de France… pour le dernier, encore faut-il accepter de subir les longues pages de pub qui entrecoupent la course.
Encore, ces chaînes permettent de visionner des sports largement "populaires", elles aussi - ou plutôt des compétitions de longue date, inscrites dans une culture commune - . Il faut parfois prendre des risques et s’attarder sur celles légèrement obscures – il faut insister sur le « s’attarder » - comme l’Equipe 21 qui a le mérite de donner de la visibilité à des sports peu communs à des heures où plus grand monde ne regarde sa télévision : qui peut se targuer d’avoir visionné une fois un championnat d’Europe de coupe de bois, ou -plus commun- un combat de sumo ?
Finalement, ce qui compte, ce n’est pas vraiment le temps passé devant tel ou tel sport. Pour être tout à fait clair, il ne doit pas y avoir de hiérarchie entre les sports, du moment qu’on se prend au jeu. Dès qu’il y a enjeu, dès qu’il y a de la tension au sein d’un duel, on s’étonne à rester captivé devant son écran, comme rester des heures durant devant un partie de golf (c’est possible).
Mais quelque chose reste à apprendre. Le Covid-19 nous a coupées du sport à l’extérieur de chez soi, et on s’est rendu compte avec les différentes phases de confinement qu’il était particulièrement confortable de regarder du sport à la maison ; il faut maintenant se lever de son fauteuil et aller remplir à nouveau les stades. Car c’est peut-être ici qu’il y a hiérarchie du sport ; dans la capacité de celui-ci à faire vivre un public.